Le 5 mai dernier, GATE, la salle de consommation à moindre risque ouvrait ses portes dans le centre de Bruxelles, rue de Woeringen. Destinée à réduire les risques liés à la consommation de drogues dures en rue, la salle cible un public précarisé qui n’a bien souvent que l’espace public pour consommer. C’était une demande du secteur associatif depuis longtemps : la première salle de consommation de drogues supervisée, aussi appelée salle de consommation à moindre risque est donc ouverte depuis 6 mois dans la capitale. Une façon de protéger les consommateurs problématiques de drogues dures en les rendant moins vulnérables. Sur place, ces personnes ont accès à une assistance médicale et administrative. Elles peuvent aussi rencontrer des assistants sociaux qui accompagneront leur réinsertion.
De 50 à 70 visites par jour
Et depuis son ouverture, la salle parvient à toucher de plus en plus de consommateurs de rue. "On enregistre en moyenne 50 à 70 entrées par jour", explique Nicolas de Troyer qui gère le dispositif. "On fait tous les jours de nouvelles inclusions, on répond à une réelle demande".
Je viens ici pour la sécurité
Dans la salle de repos, un usager qui préfère garder l’anonymat fume une cigarette après son passage dans la salle de consommation. "Je viens ici pour la sécurité", dit-il. "On n’est pas en rue, on ne dérange pas les gens. C’est important de ne pas être à la vue de tous. C’est mieux que les gens en rue ne voient pas cela, dans le métro par exemple. On est assisté en cas de problème. Et puis ça évite les maladies, et on ne partage pas les ustensiles de consommation".
Dans une salle d’attente à l’étage, Jennyfer patiente un café à la main. Elle n’est pas venue pour consommer. "Je suis venue chercher un peu de réconfort et voir les assistantes sociales", confie-t-elle. "Je viens aussi pour voir l’infirmière".
Car toutes les personnes qui franchissent le seuil de GATE ne sont pas forcément là pour consommer de la drogue. "Leur toute première demande, souvent, concernent les soins de santé", explique Bruno Valkeneers de l’ASBL Transit. "On positionne vraiment ce service comme une salle 2.0, c’est-à-dire d’abord un espace de soin et d’accueil avec la possibilité de consommer. Et à ce niveau-là, l’impact est évident".
Un travail sur la durée
Les usagers du centre de consommation sont enregistrés de manière anonyme dans le programme informatique. Cela permet de voir l’évolution dans les habitudes. "Ici on a l’exemple d’une personne qui fréquente le centre depuis le mois de mai", explique Nicolas de Troyer. "Au début, il venait chercher du matériel stérile pour sa consommation mais il retournait en rue pour consommer. Il a fallu plusieurs semaines et une vingtaine de passages au comptoir d’échange de matériel avant de rentrer dans la salle de consommation et prendre ses stupéfiants en sécurité chez nous. On a donc dû réaliser un vrai travail de mise en confiance. Plusieurs semaines ont été nécessaires pour qu’il nous fasse confiance, qu’il apprenne à connaître l’équipe et accepte de consommer ici et non plus dans la rue".
C’était l’un des objectifs du projet : réduire la consommation de rue et les désagréments que cela occasionne. Tant pour le public que pour les consommateurs. Même s’il est encore trop tôt pour tirer de grandes conclusions, force est de constater que cet espace de consommation répond déjà aux besoins de dizaines de personnes 6 mois après son ouverture. "400 personnes sont inscrites ici", précise Bruno Valkeneers. "Je précise bien que ce sont déjà des usagers lorsqu’ils ou elles arrivent, le but n’est évidemment pas d’initier une consommation. Ce qu’il faut bien comprendre, c’est que la plupart de ces personnes n’ont pas d’alternative, de lieu pour consommer et le font donc dans l’espace public. Après une première étude qualitative, on constate que 87% des répondants ici dans la salle disent que s’ils ne consommaient pas ici, ils le feraient dans l’espace public".
Rappelons que cet endroit est destiné à un public majeur et consommateur problématique de drogues dures. Il ne s’agit nullement d’un lieu récréatif où consommer des stupéfiants à l’abri des regards. Avant toute utilisation de la salle de consommation. Un entretien individuel est d'ailleurs réalisé avec les équipes du centre qui analyse la situation de la personne.