Le Western, un genre apparemment éculé que la BD ne cesse pourtant de revisiter. Plus encore que le cinéma, qui l’a vu naître et bien plus que le roman, où il a retrouvé ses lettres de noblesse ces dernières années, c’est en BD que le western affiche la santé la plus insolente. Pour cette rentrée d’hiver, il se fait féminin sous la plume d’Olivier Bocquet et le dessin d’Anlor, dans ''Ladies with guns'', une nouvelle série chez Dargaud. Mais on le retrouve aussi très coloré dans ''Marshall Bass'', septième volume des aventures de celui qui fut le premier marshal noir de l’histoire des Etats-Unis.
Bass a véritablement existé. Entré dans la légende, il est devenu un personnage de BD très éloigné de la vérité historique, que ce soit comme personnage secondaire dans l’un des derniers Lucky Luke écrit par le scénariste Jul ou comme personnage principal dans cette série que l’on doit à deux auteurs croates et qui s’avère à la fois violente, iconoclaste et souvent un brin amorale.
Ce qui caractérise cette série ? D’abord, le dessin d’Igor Kordey, qui joue avec les codes de la caricature et travaille ses personnages dans un style très influencé par le comics. Là où beaucoup d’auteurs français restent influencés par les maîtres franco-belges du genre - Jijé et surtout Giraud en tête -, ''Marshal Bass'' se distingue par un côté crépusculaire cinématographique, parfois presque expressionniste. Mais c’est surtout l’approche décomplexée du scénariste, Darko Macan, qui distingue cette série des autres westerns. Plutôt que de porter aux nues le tout premier marshal noir des États-Unis en faisant de lui une figure héroïque et archétypale, le scénariste ne cesse de brouiller les pistes. Son héros apparaît comme un coureur de jupons invétéré, doté d’une morale étonnamment élastique. Le résultat est souvent sulfureux. Et d’albums en albums, on se demande jusqu’où le scénariste osera aller.