Des militaires en uniforme ont annoncé lundi à la télévision nationale avoir pris le pouvoir au Burkina Faso, s'engageant au "retour à un ordre constitutionnel" dans "un délai raisonnable".
Lisant un communiqué signé du lieutenant-colonel Paul-Henri Sandaogo Damiba, président du Mouvement patriotique pour la sauvegarde et la restauration (MPSR) qui assure désormais le pouvoir, un capitaine a également annoncé la fermeture des frontières à compter de 00h00 (GMT et locales), la dissolution du gouvernement et de l'Assemblée nationale, ainsi que la suspension de la Constitution.
Le peuple salue la prise de pouvoir des militaires
Des centaines de Burkinabè saluaient lundi l'annonce de la prise de pouvoir de militaires qui ont chassé le président Roch Marc Christian Kaboré, en paradant à motos dans les rues de Ouagadougou où se mêlaient cris de joie et coups de sifflets.
"C'est une victoire, un nouveau départ pour le peuple burkinabè avec la chute d'un régime incapable qui devenait oppresseur, avec une réelle volonté de museler ou embastillé tous ceux qui osaient dénoncer son incapacité", a déclaré à l'AFP Amado Zoungrana, juché sur une moto le drapeau du Burkina en main.
"Nos larmes vont cesser maintenant. Nous demandons aux militaires en qui nous avons confiance de travailler ensemble pour le retour de la paix au Burkina", a-t-il poursuivi.
Pour Sadia Ouedraogo, qui jubilait à la place de la Nation, où se sont réunies plusieurs centaines de personnes, "ce dénouement n'est pas seulement une joie, mais plutôt un gros soulagement de voir la fin d'un régime incompétent. Nous espérons que les nouvelles autorités vont mettre fin à l'insécurité".
Les manifestants ont entonné l'hymne national avant de se disperser à l'approche de l'heure du couvre-feu instauré par les militaires. La population avait manifesté à plusieurs reprises ces derniers mois pour réclamer le départ du président jugé "incompétent" pour résoudre la crise sécuritaire. De nouveaux rassemblements de soutiens sont prévus à partir de mardi, selon des organisations de la société civile.
L'Union européenne demande la libération du président Kaboré
L'Union européenne a appelé lundi à la libération "immédiate" du président du Burkina Faso, Roch Marc Christian Kaboré, dont des sources sécuritaires ont annoncé qu'il était détenu par des soldats qui se sont mutinés.
"Dans ce moment d'incertitude, l'Union européenne reste attentive à l'évolution de la situation, en appelant tous les acteurs au calme et à la retenue. Elle appelle également à ce que la liberté du Président Kaboré et des membres des institutions de l'Etat soit immédiatement rétablie", a déclaré le chef de la diplomatie européenne, Josep Borrell, dans un communiqué.
"Les dernières nouvelles sont très préoccupantes", a estimé M. Borrell lors d'une conférence de presse. "Nous savons maintenant que le président Kaboré est sous le contrôle de l'armée", a-t-il dit.
Dans son communiqué, l'UE "rappelle son attachement au respect des institutions républicaines et de l'ordre constitutionnel". Elle "appelle également les forces de sécurité et de défense à demeurer fidèles à leurs missions premières de protection de la population et de défense du territoire, en faisant valoir leurs revendications de manière non violente".
Une "tentative avortée d'assassinat" du chef de l'Etat
Le parti du président du Burkina Faso, Roch Marc Kaboré, a dénoncé lundi une "tentative avortée d'assassinat" du chef de l'Etat, dont le sort restait peu clair après la mutinerie de soldats dans plusieurs casernes du pays.
Alors que le Burkina "s'achemine d'heure en heure vers un coup de force militaire", le Mouvement du peuple pour le progrès (MPP) dénonce également dans un communiqué "le saccage du domicile privé du chef de l'Etat" et "la tentative d'assassinat d'un ministre" dont il ne précise pas le nom.
Le MPP dénonce également l'"encerclement" du palais présidentiel de Kosyam "par un groupe d'hommes armés et cagoulés", et "l'occupation de la radio et télévision nationale" à Ouagadougou.