L’anthropologue Nastassja Martin a sorti un essai sur la situation paradoxale de la peuplade évène, esseulée à l’extrême est du territoire russe : elle est première victime et témoin du changement climatique, tout en n’étant pas informée des dangers annoncés par les scientifiques du monde entier. Explications dans Et dieu dans tout ça ?
Née en 1986, Nastassja Martin, spécialiste des populations arctiques, est l’autrice de plusieurs livres dont Ames sauvages et Croire aux fauves. Son nouvel essai, A l’Est des rêves. Réponses Even aux crises systémiques, offre un aperçu édifiant des conséquences du changement climatique, mais propose aussi une piste de solution : la forêt pourrait redevenir un futur possible d'un point de vue ontologique.
Elle s’est rendue au Kamtchatka, dans l’extrême orient russe, à la rencontre d’une famille élargie qui a décidé de repartir vivre en forêt au moment de la chute de l’Union soviétique. Famille qui fait partie du peuple Évène. La voix de Daria, membre de cette famille, est au cœur de l’essai de l’anthropologue française. "Notre force est d’avoir cru à la forêt quand tout s’effondre autour" souffle cette citoyenne russe, ancienne travailleuse dans un kolkhoze. En 1989, Daria estime que "le rêve de la forêt redevient une réalité possible". Elle s’installe alors dans cette région complètement isolée, coupée de l’effervescence du monde industrialisé, à 400 kilomètres de premières voies carrossables.