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Baxter Dury : sur les traces de son père avec ce nouvel album sous forme de confession

Baxter Dury se raconte en musique sur un album confession.

© Heavenly Records

Par Nicolas Alsteen via

Portée par des chants féminins envoûtants, la voix de Baxter Dury remonte le cours de sa propre histoire. Entre confessions intimes, histoires de famille hors-normes et poésie urbaine, le dandy publie son album le plus personnel. Influencé par le hip-hop, bercé par ses propres désillusions, le chanteur ouvre son cœur et s'affirme tel qu'il est vraiment. Ultra touchant.

Le septième album studio de Baxter Dury s'ouvre sur une question existentielle : "Hey Mummy, Hey Daddy, Who am I ?" Voilà les premiers mots posés à l'entame de "So Much Money", morceau d'introduction d'un disque rêveur, mais aussi extrêmement troublant. À 51 ans, toujours pimpant et mojo intact, le plus dandy des chanteurs britanniques met sa vie en musique…

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Le daron de la drogue

Sorte de journal intime chanté en plein air, "I Thought I Was Better Than You" s'écoute comme le prolongement sonore de "Chaise Longue" (aucun lien avec Wet Leg), un roman autobiographique sorti, en anglais, au beau milieu du confinement. Dans ce livre, Baxter Dury retrace son parcours, partage ses souvenirs, son histoire familiale. Il revient sur des anecdotes cocasses, sur la place occupée par son père, Ian Dury, à qui le rock doit à jamais l'expression consacrée "Sex & Drugs & Rock & Roll". À l'époque, en 1977, le petit Baxter pose fièrement sur la pochette du disque le plus célèbre de son papa. Cette fierté d'alors est aussi à l'origine de ses fêlures du jour, aux prémices de ses ruptures... Éduqué en marge du système scolaire, entre salles de concert et de répétition, Baxter Dury a grandi dans les coulisses de l'industrie musicale, au plus près de ses excès, de ses vices et des bonheurs partagés avec le public.

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Au nom du père et du fils

"I Thought I Was Better Than You" est une déclaration d'intention, un aveu et un message à l'attention du père, fracassé par le destin au printemps 2000, à l'âge de 57 ans. Jusqu'alors, le fiston s'était bien tenu à l'écart de la chanson. D'abord propriétaire d'une boîte de nuit foireuse, puis vendeur de montres, Baxter Dury s'est ensuite exilé à Barcelone, avant de revenir à Londres. Assistant réalisateur, "payé à ne rien faire" (sic), sur les plateaux des films dans lesquels jouait son père, il entame finalement une carrière musicale sur la tard, à 31 ans, deux ans après la disparition de Ian Dury. Aujourd'hui, Baxter assume. Aussi à l'aise dans son rôle de chanteur que dans celui de papa. Kosmo, son fils, chante ainsi à ses côtés sur un titre ("Celebrate Me"). Sorte de passage de relais, empreint de mélancolie et de sagesse, "I Thought I Was Better Than You" est une confession personnelle doublée d'un conseil de daron.

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Girl power !

Ce nouvel album est une plongée dans un bordel organisé, un chaos intérieur étrangement maîtrisé, une vie sur le fil, mais jamais décousue. Toujours là – et bien là ! –, Baxter Dury est ici le narrateur de son propre récit. Entre chant sous Lexomil et spoken word dopé à l'accent cockney, sa voix s'appuie, plus que jamais, sur de précieux soutiens féminins. Partenaire privilégiée depuis une dizaine d'années, Madeline Hart assure comme toujours sa part du taf avec, en prime, un morceau entièrement chanté par ses soins ("Sincere"). Dans "Aylesbury Boy", Baxter revient sur les traces de son enfance au bras de JGrrey, nouvelle sensation R&B made in UK. Déjà aperçue en concert aux côtés de Billie Eilish, celle-ci dévoile une voix sublime, quelque part entre Cleo Sol et Jorja Smith. Elle intervient également sur deux autres morceaux ("Pale White Nissan" et "Leon"). Sur "Shadow", c'est l'excellente Eska Mtungwazi qui offre un nouveau dialogue paritaire à Baxter. Un peu comme Leonard Cohen en son temps, l'Anglais met sa voix grave entre de bonnes mains.

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Kendrick, l'amour

Baxter Dury avoue être tombé sous le charme de Kendrick Lamar pendant le confinement. Le moins que l'on puisse dire, c'est que ça s'entend. Produit par Paul White (Danny Brown, Sudan Archives, Open Mike Eagle), "I Thought I Was Better Than You" embrasse le hip-hop à sa manière. Ainsi, dans "Celebrate Me", une voix féminine sous hélium nous promène dans un espace-temps incertain, une version sped up de la réalité. Véritable point de repère, le flow de Baxter vient alors, à intervalles réguliers, nous rappeler que le monde tourne à la bonne vitesse. Que tout va bien. Pilier de la working class anglaise, Baxter Dury est, à l'instar de Sleaford Mods, une voix du peuple, mais aussi un rappeur par défaut. Avec ce nouvel album, il affirme surtout son pedigree. Un vrai fils de punk.

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