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Batibouw : ces entreprises belges qui tentent de réduire l’empreinte carbone du secteur de la construction

© Getty Images

Par la production des matériaux, leur transport ainsi qu’avec les déchets issus de la construction et de la démolition, le secteur de la construction continue d’avoir un impact important sur l’environnement. Pour tenter de réduire cette empreinte carbone, plusieurs entreprises belges redoublent d’imagination pour innover et trouver des alternatives !

Produire des blocs de béton sans ciment, c’est ce que propose la société Orbix. Implantée à Châtelet et Farciennes, cette PME valorise des déchets métalliques provenant de la fabrique d’acier inoxydable Aperam grâce à une technique innovante basée sur la carbonatation.

Une solution bonne pour l’environnement, comme l’explique Laurent Verfaillie, Directeur du site d’Orbix, à Télésambre. " En valorisant les laitiers (résidus de la production d’inox) de notre voisin sidérurgiste, nous évitons au maximum la mise en décharge de ses résidus de production. Notre procédé permet d’extraire le métal toujours présent dans le laitier d’une part, le granulat et le sable d’autre part. "

Si le métal est directement réinjecté́ dans le cycle de production d’Aperam, la fraction minérale restante est traitée et travaillée pour produire des blocs, des pavés, des briques de façades et potentiellement tout autre élément préfabriqué répondant aux mêmes caractéristiques et normes que les produits en béton traditionnels.

Ici, l’élément liant qui va remplacer le ciment, c’est… le CO2. " Les blocs ont la particularité de capter jusqu’à 100kg de CO2 par tonne de blocs produits ", explique Baptiste Cowez, directeur technique chez Orbix. " On a un projet en région liégeoise où l’idée consiste à aller chercher le CO2 directement à la source d’une unité émettrice, de la transférer avec un pipeline sur deux kilomètres et de directement utiliser le CO2 dans les blocs. "

Orbix s’est donné un objectif européen pour 2035 : arriver à séquestrer par la carbonatation 350.000 tonnes de CO2 par an.

Une alternative au ciment

Car ce n’est plus un secret, la construction est un secteur particulièrement important dans la part d’émissions de CO2. Et la composition du béton, et plus spécifiquement le ciment, n’y est pas étrangère. Celui-ci a une empreinte carbone élevée. La cause du caractère si polluant du ciment est son processus de fabrication extrêmement énergivore, puisque la matière première (du calcaire et de l’argile) est chauffée à des températures avoisinant les 1.450 degrés. Cette cuisson, ou " clinkérisation ", est responsable de 4 à 7% des émissions de gaz à effet de serre dans le monde.

En Belgique, le secteur a déployé des efforts pour réduire cette empreinte carbone importante. Selon le dernier rapport annuel de Febelcem, la fédération de l’industrie cimentière belge, les émissions à la fabrication du ciment ont été réduites de 30% depuis 1990, le tout en vue d’arriver à la neutralité carbone d’ici 2050.

Chez Holcim Belgium, cette ambition se matérialise dans le plan GO4ZERO. Si le ciment belge a déjà drastiquement réduit ses émissions de CO2, la filiale veut atteindre le " 0 " très prochainement, comme l’explique le directeur du programme à Canal Zoom. " Le but est de remplacer l’outil existant par un tout nouvel outil, une toute nouvelle technologie, avec l’ambition à terme de pouvoir capturer le CO2, le purifier et le séquestrer ".

En vue de s’inscrire dans plus de durabilité, l’entreprise se réorganise en vue d’une meilleure gestion de l’eau en circuit fermé, d’un changement de sa flotte de camions pour la rendre moins polluante ou encore d’une modernisation de ses infrastructures.

>> Le reportage complet de Canal Zoom : " Par nature, le béton est totalement recyclable "

Recycler les déchets

En parallèle, le parc immobilier belge ne fait que se développer depuis des années. Au 1er janvier 2021, la Belgique comptait 4.590.838 bâtiments, soit une augmentation de 15% depuis 1995. Sur la même période, le nombre de logements a progressé de 27% pour atteindre 5.631.637 unités, comme l’indique le dernier recensement de Statbel. Si l’on ajoute les bâtiments démolis, le secteur de la construction et de la démolition est responsable de 35% de la production de déchets en Belgique. Le secteur de la construction belge produirait à lui seul plus de 15 millions de tonnes de déchets par an, dont 650.000 tonnes rien qu’à Bruxelles.

Sur le site de recyclage de Recynam, en région namuroise, une partie de ces déchets sont recyclés par la société Federeco (Fédération des Recycleurs de Déchets de construction) afin de leur donner une seconde vie. Du béton, des briques, des tuiles mais aussi des déchets routiers comme du tarmac, de l’asphalte… ces différents déchets inertes – qui ne subissent modification physique, chimique ou biologique – sont triés afin de produire du granulat recyclé.

" On va leur faire subir un process qu’on appelle ‘pré-scalpage – concassage – criblage’", explique plus en détail Thibaut Mariage, directeur de l’ASBL Federeco, auprès de Boukè. " Le principe, c’est de réduire la dimension granulométrique de ces déchets pour en faire un produit qui correspond aux normes européennes. Les granulats vont servir la plupart du temps dans les fondations et sous-fondations mais on peut aller beaucoup plus loin vu la qualité élevée des matériaux, en fabriquant par exemple du nouveau béton ou pour des applications un peu plus " exotiques " comme des toitures vertes. "

En plus de proposer ce recyclage, l’ASBL met en avant le côté local de l’initiative. " Les matériaux qui sont ici viennent d’un rayon de 20 kilomètres et sont également utilisés dans un rayon de 20 kilomètres. Ça permet d’éviter des transports inutiles de camions provenant de différentes carrières situées en Wallonie. Donc, on réduit encore l’impact environnemental de la filière de l’utilisation de ces granulats. "

>> Retrouver le sujet complet de Boukè : " Une économie circulaire pour les déchets routiers et de construction "

Une économie circulaire pour les déchets routiers et de construction

Récupération avant démolition

Mais pourquoi détruire quand on peut réutiliser ? Dans le secteur de la construction, 1% seulement des éléments est aujourd’hui remis en circulation intacte suite à leur premier usage. Spécialisée dans la récupération et la restauration d’éléments de construction, Rotor DC est une coopérative bruxelloise qui s’est donné la mission de sauver le design de la démolition.

" Notre objectif est de donner une seconde vie aux matériaux avant la démolition ou la rénovation des bâtiments ", explique Lionnel Billiet, cofondateur du projet. " Rotor DC est donc un projet qui vise à limiter l’impact environnemental du secteur, tout en offrant à de nouveaux projets la possibilité d’obtenir un petit supplément d’âme. "

Parmi les différents objets récupérés, la coopérative vise notamment des matériaux de finition (portes, luminaires, carrelage, quincaillerie, mobilier, etc.) issus de grands bâtiments modernes et contemporains.

Chaque année, Rotor DC permet ainsi d’éviter des centaines de tonnes de déchets, souvent à valeur culturelle. Une activité qui a d’ailleurs été récompensée en 2016 d’un prix Henry Van de Velde, pour son influence positive sur la société et l’économie.

>> À découvrir aussi : BX1 " Autrement : pourquoi détruire quand on peut réutiliser ? "

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Récupérer des matériaux et des équipements de construction et les vendre à un prix abordable, c’est également la mission que s’est donnée le tout nouveau projet de l’asbl la Ressourcerie le carré avec sa " matériauthèque ". Situé le long du quai Donat Casterman à Tournai, son magasin vient d’ouvrir ses portes. En plus de proposer une alternative abordable pour des matériaux dont les prix n’ont cessé d’augmenter, cette initiative permet de limiter le gaspillage, comme le précise Mathias Lefebvre, coordinateur de la matériauthèque, auprès de Notélé.

" Il y a toujours pleins de choses qui restent chez les gens et qui sont gaspillées. Il y a souvent des surcommandes par rapport au chantier initial, des matériaux qui restent et dont on ne sait plus trop quoi faire. L’idée, c’est donc de pouvoir organiser une centralisation de tous ces matériaux-là. "

Tournai : la matériauthèque vend à des prix abordables des matériaux et des équipements de construction de récupération

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