Arno Rafael Minkkinen : six décennies d’autoportrait nu en communion avec la nature

Regarder une photo d’Arno Minkkinen : tout un parcours 

L'artiste nous fait voyager entre harmonie, fascination et interrogation. On a d’abord le sentiment d’une véritable fusion avec la nature, une incorporation plutôt qu’une présence ou même une communion. Le photographe n'est pas DANS la nature; il EST nature. Pas de pacotilles new age dans ses images. La nature n’est jamais un décor ou un arrière-plan. Elle est toujours le sujet principal.

we are no different than nature, we are nature 

Le monde est éternel, écrit Minkkinen, et l’homme en est un élément. Ni négligeable, ni fragile, ni dominant. Une vision holistique dégagée de tous les clichés du genre. La nature dans le regard de Minkkinen n’est pas romantique. Elle est parfois grandiose, parfois magique, parfois pourrissante, parfois dangereuse. Quelquefois le corps se confond avec la nature - le dos est un rocher, la jambe une branche d’arbre -, d’autres fois il défie les lois de la pesanteur ou créé des formes inédites (sans pratique du yoga !).

Viennent ensuite les questions sur la manière de faire, le procédé. Minkkinen s’impose une autre contrainte : toujours travailler en solo; personne ne mettra son œil dans le viseur à sa place. Et lui-même, armé de son déclencheur à distance, ne contrôle pas totalement l’image. Alors, par quel miracle ses pieds marchent-ils sur l’eau, ses mains sortent-elles de la neige, son corps flotte-il suspendu sur l’horizon…  

" L’art est le risque rendu visible "

Dès le début de son projet d’autoportrait, il y a plus de 50 ans, Minkkinen n’a rien planifié. Sa photographie est très intuitive, confirme Valérie Bach. " Il voit l'arbre et il se dit je peux me mettre dedans ". Arrivé à Bruxelles, raconte la galeriste, il fait une photo avant le petit-déjeuner en manipulant la fenêtre de sa chambre d'hôtel. Plus tard, il sera sur le toit de la galerie en réfection. L’idée, ou plutôt la vision, se concrétisera d’une manière ou d’une autre. Même s’il faut s’ensevelir complètement sous la neige ou se pencher au bord du vide au Glen Canyon en Utah, les orteils agrippés à la roche comme les serres d’un rapace. Dans le contrat de ce qu’il ne ferait pas, il prend toute la responsabilité des risques " je ne photographierais pas non plus quelqu’un d’autre pour prendre ma place dans les photos. Aucune raison de mettre quelqu’un d’autre que moi dans l’embarras ou en danger. " Il dérogera à ce principe (personne n’est parfait !) à partir des années 2010, photographiant ami.e.s et relations.  

L’idée, ou plutôt la vision, se concrétisera d’une manière ou d’une autre. Même s’il faut s’ensevelir complètement sous la neige ou se pencher au bord du vide au Glen Canyon en Utah, les orteils agrippés à la roche comme les serres d’un rapace. Dans le contrat de ce qu’il ne ferait pas, il prend toute la responsabilité des risques " je ne photographierais pas non plus quelqu’un d’autre pour prendre ma place dans les photos. Aucune raison de mettre quelqu’un d’autre que moi dans l’embarras ou en danger. " Il dérogera à ce principe (personne n’est parfait !) à partir des années 2010, photographiant ami.e.s et relations.  

L’histoire d’un corps

L’œuvre au long cours d’Arno Rafael Minkkinen est aussi le bouleversant témoignage de l’inscription du temps dans le corps du photographe. Nu par principe : "Il n'y aurait pas besoin de vêtements dans un monde intemporel et naturel". L’homme vigoureux, puissant qui se photographie avec son jeune fils, fait place à un corps toujours alerte, mais qui désormais fusionne avec l’écorce des arbres; les cheveux ont blanchis, le visage s’est buriné. Le regard reste intact.

200 saisons de photographies

Arno Raphael Minkkinen a plus de 100 expositions personnelles à son actif, dont 30 dans des musées. De la Chine au Nouveau-Mexique, il poursuit son périple (il s'est photographié dans 30 pays), inlassablement à la recherche de l’émerveillement. Avec quelques chemins de traverse dans les grandes villes de ce monde…

Arno Rafael Minkkinen : Standing with Nature

La Patinoire Royale | Galerie Valérie Bach – 1050 Ixelles

Du 09.12.2022 au 25.02.2023