Augmentation de l’exploitation des mineurs sur internet : il y a "les nouvelles générations de délinquants qui arrivent sur le terrain"

(Image d’illustration, ici en Colombie, où à cause du confinement les pratiques en ligne ont augmenté).

© AFP or licensors

Par RTBF

Avec les confinements successifs, de nombreux jeunes se sont retrouvés isolés, en perte de repères. Et cette vulnérabilité exacerbée a parfois pu faire d’eux des cibles faciles pour les criminels. De nouvelles victimes de l’exploitation de mineurs qui s’est déroulée principalement en ligne. Internet, un nouveau terrain de chasse pour "une nouvelle génération de délinquants", habiles et sachant utiliser les réseaux. Il s’agit de constats posés par la police judiciaire. C’est d’ailleurs ce qu’explique Eric Garbar, responsable du service central Traite et Trafic des êtres humains de la Direction générale de la Police judiciaire.

La crise sanitaire : vecteur d’un changement de pratique

La crise sanitaire a conduit à un changement de pratique chez les délinquants. Les bars, les établissements Horeca et autres lieux où se déroulait la prostitution se sont vus obligés de fermer leurs portes. Ainsi, "de façon générale, a dû se réorganiser et se réinventer", souligne Eric Garbar. Et d’ajouter, "la plupart des activités de prostitution s’est déroulé via des plateformes Internet, puisque forcément, les relations clients prostitué.es n’étaient plus tout à fait possibles de façon classique" ce qui a rendu le travail de la police bien plus complexe.

Les jeunes en manque de contact

C’est l’absence de liens avec le monde extérieur qui a rendu les jeunes plus vulnérables. En effet, face à cet isolement, sans pouvoir avoir de perspectives pendant de long mois, plusieurs jeunes ont souffert de dépression et de "fatigue pandémique".


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Cette situation d’isolement qui a fragilisé les jeunes a été une aubaine pour les prédateurs, "ce qui a ouvert la porte à toute une série de prédateurs qui ont pu, via les réseaux sociaux, qui est devenu le moyen de communication prépondérant pendant toute cette crise, et encore aujourd’hui, détecter des jeunes filles. Ce sont majoritairement des jeunes filles", souligne le responsable.

Ce sont bien souvent des personnalités un peu plus fragiles, qui ont des difficultés familiales

Selon Eric Garbar, en effet, ce sont principalement les jeunes filles qui ont été les cibles de choix de ces prédateurs, "qui sont attirées dans leur giron par des promesses, par des grandes paroles, par l’espoir d’un bel avenir ou d’un bel amour, et qui sont attirées dans le giron d’une personne mal intentionnée et qui, in fine, lorsque la rencontre physique a lieu, sont amenées progressivement, subtilement, à devoir se prostituer dans un cercle privé. Parfois, ça peut même se dérouler de façon contrainte, forcée et de façon très violente".

Des filles parfois très jeunes : entre 15 et 21-22 ans, indique le responsable de police judiciaire. Des victimes souvent déjà fragilisées. Eric Garbar dresse un profil type de ces jeunes victimes : "au niveau des mineurs d’âge, on parle de jeunes filles de 15 ans à 18 ans, mais on peut étendre ça aussi aux jeunes filles qui ont 19, 20 ou 21 ans. Elles ont beau être majeures, j’ai aussi des enfants qui ont plus ou moins cet âge-là, et on sait que, comme dirait mon épouse, ils ne sont pas finis à cet âge-là. On peut donc considérer que la tranche d’âge s’étend de 15 à 21-22 ans. Et ce sont bien souvent des personnalités un peu plus fragiles, qui ont des difficultés familiales, parfois des enfants qui sont placés, des enfants qui sont en décrochage scolaire, qui ont des difficultés à tisser du lien avec des gens. Ce sont donc des personnalités typiques et fragiles".

Des criminels qui s’adaptent

Si le profil des victimes a évolué et le terrain de la criminalité est passé en format 2.0, il faut également dire que le profil des criminels a également su s’adapter à la pandémie.

Ces nouvelles organisations criminelles savent se servir des réseaux sociaux et nouvelles plateformes de communication, bien souvent utilisées par les jeunes. Par ailleurs, les délinquants aussi sont jeunes, parfois même mineurs, évoque Eric Garbar.

"Ce sont des groupes de proxénètes, parfois même très jeunes. Il y a aussi des mineurs d’âge qui se lancent, qui se sont manifestement découvert une carrière de proxénète. Ce sont les nouvelles générations de délinquants qui arrivent sur le terrain et qui sont très habiles et utilisent très facilement les nouvelles technologies pour organiser et structurer leurs activités de façon à pouvoir échapper aux contrôles classiques des services de police", explique-t-il.

Comment reconnaître les signes ?

Dans cette situation, difficile pour les parents de comprendre que quelque chose ne va pas. En effet, les adolescents ou les jeunes adultes ne laissent pas nécessairement les parents s’approcher de leurs applications.

Ce sont des donc des petits changements de comportement qu’il convient de remarquer. "L’important est de détecter ces changements de comportement, des fugues à répétition qui n’avaient peut-être pas lieu avant, ces filles sont au départ souvent arrosées de cadeaux, des changements dans la tenue vestimentaire, des changements dans l’apparition de bijoux", précise le responsable. Même si à ce moment-là, c’est déjà un peu tard, la victime est déjà "été attirée dans le giron de son futur exploitant, qui l’a déjà mise en condition pour qu’elle dise oui à tout ce qui lui demandera par la suite".

Archives JT du 21/03/2019: Prostitution des mineures

Prostitution des mineures : de nombreux dossiers

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