Alerte sur la démocratie: les régimes autoritaires et populistes sont de plus en plus nombreux

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Par Frédéric Faux, Stockholm

En lisant les informations, entre les coups d’Etat, les menaces sur les libertés, la montée des populismes, vous avez peut-être l’impression que la démocratie est en danger… Mais ce n’est pas qu’une impression. L’Institut international pour la démocratie et l’assistance électorale (IDEA), basé à Stockholm, qui fait le point tous les deux ans et depuis 1977 sur la situation politique dans le monde, publie ce lundi son dernier rapport. Et sonne l’alerte.

Le nombre de démocraties "en recul" a doublé au cours de la dernière décennie, représentant désormais un quart de la population mondiale. Dans cette liste apparaissent maintenant les Etats-Unis des années Trump mais aussi des pays membres de l’Union européenne comme la Hongrie, la Pologne, et même la Slovénie, qui préside le conseil européen de l’UE.


►►► Rapport 2020 sur l'Etat de droit dans l'UE : comment se porte notre démocratie ?


"Il particulièrement inquiétant de voir des leaders démocratiquement élus qui démantèlent de l’intérieur les attributs fondamentaux de cette démocratie en affaiblissent le contrôle du gouvernement, les libertés civiles, les médias indépendants", estime Seema Shah, qui a supervisé la rédaction de ce rapport. Et parfois, cela va jusqu’à un changement de régime. En cinq ans, le nombre de démocraties dans le monde est passé de 104 à 98, avec des coups d’Etat dans certains pays comme la Birmanie ou le Soudan.

Aujourd’hui, c’est plus des deux tiers de la population mondiale qui vivent dans des démocraties "en recul", ou sous régimes autoritaires. 

Le Covid, "le test le plus sévère qu’on ait pu imaginer"

Le Covid n’a pas été étranger à cette crise. Comme l’écrit Kevin Casas-Zamora, secrétaire général de l’IDEA, il a été "le test le plus sévère qu’on ait pu imaginer. Du jour au lendemain, les démocraties ont dû surmonter d’énormes obstacles pour maintenir les élections et assurer le fonctionnement des pouvoirs législatifs et judiciaires." Certaines ont été exemplaires, comme la Corée du Sud, où les candidats ont pu faire campagne par le biais de la réalité virtuelle, et où même les confinés et les hospitalisés ont pu voter.

Dans d’autres pays, on a développé le vote par correspondance, par procuration, ou le vote anticipé. Mais d’autres régimes ont profité de cette opportunité pour intensifier leur répression, 2020 étant la pire année jamais enregistrée, en invoquant la menace du Covid. L’épidémie a ainsi été le prétexte de mesures liberticides en Algérie, en Inde, ou au Banglasdesh.

Populisme et réseaux sociaux

Les attaques contre la démocratie, cependant, sont aussi plus anciennes. Pour Seema Shah, qui a supervisé ce travail sur la démocratie dans le monde pour l’IDEA, elles se sont amplifiées après la vague démocratique qui avait suivi la chute du Mur de Berlin, dans les années 90 : "Cela correspond à la montée du populisme mais surtout à celle des réseaux sociaux qui ont contribué à la désinformation, au renforcement des extrêmes. Ces réseaux ont donné aussi des outils aux régimes autoritaires pour contrôler leur population et pour mener des campagnes de désinformation transnationales destinées à influencer l’opinion dans d’autres pays. Quand les gens ne peuvent plus faire la différence entre ce qui est un fait et ce qui ne l’est pas vous touchez à l’un des fondements de la démocratie. L’exemple le plus connu est celui de Trump aux Etats-Unis, mais on pourrait aussi citer l’action de l’entreprise spécialisée dans le recueil de données Cambridge Analytica lors des élections au Kenya".

Cet épais rapport donne cependant des raisons d’espérer. Plus de 80% des pays, malgré la pandémie, et les restrictions, ont dû faire face à des manifestations du rue, ce qui montre la vigueur de la demande démocratique.

Certaines Nations, certes peu nombreuses, ont connu une évolution positive comme l’alternance pacifique vécue par la Zambie lors des élections d’août 2021, ou l’ouverture progressive du régime autoritaire en Ouzbékistan. Quelques signes timides montrent aussi un début d’engagement du secteur privé sur les questions démocratiques, comme dans les cas de la minorité Ouighour en Chine.

Et surtout les autocrates, qui par ailleurs maquillent leurs vrais chiffres de mortalité, se sont avérés bien plus inefficaces que les démocrates pour lutter contre la pandémie et protéger leur population.

►►► Pour en savoir plus : https://www.idea.int

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