"C’était une catastrophe annoncée. En laissant autant de gens dans un espace aussi restreint, avec une topographie aussi risquée, quelque chose devait se passer." Journaliste et historien israélien, Marius Schattner connaît bien le monde ultra-orthodoxe juif : il a consacré un ouvrage aux relations compliquées entre laïcs et religieux en Israël (1).
La bousculade qui a provoqué la mort de dizaines de personnes lors d’un pèlerinage pose beaucoup de questions, même si l’heure aujourd’hui en Israël est d’abord au deuil.
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Le drame a eu lieu durant la fête juive de Lag Baomer, qui est l’occasion d’un grand pèlerinage au mont Méron, dans le nord d’Israël. "C’est le pèlerinage le plus important en Israël, et auparavant en Palestine. Il se déroule, depuis plusieurs siècles, raconte l’historien. Il célèbre la fin d’une épidémie de peste dans l’antiquité. Et c’est le lieu de la tombe de Rabi Bar Yochaï, un des grands rabbins de l’époque romaine, un grand mystique."
Première grande foule autorisée
"C’est une fête, ça se passe dans la joie en principe. Cette fois-ci, il rassemblait 100.000 personnes, mais il y en a eu plus dans le passé. Il prenait une dimension particulière, parce que le pèlerinage avait été interdit l’an dernier à cause du Covid et du risque de propagation de la maladie. C’était la première fois qu’une très grande foule pouvait à nouveau se rassembler."
La vaccination rapide des Israéliens leur a permis de lever de nombreuses restrictions, mais c’était le premier événement de cette ampleur autorisé. Officiellement, 10.000 personnes pouvaient y participer, alors que certaines années l’événement a rassemblé jusqu’à 250.000 participants. Apparemment, aucune mesure de limitation d’accès au site n’avait été mise en place.
Pas d’organisateur responsable
"La propriété et la responsabilité de la gestion de ce lieu saint ne sont pas clairement établies, explique Marius Schattner. C’est ce flou que l’on paie : il n’y a pas une organisation centralisée du pèlerinage."
D’après les informations qui circulent en Israël, la fermeture d’une rampe de sortie a pu provoquer la bousculade mortelle. "A un moment, un barrage policier a été établi parce qu’il y avait peut-être un blessé, ou un incident, pense Marius Schattner. Chaque année, il y a des participants qui s’évanouissent à cause de la chaleur. La police a probablement dû fermer une issue pour soigner quelqu’un. Ça a provoqué une accumulation de gens et une cascade de chutes."