Améliorer la prise en charge des "survivantes"
Pour faire changer les choses, les militantes féministes ont de nombreuses revendications en matière d’éducation à court et moyen terme, mais aussi dans la prise en charge des victimes, qu’elles préfèrent appeler les survivantes au regard du traumatisme qu’elles ont vécu.
En Belgique aujourd’hui, il existe cinq centres de prise en charge des violences sexuelles (CPVS). À Bruxelles, Liège, Charleroi, Anvers et Gand, ce sont des centres pluridisciplinaires qui accueillent les victimes de viols ou d’agressions sexuelles et qui leur garantissent un soutien médical, psychologique, mais aussi juridique et policier. Le gouvernement fédéral a annoncé que six autres centres de ce type vont être créés. Pour Laura, c’est une bonne nouvelle bien sûr, mais il faut aller plus loin encore !
"Si aujourd’hui les chiffres ont l’air si faible par rapport aux agressions, que ce soit les violences conjugales, les agressions sexuelles ou les violences machistes globalement, c’est parce qu’en fait on ne va pas porter plainte, regrette Laura. Parce qu’on n’ose pas et surtout parce qu’on n’y croit plus".
Il est temps que la peur change de camp
"Quand on voit le nombre de plaintes et les non-lieux qui en ressortent, en fait on n’a pas confiance en la justice. On se dit que notre histoire va être étouffée… Pourquoi souffrir en racontant 10 fois mon histoire pour qu’on me dise au final : ha mais non, sans doute que vous aviez une jupe trop courte ! Il faut rappeler que les violences sexuelles sont un crime et que c’est puni par la loi. Tant que la justice ne fera pas correctement son travail pour appliquer cette loi, les agresseurs continueront en toute impunité puisqu’ils n’ont pas peur… Et il est temps que la peur change de camp !", ajoute-t-elle.
Sensibilisation des bourgmestres
Aujourd’hui, les deux bars incriminés par les premières plaintes à Ixelles sont toujours ouverts, même si les militantes ont tenté de les faire fermer, avec l’appui du bourgmestre d’Ixelles, Christos Doulkeridis.
Il faut dire que l’enquête n’a pas beaucoup avancé. Une information judiciaire a été ouverte, et un suspect aurait été entendu par la police, mais personne n’a encore été inculpé et le parquet de Bruxelles se refuse à tout commentaire.
Les militantes, elles, ne baissent pas les bras, elles se sont d’abord rassemblées au sein de l’Union Féministe Inclusive Autogérée, l’UFIA, parce qu’elles ne veulent pas se laisser diviser. Une association dont Laura fait désormais partie et qui a pris contact avec tous les bourgmestres des communes bruxelloises.
"Tous les bourgmestres n’ont pas encore répondu, loin de là, regrette la jeune femme. Certains ont envoyé des échevines ou échevins de l’égalité des chances, mais il y a encore beaucoup de communes où on n’a toujours pas de réponse. Ceci dit, avec ceux et celles qu’on a pu rencontrer, on est quand même en train d’entamer des modifications et des choses intéressantes qui peuvent être mises en place. Ça va peut-être inspirer les autres", espère Laura.
Message aux hommes
Les militantes veulent aussi que les choses bougent pour la responsabilisation des tenanciers. Pour elles, il est inconcevable que des patrons ne soient pas au courant de ce qui se passe dans leurs bars ou leurs cafés. Elles restent donc vigilantes, et espèrent aussi ne pas mener ces combats seules. Laura lance d’ailleurs un appel aux hommes :
"Il est temps que vous aussi vous soyez fatigués, et que ce ne soit pas juste nous à être en train de crier dans la rue. Quand vous êtes témoin, vous êtes complice. Il est temps que les hommes prennent part au combat, parce que le féminisme existe depuis très longtemps. On a toujours l’impression que c’est un truc par et pour les femmes et les minorités de genre, et pourtant non. Il est temps qu’on ait des alliés actifs. Vous avez des privilèges, il est temps de les déconstruire pour qu’on ait tous et toutes les mêmes privilèges".
Voilà peut-être quelques bonnes résolutions pour entamer l’année 2022.