L'opéra Aïda, mis en scène par Franco Dragone, sera présenté au public belge à Anvers et Bruxelles en mai et décembre prochains. "Même si je n'ai pas l'impression de faire mon retour en Belgique, cela fait tout de même plaisir d'avoir un spectacle à présenter à nos concitoyens. De leur donner un aperçu de ce que l'on fait", reconnait le metteur en scène, dont la société, Dragone, a créé plusieurs dizaines de spectacles à travers le monde depuis 2000. D'après lui, le public belge est "très intelligent", habitué à beaucoup de diversité et il donne du relief à une représentation.
La genèse d'Aïda remonte à 2013, lorsque la directrice du théâtre San Carlo de Naples a demandé au Louviérois de faire l'ouverture de la saison. "Lorsqu'une telle personne demande à quelqu'un qui fait du cirque d'ouvrir la saison, c'est déjà quelque chose! J'ai respecté à la note près la musique de Verdi. Par contre, j'ai un peu désobéi sur le visuel", admet-il.
Si Franco Dragone se montre intéressé par la musique, il l'est moins par l'histoire d'amour racontée par cet opéra. Il lui fallait trouver une connexion avec le monde contemporain. Ce qu'il a fait en se baladant dans les rues de la ville italienne, où il a été surpris par le nombre d'amuseurs publics qu'il y croisait mais aussi par le nombre de réfugiés qui passaient déjà par cette région à l'époque. Il s'est inspiré de ces gens, "qui sont les témoins de la grande Histoire, tels ceux que les puissants ne regardaient jamais".
L'opéra en quatre actes de Verdi sera présenté au Stadsschouwburg d'Anvers les 11, 12, 13 et 14 mai, et à Forest National, à Bruxelles, le 23 décembre. Il a été spécialement mis en scène par Franco Dragone pour la société de promotion et de production de spectacles belge Music Hall. Il bénéficiera de la même scénographie qu'à Naples mais dans un espace différent. "Or l'espace détermine quelque part le théâtre", relève-t-il, impatient d'en découvrir le résultat. "Cela fait quand même un peu peur car c'est chez moi!"
Aïda, qui mêle le côté spectaculaire de la représentation, avec un décor post-apocalyptique, et un aspect davantage métaphorique, est loin du budget de certains opéras. Mais il en garde son aspect visuel fort. "Il ne doit pas seulement impressionner mais aussi émouvoir." Et cela a permis de rajeunir le public venu y assister lorsqu'il a été présenté à Naples. "C'est ce que l'on veut amener en Belgique aussi", ambitionne le metteur en scène. "L'opéra n'est pas fait que pour ceux qui l'aiment. Et il a sa place dans une salle de concert comme Forest National", souligne-t-il.
Cela faisait de très nombreuses années qu'un spectacle à budget de Franco Dragone n'avait pas été produit dans son propre pays. Le fondateur de la société Music Hall a cependant vu la possibilité de le présenter au public belge et a convaincu le Louviérois.
Toutefois, pour amortir un projet de cette envergure, il faut l'exporter en dehors des frontières. "Les budgets de la culture sont toujours les premiers à être rabotés", se désole-t-il en effet, se félicitant par contre de l'ouverture, depuis début février, aux arts vivants du tax-shelter, un avantage fiscal offert aux entreprises qui souhaitent investir dans une oeuvre.
La prochaine grande date dans l'agenda de Franco Dragone est l'ouverture de son spectacle à Dubaï le 10 août. Un autre devrait suivre au Vietnam en plus des spectacles déjà créés et à venir ailleurs aux Moyen- et Extrême-Orients. "Mais les projets et les budgets ne sont pas comparables. Dubaï prépare par exemple l'Exposition universelle de 2020. Ils peuvent se permettre d'investir et de construire des théâtres."
Le metteur en scène entend par contre continuer, au travers de son travail, à déconstruire les murs entre les citoyens, à l'image de celui qui doit voir le jour entre les Etats-Unis et le Mexique. "Nous sommes beaucoup plus forts ensemble. Nous ne devons pas nous enfermer dans nos ghettos et il faut travailler avec nos richesses", lance-t-il.
Un leitmotiv qu'il applique également à son propre pays, où il mêle toutes les communautés dans la préparation de ses spectacles. "On a préparé celui de Macao à Lindt, celui de Céline Dion à La Louvière ou encore celui de Las Vegas à Mons. Je tiens à cette idée de travailler ensemble."
Belga