Belgique

Affaire Mawda, procès en appel du policier : "L’acquittement est impossible"

Ce matin, s’est ouvert le procès en appel du policier qui a tiré et mortellement touché la petite Mawda la nuit du 17 mai 2018. En première instance, l’homme a été reconnu coupable d’homicide involontaire par défaut de précaution ou de prévoyance et condamné à un an de prison avec sursis par le tribunal correctionnel de Mons. Le policier conteste cette décision et demande son acquittement.

Pas de proportionnalité

L’audience a commencé par le réquisitoire du parquet. L’avocate générale a demandé que la peine soit confirmée. Pour elle, le principe de proportionnalité n’a pas été respecté et d’asséner trois arguments. D’une part, il y avait d’autres moyens d’arrêter la camionnette que par un tir. D’autre part, les conditions de visibilité étaient mauvaises. Et finalement, l’avocate générale souligne le fait que le policier lui-même a déclaré ne pas être aguerri au tir.

Dans son réquisitoire, l’avocate générale est également revenue sur "l’attitude légère du policier". Elle complète : "Le policier a délibérément tiré, il a pris un risque en comptant sur son adresse et sa chance". Et de préciser le contexte de cette course-poursuite : "D'autres policiers étaient mobilisés dans cette course-poursuite. Aucun d'entre eux n'a sorti son arme ou n'a eu l'idée de faire usage de son arme"

Un acquittement impossible

Pour l’avocate de la famille de Mawda, Me Selma Benkhelifa, la demande d’acquittement du policier est impossible à concevoir. "Les parents de Mawda trouvaient la peine d’un an de prison avec sursis déjà très indulgente. Mais là, les sentiments qui prédominent, ce sont l’épuisement et l’incompréhension". Et de poursuivre : "On entend des déclarations qui laissent sous-entendre que le policier n’a rien à se reprocher et que les parents porteraient une part de responsabilité dans ce drame. C’est incompréhensible", s’indigne-t-elle.

L’avocate, comme en première instance, continue de demander une requalification des faits reprochés au policier. Elle demande que ces faits soient considérés comme des coups et blessures volontaires ayant involontairement entraîné la mort.

Procès Mawda et acquittement du policier: Selma Benkhelifa, avocate des parents de Mawda

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Difficile de recommencer les débats

Du côté de la défense du policier, Me Laurent Kennes affirme que la décision d’aller en appel n’a pas été facile à prendre : "Tant pour les parties civiles que pour mon client, c’est difficile de se replonger dans ces débats. Mais on interjette appel parce qu’on estime qu’il n’y a pas eu de faute dans le chef de mon client".

Procès Mawda et acquittement du policier: Laurent Kennes, avocat du policier

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Lors de l’audience, le policier est revenu sur ses difficultés personnelles depuis le drame : "C’était un enfant, je ne voulais pas. Je ne peux pas décrire ce que je ressens. Je comprends les parents. Mais je viens ici parce que je trouve injuste d’être jugé alors que c’était un accident".

En première instance, le tribunal correctionnel de Mons avait estimé que le tir du policier était une faute. Mais pour son avocat, c’est trop facile de réinterpréter a posteriori les décisions prises cette nuit-là : "Le tribunal a dit qu’il aurait été préférable de ne pas intervenir et de placer un barrage, mais ce n’était pas du ressort de mon client". Et d’ajouter : "Dans la formation des policiers, à l’époque, il n’était pas interdit de tirer lors d’une course-poursuite lorsque deux véhicules sont côte à côte et à peu de distance l’un de l’autre. C’est exactement la situation dans laquelle se trouvait mon client", conclut Laurent Kennes.

Comité de soutien

À l'extérieur de la salle d'audience, le slogan "Justice pour Mawda" a de nouveau été scandé devant la cour d’appel de Mons. Comme lors des audiences en première instance, un comité de soutien était présent pour accompagner la famille de Mawda. Pour Marie Demoustier, membre de l’association Présence action culturelle, il est important de soutenir les parents de Mawda : "Il faut être solidaire pour accueillir ces personnes. Un être humain est un être humain", clame-t-elle.

Dans la foule également, des membres du groupe montois de soutien aux sans-papiers. Freddy Mathieu est l’un d’entre eux : "On est là pour rappeler que ce drame s’inscrit dans un contexte, celui des opérations Médusa, de la chasse aux migrants. C’est ce contexte politique qui a mené à la mort de Mawda".

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