Belgique

12.000 élèves équipés d’ordinateurs portables : les clés de la réussite numérique à l’école

Les 930 élèves de l’Institut Don Bosco de Woluwe-Saint-Pierre ont reçu un ordinateur portable.

© Sarah Heinderyckx

Bien avant la crise sanitaire et l’apparition de l’enseignement à distance, le numérique dans les écoles a été et est encore un enjeu de taille en Fédération Wallonie-Bruxelles. Il faut dire que le retard à rattraper est grand : en 2018, selon l’OCDE, les jeunes Wallons étaient ceux qui utilisaient le moins souvent les technologies de l’information et de la communication en classe.

En lien avec la stratégie de la Fédération Wallonie-Bruxelles pour y remédier, la Fondation Roi Baudoin agit depuis 2019 pour renforcer l’introduction du numérique dans les écoles. Elle soutient notamment le projet "Rentrée Numérique" de l’asbl EducIT qui propose d’équiper les écoles et de former les enseignants.

50 établissements accompagnés en 3 ans

Depuis trois ans, donc, cinquante établissements scolaires participent au projet, soit un total de 3000 enseignants et près de 12.000 élèves. Parmi les écoles pionnières, l’Institut Don Bosco à Woluwe-Saint-Pierre. Cette école technique industrielle a pu offrir des ordinateurs portables à l’entièreté de ses élèves contre une contribution modique des familles. Soixante euros par an pendant trois ans, puis 35€ pour garder l’ordinateur (avec un fonds de solidarité pour venir en aide aux familles qui n’en ont pas les moyens).

Une petite révolution pour l’école. En classe, c’est d’ailleurs frappant : tous les élèves sont installés derrière leur écran. Pendant un cours de sciences, ils remplissent le document que leur enseignante avait déposé sur le réseau.

Image frappante dans cette classe de sciences : tous les élèves suivent le cours sur leur ordinateur portable.
Image frappante dans cette classe de sciences : tous les élèves suivent le cours sur leur ordinateur portable. © Sarah Heinderyckx

Une petite révolution

Pour Patricia Szewcow, élève de cinquième année, c’est beaucoup plus simple : "Quand on n’avait pas les ordinateurs portables, on oubliait tout le temps nos feuilles. Les cartables étaient super lourds parce qu’on avait plein de fardes donc c’était compliqué. Maintenant ça s’est allégé, c’est plus simple", explique la jeune fille.

Quelques bancs plus loin, Nicolas Lillo abonde dans le même sens. "Ça a tellement facilité le système scolaire, nous confie le jeune homme. Avant j’oubliais souvent mes fardes, j’arrivais au cours et je n’avais pas mes affaires… Maintenant j’ai tout avec moi ! Puis personnellement j’ai une écriture désastreuse… Avec l’ordinateur on est tous au même niveau et c’est plus facile pour l’orthographe".

À l’aise sur smartphone, perdus devant un ordinateur

Tous les étudiants ont été formés dès réception de l’ordinateur. "C’était un peu compliqué au début, mais maintenant c’est beaucoup plus simple", raconte Patricia.

Une affirmation qui peut paraître étonnante pour des jeunes qu’on dit 100% connectés, mais Philippe Van Ophem, cofondateur d’EuducIT, précise : "Ils maîtrisent très bien les réseaux sociaux, les jeux en ligne, etc. Mais quand il s’agit d’utiliser vraiment le digital à des fins pédagogiques pour chercher de l’info, la critiquer, la travailler, la partager, la présenter… Le bagage est très faible en Fédération Wallonie-Bruxelles. C’est pour ça qu’on doit leur donner ce bagage à un moment ou un autre, et le meilleur endroit pour le faire c’est l’école".

Quand il reçoit un ordinateur, près d’un élève sur deux serait ainsi incapable d’enclencher la majuscule pour taper des chiffres. Mais les jeunes apprennent vite : "Il ne faut pas leur montrer très longtemps pour comprendre comment ça fonctionne. On leur donne une petite formation de quelques heures et après, ils apprennent par eux-mêmes et s’entraident", remarque Philippe Van Ophem.

Très à l'aise sur leurs smartphones, les élèves le sont souvent moins sur un ordinateur. Mais ils apprennent vite.
Très à l'aise sur leurs smartphones, les élèves le sont souvent moins sur un ordinateur. Mais ils apprennent vite. © Sarah Heinderyckx

Former les professeurs

L’idée n’est pas simplement de donner des ordinateurs aux élèves, mais bien de former les professeurs et apporter toute une série d’outils pédagogiques pour utiliser intelligemment le numérique à l’école. L’asbl EducIT envoie des techno pédagogues auprès des professeurs pendant un an, quel que soit leur niveau de compétence, afin de les accompagner dans leur projet pédagogique.

Tout est notifié à l’avance

Valérie Maluma, professeure de sciences à l’Institut Don Bosco, est convaincue des bienfaits du projet. "Je prépare mes cours à l’avance et je les mets sur le drive partagé avec les autres professeurs, explique-t-elle. Les élèves y ont accès à tout moment. Ils peuvent suivre le cours en classe, faire leurs travaux à l’école ou à la maison, voire dans le métro, c’est génial ! Ils sont beaucoup plus autonomes qu’avant. Puis avec l’agenda commun qui remplace le journal de classe, ils n’ont plus d’excuse. Tout est notifié à l’avance, ils n’ont plus qu’à regarder".

Valérie Maluma, professeure de sciences, est convaincue par les bienfaits du numérique à l'école.
Valérie Maluma, professeure de sciences, est convaincue par les bienfaits du numérique à l'école. © Sarah Heinderyckx

Résultats encourageants

D’après une étude de la Fondation Roi Baudouin pour évaluer l’impact du projet, 70% des élèves confirment que l’utilisation du numérique contribue à leur motivation et renforce la qualité de la communication avec leurs enseignants. Plus de 80% des enseignants, des parents et des directions donnent aussi un avis positif sur le projet.

Réduire la fracture numérique

L’objectif initial des fondateurs de l’asbl EducIT était de réduire la fracture numérique. Et sur ce point, ils sont plutôt satisfaits. "On se rend compte qu’il y a beaucoup de familles en Belgique francophone qui n’ont pas d’ordinateur à la maison, précise Philippe Van Ophem. Ce projet amène parfois un premier ordinateur au sein de la famille qui est utilisable par le jeune pour ses devoirs ou pour d’autres activités, mais aussi par les parents ou les frères et sœurs. Il y a alors un grand intérêt des parents à voir cet outil rentrer chez eux avec un jeune qui sait l’utiliser".

Passer le relais aux réseaux

L’année prochaine, l’objectif est de faire encore grandir le projet pour atteindre une centaine d’écoles accompagnées, soit près d’un établissement secondaire sur cinq. À la fin de l’année scolaire 2023, l’asbl passera le relais aux différents réseaux d’enseignement pour poursuivre le travail entamé.

"On voulait montrer qu’avec les mêmes montants investis depuis 20 ans dans le numérique en Wallonie et à Bruxelles, on peut équiper tous les jeunes d’un ordinateur et s’assurer qu’ils aient à l’école et à la maison un outil qui leur permette d’être pleinement ouverts sur ce monde numérique qui fait partie de notre quotidien", conclut Daniel Verougstraete, l’autre cofondateur d’EducIT.

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