L'odyssée

Belgian Music Week : Alice Sinacori

Alice Sinacori, violoniste et altiste belge

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À l’occasion de la Belgian Music Week, organisée par la RTBF, Cécile Poss consacre sa chronique La Pensée du jour à 10h30 dans L’Odyssée à la Belgian Music Week en demandant à cinq musiciens de Fédération Wallonie-Bruxelles "établis" de nous faire découvrir cinq jeunes talents du monde classique de la Fédération Wallonie-Bruxelles.

Le clarinettiste Ronald Van Spaendonck a décidé de nous faire découvrir une violoniste et altiste, la jeune Alice Sinacori.

Alice a beaucoup de qualités. Elle réussit tout ce qu’elle entreprend. Dès qu’elle fait une audition d’orchestres, elle est sélectionnée. […] C’est une artiste jusqu’au bout des ongles, elle est pétillante, très sensible, des valeurs essentielles pour le jeu du musicien.

Ronald Van Spaendonck

Alice Sinacori a réalisé un enregistrement spécialement à l’occasion de cette chronique. Elle nous propose Le roi des aulnes de Schubert, interprété en double piste au violon et à l’alto.

D’origine belgo-italienne, Alice Sinacori a commencé le violon à l’âge de 9 ans avec Élisabeth Wyboux, tout simplement dans le cadre d’activités parascolaires à l’école. "C’était fabuleux !" nous explique Alice, "Elisabeth était très douce mais aussi très exigeante ! Après deux ans, quand elle est tombée enceinte, elle m’a présentée à son professeur de violon, Véronique Bogaerts et j’ai poursuivi ma découverte avec elle. Madame Bogaerts occupe une place très spéciale dans mon cœur, elle restera pour toujours ma maman de violon !"

À l’âge de treize ans, Alice Sinacori je suis rentrée au Conservatoire Royal de Bruxelles dans sa classe en tant que jeune talent, un programme qui permet de continuer à faire des études tout en mettant déjà un pied dans le milieu professionnel.

Ensuite, à l’âge de 16 ans, Alice ressent le besoin de prendre son envol et elle décide d’aller étudier aux Pays-Bas avec Igor et Vesna Gruppman, qui sont encore ses professeurs actuellement.

"Pendant une année entière je me suis entièrement consacrée à la technique pure et dure… C’était bouleversant et tellement formateur !" explique Alice. "J’ai choisi le conservatoire de Rotterdam pour mes professeurs mais aussi pour l’ouverture d’esprit, l’éclectisme des étudiants, des projets et des sections (pop, musique du monde, jazz…). J’y étudie encore actuellement car je me nourris beaucoup de toutes les rencontres et les expériences musicales variées que cela m’offre. Ce cursus m’a donné la chance de suivre des cours d’improvisation et d’être concertmeister de l’orchestre pop et de l’orchestre symphonique et j’adore !"

Alice Sinacori, violoniste et altiste belge

Alice Sinacori a découvert l’alto il y a un an, seulement, lors d’un concert de musique de chambre au festival de Seneffe (organisé par l’ensemble Kheops) et une des pièces au programme était le trio de Debussy pour alto, flûte et harpe. "J’ai été complètement subjuguée par ce concert et cela a complètement changé ma vie ! Lise Berthaud était à l’alto et cela a été une révélation ! Ce jour-là je l’ai décidé, je jouerai de l’alto… en plus du violon. J’aime tout de l’alto : le son, le répertoire, le rôle en musique de chambre… J’ai donc voulu l’intégrer à mon parcours pédagogique et ai choisi de suivre Leo de Neve au conservatoire d’Anvers. Grâce à la fondation Arthur Grumiaux, j’ai la chance de pouvoir jouer pendant quelques mois sur l’instrument du grand maître, ceci n’est pas sans éveiller une réelle émotion… Mon quotidien est donc rythmé par mon travail instrumental doublement intense avec le violon et l’alto, mes nombreux déplacements entre Rotterdam, Anvers et ma famille… Bref, je ne m’ennuie jamais…", conclut la jeune violoniste et altiste.

Alice Sinacori se dit surprise mais aussi heureuse de cette mise en avant par Ronald Van Spaendonck : "Pour être complètement honnête, une partie de moi est très excitée car c’est amusant – merci Ronald Van Spaendonck que j’apprécie tellement ! C’est un musicien fabuleux et tellement attentif aux autres ! – mais en même temps, il y a une petite partie de moi qui pense que quelqu’un d’autre aurait pu être à ma place… Je me réjouis en tout cas de cette belle opportunité et me rassure en pensant que cela est certainement le propre du musicien de vivre avec des doutes et de se poser beaucoup de questions…"

Nous avons également demandé à Alice Sinacori ce qu’était la vie d’une jeune musicienne en pleine pandémie de coronavirus.

"C’est compliqué…" nous dit Alice Sinacori, "c’est une période interminable aux multiples rebondissements d’ordre émotionnels. Le premier stade, c’était en mars dernier. Le choc d’abord et puis le réveil, chaque matin quand on se pince en espérant que ce ne soit qu’un horrible cauchemar. La réalité nous rattrape au galop… alors on se jette dans le travail sans savoir exactement pourquoi car nos projets sont tous annulés ou organisés on-line… L’orchestre des jeunes d’Europe (EUYO) on line vous imaginez ? On a même enregistré l’hymne à la joie en distanciel ! Et puis, on se rassure en se disant que cela ne durera pas."

"Le deuxième stade est celui où on se rend compte que cette pandémie se prolonge plus longtemps que prévu et que notre manière " traditionnelle " de fonctionner en tant que musicien va devoir changer… Inévitablement. Alors, on met en place des projets, des activités nouvelles, on se fixe des objectifs de travail pour entretenir la motivation et pour garder active cette petite flamme qui nous anime d’ordinaire. On essaie aussi de trouver des alternatives "corona-proof" pour des concerts, pour garder un lien avec le public, avec nos professeurs, avec nos amis, avec nos collègues de musique de chambre, avec tout le monde en fait…

Arrive ensuite le troisième stade, celui où on se rend compte que non seulement cette pandémie dure plus longtemps que prévu mais on a la redoutable impression qu’elle ne terminera jamais. A-t-on un autre choix que d’accepter la situation ? Et puis aussi trouver des solutions plus durables, des alternatives pas seulement sur le court terme mais sûrement sur un plus long terme, dont on ignore quelle sera la longueur. Ce qui m’exaspère le plus ce sont les cours en ligne, et ce qui me manque le plus ce sont les concerts annulés, les salles de concert fermées, plus de rencontres, plus de musique de chambre, plus de voyages… et surtout plus de perspective d’avenir. Où va-t-on ? Vais-je pouvoir rejouer devant un public un jour ? Est-ce encore raisonnable de rêver ? de se projeter ? J’en profite pour remercier du fond du cœur les concours ou certains orchestres qui continuent à organiser des auditions, à proposer des concerts même en ligne. Ça a été le cas du concours international Barshai auquel j’ai participé récemment, et cela m’a sacrément motivée !

Maintenant, sur une note un peu plus positive, même si cette pandémie m’a beaucoup affectée en tant qu’étudiante, elle m’a permis de me rapprocher énormément de ma famille, moi qui ne vivais plus avec eux depuis trois ans. En effet, le fait de revenir chez papa et maman nous a encore plus rapprochés et on a vécu des moments en famille absolument inoubliables.

Et puis, je me suis découvert des hobbys : je suis devenue une yoga addict, je me suis remise à lire… beaucoup, à dessiner aussi et surtout à cuisiner, cela pourra servir quand je rassemblerai mes amis après le confinement…"

Avec un avenir plus radieux en ligne de mire, Alice Sinacori aspire à "voyager, rencontrer, partager et surtout jouer, avec un seul dénominateur commun, la musique !" Et c’est tout ce que nous lui souhaitons.

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