Bisous, câlins et retrait du masque : les grands-parents vaccinés peuvent-ils abandonner les gestes barrière ?

Familles / Grands-parents vaccinés quelles libertés ?

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À ce jour, 6,2% des Belges âgés de 18 ans et plus ont reçu leurs deux doses de vaccin nécessaires afin d’être protégé des formes graves de la maladie. Ce taux qui s’accroît un peu plus à mesure que le calendrier avance et donne espoir à des nombreux grands-parents de retrouver les embrassades avec leurs petits enfants dans un futur proche. Mais être vacciné signifie-t-il pouvoir à nouveau reprendre sa vie comme si l’épidémie de Covid-19 n’avait jamais existé dans des retrouvailles dignes de la chanson "Place des grands hommes" de Patrick Bruel ? Pas tout à fait. Deux conditions sont encore à prendre en compte malgré les deux doses administrées : l’évolution de la maladie et les règles en vigueur dans notre pays

Sur le site info-coronavirus.be du SPF Santé Publique, qui regroupe les réponses à des nombreuses questions au sujet du virus comme des vaccins, la réponse est formelle et devrait en décevoir plus d’un : "Même les personnes entièrement vaccinées doivent continuer à respecter les mesures." Exit donc, selon les recommandations, les dîners de retrouvailles entre grands-parents vaccinés bras dessus, bras dessous avec le reste de la famille.


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Pas de risque zéro

"Comme d’autres vaccins, le vaccin Covid-19 n’offre pas une protection à 100%, même après deux doses", précise-t-on aussi dans la liste de questions. Pour les vaccins Pfizer, Moderna et AstraZeneca qui sont les seuls actuellement disponibles en Belgique, l’efficacité optimale nécessite l’administration de deux doses. Ensuite une période d’attente est nécessaire à l’apparition des anticorps qui surviennent grâce à la réaction de nos cellules immunitaires face au vaccin.

La protection est maximale au moins deux semaines après la deuxième dose, avant cela, vous êtes exposé comme si vous n’aviez pas reçu le vaccin. "Cela signifie bel et bien qu’entre les deux doses, on peut être en incubation et développer des symptômes", ajoute Leïla Belkhir, infectiologue aux Cliniques universitaires Saint-Luc au micro de Vivacité.


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En plus de cela, si être vacciné garantit presque entièrement d’être protégé contre les formes les plus graves du coronavirus, celles qui contribuent à engorger les services de soins intensifs de notre pays, il n’y a pas de risque zéro. L’efficacité de la protection offerte est donc importante mais pas infaillible, comme le confirme l’infectiologue : "On peut malgré tout avoir un résultat positif au test PCR même si on est vacciné."

Le risque d’infection réduit

En Belgique, les vaccins Pfizer et Moderna sont ceux qui présentent la plus grande efficacité avec respectivement 95% et 94,1%. Le vaccin AstraZeneca a quant été annoncé avec une efficacité de 60% selon la première étude de phase III mais une étude a réhaussé cette estimation à 76% fin mars. Enfin, le vaccin à dose unique de Johnson & Johnson qui devrait compléter l’arsenal belge d’ici la mi-avril est quant à lui efficace à 66% "en général" mais son efficacité grimpe à 85% contre les formes graves de la maladie.

Pour être autorisés par l’Agence européenne du médicament, les vaccins doivent être crédités d’une efficacité de 50% minimum. À titre de comparaison, le vaccin contre la grippe, renouvelé chaque année, est quant à lui efficace à 60% en moyenne, note l’OMS.


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Concrètement, tous ces pourcentages sont la réduction du risque de développer une forme symptomatique de la maladie. En d’autres termes, même si vous vous êtes fait administrer les deux doses nécessaires pour le vaccin Pfizer, il reste 5% de chances que vous contractiez une forme symptomatique du Covid-19. Néanmoins, être vacciné est bien entendu un facteur positif pour permettre aux plus âgés des Belges de reprendre une vie plus active et d’être en contact avec d’autres personnes de façon plus sûre.

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Les vaccinés asymptomatiques

"Vous devez continuer à suivre les règles Corona en vigueur, à la fois pour votre propre sécurité et pour celle des autres", lit-on sur le site de SPF Santé Publique. Car si les infections symptomatiques sont largement freinées par le vaccin, rien n’empêche en revanche un vacciné de contracter une forme asymptomatique du coronavirus. Toutefois, Leïla Belkhir précise que "de plus en plus de données montrent que si on est vacciné, on a beaucoup moins de chance d’être porteur asymptomatique". Si cela est encourageant, elle recommande de maintenir la distance physique et la prudence "car le nombre de personnes vaccinées n’est pas assez élevé".


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"La question de savoir si une personne vaccinée est moins susceptible d’infecter d’autres personnes fait toujours l’objet de recherches supplémentaires", est-il précisé sur le site info-coronavirus. Sur la base d’expériences menées sur des singes, la vaccination semble avoir une influence sur le nombre de jours pendant lesquels une personne est contagieuse. En outre, en influant sur les symptômes tels que les éternuements et la toux, elle aura également un effet sur la transmission." L’apport des vaccins comme frein de l’épidémie est donc indéniable mais des incertitudes subsistent. C’est pourquoi les autorités sanitaires belges comme les experts préconisent le maintien des gestes barrière.

Pourrait-on quand même imaginer des réunions entre personnes âgées ou du personnel des soins de santé vaccinés sans respect de la sécurité imposée par la pandémie ? "Entre personnes […] vaccinées, on pourrait dire qu’il est possible d’enlever le masque. Mais ces personnes ne sont jamais totalement isolées, elles voient d’autres personnes non vaccinées, vont faire leurs courses, etc. C’est pour les autres plutôt que pour elles-mêmes qu’elles doivent continuer de respecter les gestes barrière", tempère Pascal Crépey, épidémiologiste à l’Ecole des hautes études en santé publique à Rennes, interrogé par l’Obs.

L’importance de la transmission dans l’apparition de variants

De plus, freiner la transmission réduit les potentielles mutations du virus. Lorsqu’il se transmet, le SARS-CoV-2 mute pour survivre et être plus "performant". "Ce genre de mutation est assez connue pour tous les virus, surtout ceux qui ont tendance à muter comme le virus de la grippe qui peut se transmettre plus rapidement en fin d’épidémie", avait d’ailleurs précisé le virologue et ancien recteur de l’ULiège Bernard Rentier lors de l’apparition du désormais célèbre variant britannique.

Les variants présentent des caractéristiques différentes du coronavirus observé lors des premières analyses de la maladie. À chaque nouvelle forme du virus revient alors la même question : les variants menacent-ils l’efficacité du vaccin ? Potentiellement, répond le virologue liégeois.


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C’est pour cette raison que les laboratoires qui ont développé les doses livrées en grand nombre dans de nombreux pays analysent au jour le jour ces nouvelles formes du virus. Jusqu’à présent, Pfizer a toujours assuré que son traitement n’était pas menacé par les variants connus. Même chose pour Moderna. L’université d’Oxford qui a participé développement du vaccin AstraZeneca a de son côté annoncé qu’il présente une "efficacité modérée" pour combattre le variant sud-africain.

Ces formes variables du virus sont aussi potentiellement plus menaçantes pour les catégories d’âge inférieures à 65 ans. On constate par exemple que depuis février-mars, l’âge moyen des patients admis aux soins intensifs a été réduit de 11 ans. Le centre de crise estime que ce changement peut être dû à la vaccination, d’une part, mais aussi à l’agressivité potentiellement accrue du variant britannique.

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Des règles peu favorables aux contacts rapprochés

En dehors de votre foyer, la règle édictée par les autorités de Belgique impose de se limiter à un seul contact rapproché. Bien que ciblée par de nombreuses critiques et remise en question par Jean-Marc Nollet, le coprésident Ecolo, qui confiait fin février ne pas respecter cette règle, elle n’a jamais été élargie depuis octobre.


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À l’extérieur, des rassemblements de quatre personnes maximum sont autorisés mais en respectant les mesures de distanciation sociale et le port du masque. Toutes ces règles concernent la population belge dans son intégralité, avoir reçu ses deux doses de vaccin n’est donc pas une condition qui permet de passer à côté.

Concernant les sanctions en cas de non-respect de ces règles, il s’agit d’amendes dont le montant varie que vous soyez invité ou à l’origine d’un rassemblement qui dépasserait les quotas imposés. Une personne qui commet une infraction risque de recevoir une amende de 250 euros contre 750 euros s’il s’agit d’un "opérateur".

Quelles perspectives ?

Mais alors si ni le taux de vaccination, ni les règles ne nous permettent d'entrevoir le bout du tunnel qui nous empêche de tous se prendre les bras dans un câlin collectif, quel espoir nous reste-t-il ? Selon la task force vaccination, l'objectif des autorités d'atteindre 70% de la population vaccinée pourrait être atteint en septembre. Ce taux correspond au seuil nécessaire pour garantir un taux de reproduction du virus inférieur à 1. C'est-à-dire la potentialité pour une personne vaccinée de contaminer au plus une seule personne.


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Concernant les assouplissement à prévoir sur les règles, la prochaine échéance est fixée au moins de mai. Les autorités belges estiment qu'à cette période "le taux de vaccination des personnes les plus à risque sera suffisant". Si le Comité de concertation s'en tient à son calendrier prévisionnel dévoilé à la population début mars, la vis pourra être desserrée pour les activités intérieures telles que l’Horeca, le commerce, les sports, la culture, l’événementiel etc. Et la bulle de contact à l'intérieur pourrait bien venir allonger cette liste.

"Je pense qu'il faut être encore un tout petit peu patient de quelques semaines voir quelques mois pour avoir ces contacts affectifs rapprochés", confirme épidémiologiste et professeur de santé publique à l’ULB. Toutefois, cela n'empêche pas de revoir ses enfants et petit enfants, selon lui. "Mais de façon un peu plus contrôlée que dans la vie antérieure, prévient-il. C'est-à-dire en appliquant la distance de sécurité et éventuellement le masque et le plus possible lors d'activités à l'extérieur."

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