175 ans de Bruxelles-Paris en train : un voyage passé de 12 heures 30 minutes à 1 heure 22

Paris, 2021 : un souvenir pour marquer les 175 ans de la liaison Paris-Bruxelles : une locomotive française capable de passer la frontière franco-belge sans s’arrêter en… 1963

© Philippe Touwaide

Un anniversaire… Et un coup double : ce 14 juin, on célèbre la toute première liaison ferroviaire entre deux capitales, en l’occurrence Paris et Bruxelles.

C’était le 14 juin 1846. Et même les 14 et 15 juin 1846, puisqu’il fallut, à l’époque, 12 heures 30 pour parcourir les 370 kilomètres en train à vapeur. Et on fit le voyage en deux fois : Paris-Lille, puis Lille-Bruxelles.

Début juin 2021, c’était aussi le 25e anniversaire de la ligne Thalys, inaugurée le 2 juin 1996, qui reliait à ce moment les deux capitales en 1 heure 58 minutes, ramenée, un an plus tard, à 1 heure 22. Un anniversaire célébré par un voyage en Thalys spécial. Que de chemin parcouru…

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A bord des trois trains qui partirent donc le 14 juin 1846 de Paris-Nord, que du beau linge : de nombreuses personnalités, et, surtout, les fils du Roi "des Français" comme se fit appeler Louis-Philippe, dernier roi de France, les Ducs de Nemours et de Montpensier. Louis Philippe (père de la deuxième épouse de Léopold Ier, Marie-Louise), au départ modeste et discret, puis largement contesté, qui s’achemine vers la fin de son règne.

Le Roi Louis-Philippe et une partie de sa famille, dont les Ducs de Montpensier et de Nemours
Le Roi Louis-Philippe et une partie de sa famille, dont les Ducs de Montpensier et de Nemours © GettyImages

La France ne roule pas sur l’or, à l’époque, et il faudra l’apport non négligeable du baron de Rothschild pour financer la partie de chemin de fer Paris-Lille. La Compagnie du chemin de fer du Nord a, en effet, été créée en septembre 1845 par le banquier James de Rothschild et ses associés, pour exploiter la concession par l’État des lignes de Paris à la frontière belge, en passant par Lille et Valenciennes, et elle fut, par la suite, l’une des grandes composantes de la future SNCF.

Y aller par Pontoise

A bord de ces trois trains, ces 14 et 15 juin, on va passer par Pontoise, Amiens, Arras, Valenciennes et Mons.


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Il y aura des festivités tout le long du trajet. Et des grognements aussi : entre ceux qui se souviennent que le chemin de fer est une invention britannique (1815 est encore dans les mémoires), ceux qui râlent parce que c’est de l’argent privé qui finance en France l’opération, les ouvriers qui ont sué sang et eau pour construire la ligne et qui ne sont pas conviés à la fête ou encore le fait que le départ, le 14 juin, a lieu un dimanche… Jour de la Fête-Dieu ! Et la messe ? Serait-ce un mauvais coup du financier juif ?

Mais, avançons. "Dès 1853", explique Philippe Touwaide, directeur du service de médiation de l’Aéroport de Bruxelles et passionné de trains, "on apporte de premières modifications au trajet et on ramène la durée à 8 heures. Vitesse moyenne : 46 km à l’heure".

En 1858, nouvelles modifications : on passera par Creil, Compiègne, Aulnoye, Quévy et Mons, et on coupe court ainsi aux manœuvres jusqu’ici nécessaires à Valenciennes.

Si on est encore très loin des 1h22 min actuelles, en 1896, Paris n’est plus qu’à 4h59 de Bruxelles, à raison des 62 km/h, en vitesse commerciale.

La fée électricité…

Mais les trains sont toujours à vapeur, et si les locos françaises peuvent dès 1920 poursuivre leur route vers Bruxelles, il faudra encore attendre le 9 septembre 1963 pour une électrification totale de la ligne Paris-Bruxelles ; en passant par les premières motrices diesel en 1930, la première ligne électrifiée reliant Bruxelles-Nord à Anvers-Central en 1935, et l’inauguration de la jonction Nord-Midi en 1952, sans compter, dès 1957, la création du Trans Europe Express, avec des trains internationaux quotidiens depuis Bruxelles.

… À deux vitesses

Electrification, oui, mais pas si vite, rappelle Philippe Touwaide. "En 1963, on pense national, et chaque pays choisit son courant de traction : 3000 volts en continu pour la Belgique, 25.000 alternatifs pour la France". Du coup, rendez-vous à Quévy, la gare frontière commutable, avec ses deux voies centrales permettant aux trains remorqués par les locomotives poly tension de franchir la gare sans s’arrêter.

Et voilà les locomotives, qui font le trajet Paris-Bruxelles en moins de 3 heures, promues pionnières de l’avancée technologique, puisqu’elles sont capables de circuler sous deux courants électriques et 4 tensions différentes.

Une locomotive belge capable elle aussi de passer la frontière en 1963
Une locomotive belge capable elle aussi de passer la frontière en 1963 © Philippe Touwaide

A l’époque du Trans-Europ-Express (célébré en 1977 par le groupe allemand Kraftwerk, qui souligne l’abolition sur les rails les barrières entre pays – mais c’est une autre histoire) qui parcourt toute l’Europe, avec des trains internationaux quotidiens, on "sait" voyager.

Ceux vers Paris, parés de jolis noms comme l’Etoile du Nord, le Memling, ou l’Oiseau Bleu, offrent un nouveau et réel confort : première classe uniquement, voitures en inox, climatisation dans certaines voitures, wagon-restaurant, avec, même, service sans quitter sa place ! De quoi séduire les hommes d’affaires, et les amener, qui sait, à se détourner de l’avion…

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Mais tout a une fin, et les TEE seront remplacés par le Thalys.

En juin 1996, il y a 25 ans, la vitesse et le gain de temps sont à l’honneur : 1 heure 58 minutes seulement pour rallier l’autre capitale. Un an après, ce ne sera plus qu’1 heure 22.

Et c’est cet anniversaire-là aussi qui est célébré ce 14 juin 2021. Avec la reprise post-pandémie des 11 allers et retours quotidiens Bruxelles-Paris.

Sujet JT 14/06/2021:

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