Les conséquences du New Space sont multiples, elles peuvent être aussi bien positives que négatives. Les problématiques principales sont l’indépendance des agences, les débris spatiaux, le tourisme spatial et la gestion des données récoltées dans l’espace.
A partir du moment où les gens collaborent, il n’y a pas de souci. L’espace n’est pas une chasse gardée des agences.
D’après Véronique Dehant, géophysicienne et cheffe de service à l’Observatoire royal de Belgique, il est clair que ce partenariat public/privé présente des avantages pour les agences spatiales et les entreprises. En s’appuyant sur le privé, la NASA par exemple a profité des dernières avancées technologiques provenant d’un secteur dynamique. Quant à SpaceX, le partenariat avec la NASA lui a permis d’obtenir des contrats à long terme avec un acteur d’importance et donc des sources de revenu stables.
Mais qu’en est-il de l’indépendance des agences ? Si elles délèguent toutes leurs activités de lancement à d’autres acteurs, ne risquent-elles pas de devenir trop dépendantes par rapport à ceux-ci ?
Pour Madame Dehant, l’agence reste le décideur et le commanditaire. Il y a donc un contrôle de sa part et elle garde son expertise.
Christian Barbier précise que les agences doivent se concentrer sur l’astronautique fondamentale, c’est-à-dire la recherche scientifique et l’élargissement de nos connaissances sur l’espace. La NASA garde la main sur le programme lunaire (programme Artemis) avec son vaisseau Orion et son lanceur, le SLS. C’est la même chose pour Mars.
Il est intéressant toutefois de noter que même ici, SpaceX reste impliqué car la construction du prochain modèle d’alunissage lui a été confiée. De plus, la NASA ne fait qu’acheter des vols à l’entreprise, SpaceX reste propriétaire des lanceurs.
Il y a aussi le problème des débris spatiaux. Plus de lancements veulent dire plus de débris et cette situation risque de rendre l’orbite basse (2000 km d’altitude) inexploitable.
"Légalement si vous lancez quelque chose dans l’espace, vous êtes obligé de vous en occuper, il existe un règlement sur la gestion des déchets et tous les pays travaillent sur le désencombrement de l’espace. Mais jusqu’à l’arrivée du New Space, on n’avait pas vraiment besoin de ce genre de régulations mais maintenant il faut retravailler tout ça pour incorporer cette nouvelle composante", affirme Véronique Dehant.
Monsieur Barbier nuance en précisant que : "ce n’est pas parce qu’il y a un règlement qu’on le respecte mais le privé n’est pas le seul à ne pas prendre ses responsabilités, les agences aussi laissent leurs débris en orbite".
Le tourisme spatial est parfois considéré comme une lubie de super riches en manque de sensations fortes. Cependant, ce nouveau secteur d’activité a du potentiel.
Christophe Barbier fait un parallèle avec les débuts de l’aéronautique : "Au début du 20e siècle, vous avez les premières lignes aériennes et c’était très cher. Aujourd’hui vous allez à Rome pour 50€… le progrès peut être très rapide et il est possible que nos enfants puissent un jour s’offrir pour une somme raisonnable ce genre de voyage… ce développement devait être fait par des milliardaires qui supportent les premiers investissements". En résumé, ce nouveau type de tourisme a son intérêt si l’argent dépensé par les milliardaires permet de continuer à investir dans les technologique spatiale.
En ce qui concerne la pollution, il met en perspective la pollution engendrée par le lancement des fusées par rapport au secteur aérien touristique. Il résume ce point par : "combien y a-t-il d’avions en l’air en ce moment ?… si on met en parallèle les deux, que représente cette pollution ?".
Si on considère la propulsion, la plupart des moteurs, qui sont des moteurs à hydrogène ne recrachent que de la vapeur d’eau et il ne faut que 2 minutes en moyenne afin qu’une fusée traverse l’atmosphère. Le temps passé sur Terre est alors assez limité ainsi que le nombre de vols. Aussi, il ne pense pas que le tourisme spatial puisse prendre autant d’ampleur que l’aviation aujourd’hui.
Il est vrai cependant que d’autres moteurs sont plus polluants mais l’industrie va vers des technologies de plus en plus propres… même si ce n’est pas vraiment pour des raisons écologiques mais plutôt d’efficacité.
Pour finir, un des problèmes majeurs pour Véronique Dehant reste la gestion des données récoltées dans l’espace.
Elle ajoute que : "ce qui change c’est que maintenant, les membres de la société ont accès à l’espace, ils peuvent acheter et revendre des informations récoltées par des satellites. Si vous envoyez un satellite et que vous utilisez cet instrument pour surveiller les champs d’un concurrent et que voyez qu’il est en friche. Vous pouvez en profiter pour l’acheter. Il faut contrôler tout ça et s’imposer une éthique sociétale et que la législation suive".
Evidemment, les données récoltées peuvent être utilisées à des fins utiles pour la société comme la surveillance des pôles, la détection de glissement de terrain, l’hydrologie… Tout dépend de l’usage dont on en fait.
En Europe, la situation dans le spatial est un partenariat entre le public et le privé. Pour Christophe Barbier, il y a une tendance de développement de systèmes privés tout en ayant un système institutionnel qui est l’ESA (Agence spatiale européenne). L’ESA chapeaute tous les processus mais délègue une partie de ses besoins à des sociétés privées européennes. Là aussi c’est un partenariat gagnant-gagnant pour les deux secteurs pour les mêmes raisons que la NASA.