Accident de Sierre : 10 ans plus tard, des parents vivent avec des questions sans réponses

Le 13 mars 2012, le tragique accident dans le tunnel de Sierre met en émoi toute la Belgique.

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Ce dimanche 13 mars, cela fait 10 ans que le tragique accident d’un autocar dans le tunnel de Sierre coûtait la vie à 28 personnes dont 22 écoliers. Après de nombreux mois d’enquête, de multiples pistes ont été écartées. Mais des questions persistent sur l’état psychologique du chauffeur. Ce dernier, décédé dans l’accident, a emporté avec lui des réponses que de nombreuses familles espéraient pour faire leur deuil. L’enquête clôturée, les parents vivent toujours avec des zones d’ombre sur les circonstances de l’accident.

10 ans plus tard, Olga Leclercq et d’autres parents espèrent toujours connaître les circonstances exactes de l’accident.
10 ans plus tard, Olga Leclercq et d’autres parents espèrent toujours connaître les circonstances exactes de l’accident. © RTBFD

J’ai besoin de savoir… J’ai vraiment besoin de savoir

Le mardi 13 mars 2012, 52 personnes revenaient en car d’une semaine de classe de neige. Deux minutes avant l’accident, un changement de chauffeur s’opère. Dans le tunnel, le véhicule monte inexplicablement sur la bordure. Quelques dizaines de mètres plus loin, le véhicule s’encastre dans le mur d’une aire d’urgence. Le terrible bilan de ce choc frontal dénombre 28 morts, dont 22 enfants. Olga Leclercq, la maman de la petite Éline qui a perdu la vie dans cet accident, nous livre ses sentiments qui la traversent au quotidien : " Je pense tous les jours à ma fille. Elle était une fille superbe, très sympathique. Je l’adore encore beaucoup. Mais nous avons encore beaucoup de questions. Cela ne me donne pas la paix. Je veux savoir ce qu’il s’est passé, pourquoi cela s’est passé. J’ai besoin de savoir. J’ai vraiment besoin de savoir ! "

L’enquête, menée par la justice suisse, écarte les hypothèses d’un véhicule tiers, d’un excès de vitesse, d’un problème technique du car, de la présence d’alcool dans le sang du chauffeur, d’un moment de distraction, etc. Après des mois et des mois d’investigation, l’enquête prend fin au grand désarroi des parents qui espéraient comprendre les circonstances de l’accident. Olga Leclercq, qui reconnaît un excellent travail des enquêteurs, déplore malgré tout une fin prématurée de l’enquête : " Dans un premier temps, l’enquête était très bien exécutée d’un point de vue technique. Après trois mois, c’était clair que la cause de l’accident était celle du chauffeur. Mais en ensuite, il n’y avait plus d’enquête profonde. "

Tous les éléments, les uns à côté des autres, laissent penser à un acte volontaire lié à cet antidépresseur

Quelques parents ont ensuite fait appel à des experts extérieurs. La trajectoire, l’absence de traces de freinage, etc., les conclusions des spécialistes sont claires. Il s’agirait d’un acte volontaire du chauffeur. En possession de tous les éléments du dossier, Douglas De Coninck a investigué sur cet accident. Ce journaliste du quotidien De Morgen nous révèle des pistes qui entretiennent l’hypothèse du suicide, notamment en évoquant la prise d’un antidépresseur dont les effets secondaires peuvent parfois pousser une personne à des actes de violence, voire des envies suicidaires incontrôlables : " Je tiens à préciser que l’enquête a très bien été menée. La question, c’est l’interprétation des données. Les éléments troublants, c’est d’abord le tachygraphe. On voit qu’il roule à 100 km à l’heure (vitesse autorisée) quand il monte sur la bordure de 18 centimètres de hauteur. Le chauffeur continue à rouler à 100 km à l’heure jusqu’à la dernière seconde sans freiner et sans changer sa trajectoire. Le contenu de ses SMS révèle qu’il a une vie personnelle très compliquée. Et puis, il y a le médicament. Il prend le Seroxat, un antidépresseur, dont on connaît à travers le monde les risques d’un comportement suicidaire. L’affaire du pilote de Germanwings, est une copie conforme. Je ne dis pas qu’il faut tirer les conclusions d’un suicide. Mais tous les éléments, les uns à côté des autres, laissent penser à un acte volontaire lié à cet antidépresseur. "

Le décès du chauffeur empêche toute procédure pénale

Si l’hypothèse du suicide n’a jamais été exclue par la justice suisse, Olivier Elsig, le procureur suisse chargé de l’enquête, assure que tout a été mis en œuvre pour apporter des réponses aux familles. S’il ajoute qu’après près de deux ans, tous les éléments tournent désormais autour du chauffeur, le décès du celui-ci empêche toute procédure pénale : " On a mis le maximum de moyens dans cette enquête. Toutes les pistes ont été étudiées. Quand on nous a demandé des compléments d’enquête qui paraissaient pertinents, on les a administrés. Et puis c’est seulement au bout de ce processus qui a duré à peu près deux ans, qu’on se dit qu’on a la certitude que la cause est liée au chauffeur. Cette personne est décédée. La conséquence juridique, c’est qu’on ne va pas poursuivre l’enquête au-delà de ça. Mais c’est surtout que, de mon point de vue, il n’y avait pas de mesures supplémentaires qui nous auraient permis de répondre aux questions que se posaient encore certaines familles. Je tiens à préciser que je comprends leurs attentes légitimes. Et que ces familles ont fait preuve d’une incroyable dignité. "

10 ans après ce dramatique accident qui a endeuillé toute la Belgique, Olga Leclercq et d’autres parents ont toujours l’espoir qu’une commission d’enquête belge s’empare du dossier pour faire la lumière sur les zones d’ombre qui persistent.

Sur le même sujet, au JT (12/03/2022) :

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