Belgique

Alertes sécheresse en Flandre et en France : en Wallonie, les réserves d’eau ne manquent pas

Site de production d’eau potable de la SWDE et d’Idelux à Udange, Luxembourg

© BELGA PHOTO VINCENT LESCAUT

Par Jean-François Noulet

La ministre wallonne de l’Environnement, Céline Tellier (Ecolo) l’expliquait ce jeudi matin sur la Première, la Wallonie se prépare à des plans de gestion rationnelle de l’eau, en cas de crise. Il s’agit d’anticiper l’avenir et les conséquences des dérèglements climatiques.

Actuellement, la sécheresse inquiète dans certaines régions. Le nord du pays est en "code jaune" pour le risque d’incendie dans les zones naturelles. En France, la question de l’eau est aussi au cœur des préoccupations. Et en Wallonie, qu’en est-il ?

Il faut dissocier la sécheresse en surface et la situation des réserves d’eau en sous-sol.

La Wallonie dispose d’atouts pour ne pas manquer d’eau

La Wallonie bénéficie "d’une situation géologique favorable", résume Benoît Moulin, le porte-parole de la SWDE, la Société wallonne des Eaux. Le sous-sol est en effet propice à l’accumulation de masses d’eau souterraines. "C’est particulièrement le cas parce qu’on a un sous-sol qui est globalement calcaire. Le calcaire, c’est une éponge", explique Benoît Moulin. Dans ce sous-sol, l’eau peut s’accumuler, à plusieurs dizaines de mètres de profondeur et ne pas être inquiétée par les fortes chaleurs à la surface.

Les grandes zones aquifères wallonnes sont principalement localisées dans le Hainaut, dans le Brabant, en Hesbaye et dans le Condroz. Plus au sud, le sous-sol est moins propice au stockage de l’eau. "Ce sont des zones où le sous-sol est plutôt de schiste, de grès, donc on a des belles rivières parce que l’eau ruisselle, mais on n’a pas les masses d’eau souterraine", relève Benoît Moulin.

En revanche, dans le sud de la Wallonie, le relief, à l’inverse de la Flandre, permet le stockage d’eau en surface. "Il y a le barrage de la Gileppe, le barrage d’Eupen, le barrage de Nisramont, le barrage du Ry de Rome (Couvin) qui permettent de stocker de l’eau en suffisance pour alimenter la distribution en eau potable", précise Benoît Moulin.

© Source : SWDE

Jusqu’à présent, les précipitations annuelles sont suffisantes

"Dans l’état actuel des choses, on récupère toujours en recharge hivernale ce qui a été consommé", souligne le porte-parole de la SWDE. Et le stock d’eau disponible est plus élevé que ce dont ont besoin les consommateurs alimentés en eau wallonne : les Wallons, mais aussi Bruxelles qui prélève son eau en Wallonie, et la Flandre qui reçoit aussi des volumes d’eau du sud du pays.

"Si on fait le total de tout ça, on est à plus ou moins 380 millions de m3 par an qui sont consommés", précise Benoît Moulin. "Ce qu’on consomme se renouvelle", précise-t-il. Bon an, mal an, sur les 380 millions de m3 d’eau prélevés en Wallonie, 40% sont destinés aux consommateurs wallons, environ 17% aux consommateurs bruxellois, 21% partent en Flandre. Le reste est soit perdu à cause de fuites, soit pompé sans être répertorié, soit utilisé par la protection civile et les services d’incendie, soit utilisé pour le nettoyage des installations de production d’eau.

Actuellement, les réserves d’eau sont suffisantes

Un coup d’œil à la carte du réseau d’approvisionnement en eau du sud du pays suffit pour s’en rendre compte. Toutes les ressources sont sous contrôle. Il n’y a pas d’endroit où ces ressources diminuent ou risquent de manquer.

© Etat des nappes aquifères – 8 juin 2023 – Infographie RTBF

Pourquoi certaines zones de Wallonie manquent-elles d’eau en cas de sécheresse ?

On le voit chaque été, des communes wallonnes sont malgré tout confrontées à des difficultés d’approvisionnement en eau. C’était le cas, par exemple, l’été dernier dans une série de communes où des mesures de restrictions avaient dû être prises.

Il peut s’agir de communes qui "gèrent leur réseau de manière autonome", explique Benoît Moulin. "Leur réseau est structuré de manière locale. Ils puisent dans les captages locaux et s’il n’y a plus assez dans ces captages, ils ont des problèmes" résume Benoît Moulin. C’est typiquement le cas de la commune de Rochefort, qui cherche d’ailleurs des solutions à son approvisionnement et vient de trouver une nouvelle source d’eau potable.

C’est aussi le cas de certaines communes desservies par la SWDE, souvent dans la région de l’Ardenne ou du Centre-Ardenne où, là aussi, les captages locaux peuvent ne pas suffire. Vielsalm et Beauraing sont des exemples qu’on donne du côté de la SWDE et pour lesquels on travaille à des solutions. "Les investissements qu’on est en train de faire, c’est d’aller chercher ailleurs les volumes complémentaires nécessaires", explique Benoît Moulin, "parfois à 10, 20 ou 30 km de là, dans une zone où il n’y a pas de problèmes". C’est ce qu’on appelle "le schéma régional de ressources en eau", parfois surnommé "autoroute de l’eau" qui permet de connecter différentes zones de Wallonie pour amener l’eau de là où il y a des réserves supplémentaires disponibles à des endroits qui manquent d’eau.

Des interrogations pour l’avenir

Si la situation actuelle est plutôt rassurante, l’avenir est plus incertain. Là, ce sont les changements climatiques qui pourraient changer la donne.

On se demande en effet si à l’avenir les stocks d’eau wallons se renouvelleront toujours aussi bien, car la forme des précipitations pourrait changer. "Même si on va recevoir sur la tête le même volume d’eau, la nature des précipitations, un peu comme on l’a connu à l’été 2021 avec des épisodes très courts mais très intenses, c’est une nature de précipitation qui est beaucoup moins favorable à la recharge des nappes souterraines", explique Benoît Moulin. "A ce moment-là, une grande quantité d’eau ruisselle, mais ne percole plus", ajoute-t-il. Et donc, cela ne remplit plus les nappes aussi bien…

C’est dans cette perspective-là qu’il y a lieu de plancher sur des adaptations. C’est l’objectif des plans de gestion rationnelle de l’eau qu’évoquait la ministre Tellier ce jeudi matin sur la Première. Il s’agit d’évaluer les masses d’eau disponibles pour recharger les nappes aquifères en fonction des différents scénarios météorologiques. Cela doit permettre de prendre des mesures, par exemple de réduction de consommation, pour compenser les volumes d’eau qui ne percolent plus vers les nappes en sous-sol.

L'invitée de Matin Première: Céline Tellier, Ministre wallonne de l'Environnement (08/06/23):

L'invitée: Céline TELLIER, Ministre wallonne de l'Environnement

Pour voir ce contenu, connectez-vous gratuitement

Extrait du JT du 8/6/2023

Inscrivez-vous aux newsletters de la RTBF

Info, sport, émissions, cinéma... Découvrez l'offre complète des newsletters de nos thématiques et restez informés de nos contenus

Sur le même sujet

Articles recommandés pour vous