Anne et Georges, octogénaires parisiens, professeurs de musique retraités, vivent une existence douce et harmonieuse dans leur appartement bourgeois. Jusqu’au jour où Anne est victime d’un AVC qui la laisse à demi paralysée. Elle fait promettre à Georges de ne pas être placée dans une maison de soins, et veut coûte que coûte rester chez elle… Se pose alors pour le mari l’angoissante question : comment gérer au quotidien l’inexorable déchéance physique de sa femme ?
"Pas de sentimentalisme". C’était le mot d’ordre donné par Michaël Haneke à ses acteurs. Et ce qui caractérise le cinéma de l’auteur de " Caché ", c’est son intense sobriété : ses films, même s’ils peuvent explorer des thèmes propices au mélodrame, sont des épures où la réflexion philosophique prime souvent sur l’émotion brute. Car inévitablement," Amour " renvoie le spectateur à son propre questionnement face à la vieillesse, la maladie et la souffrance ; c’est en cela que le cinéma de Haneke est original et d’une grande dignité.
Haneke a réuni deux comédiens d’exception pour incarner Anne et Georges : Emmanuelle Riva, mythe de la Nouvelle vague grâce à "Hiroshima mon amour", et Jean-Louis Trintignant, qui n’avait plus rien tourné de consistant au cinéma depuis " Ceux qui m’aiment prendront le train " de Patrice Chéreau en 1998. Haneke a réussi miraculeusement à convaincre Trintignant d’incarner Georges, et revoir son visage buriné de 81 ans est un des atouts indéniables d’"Amour". L’acteur français avait remporté le prix d’interprétation masculine à Cannes en 1969 grâce au film "Z" de Costa-Gavras ; il mériterait aujourd’hui amplement un deuxième trophée…
H.Dayez