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"caroline" : poésie chaotique

© Tom Whitson

"caroline", c’est l’histoire de Jasper Llewellyn et Casper Hughes, rencontrés sur les bancs d’une université mancunienne et qui, rejoint par Mike O’Malley, décident en 2017 de se retrouver autour de diverses sessions d’improvisations. Ensemble, ils s’amusent à mélanger d’étonnantes influences : country, midwest, folk, classique et même de la dance music. De retour à Londres quelques années plus tard, ils sont rejoints au fur et à mesure par Magdalena McLean (violon), Oliver Hamilton (violon), Freddy Wordsworth (basse, trompette), Alex McKenzie (saxo et clarinette) et Hugh Aynsley (batterie, percu).

En 2020, le grand public les découvre avec le sublime "Dark Blue", six minutes trente-huit de méditation contemplative, de violons bourdonnants, de guitares et d'une batterie à peu de choses prêt semblable à un battement de cœur. Au loin, dans ce bordel exalté, la voix du chanteur au bout de quelques minutes murmurant "I want it all".

C'est beau, angoissant, hypnotique, à l'image de ce première album éponyme. On a discuté quelques minutes avec Mike, guitariste et l’un des piliers fondateur.

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Hello Mike ! Votre nom commence doucement à se faire connaître en Angleterre et au-delà. Tu peux nous en dire plus sur les débuts du groupe ? Comment avez-vous commencé à jouer ensemble ? Quelle est l’histoire derrière caroline ?

Moi, Jasper et Hugh on se connaissait déjà depuis un moment. On avait pris l’habitude de se voir pour jouer de la musique country, de la folk, de la musique traditionnelle américaine, anglaise et irlandaise, car c’était très populaire dans la ville où on traînait à l’époque. On jouait dans la rue pour de l’argent. Parfois nous partions à travers l’Europe. Nous sommes allés à Gand il y a au moins une dizaine d’années, c’était un super bon moment. Quand on a commencé à chanter ensemble, on faisait vraiment ça pour le fun.

Ensuite, Jasper est allé à l’unif à Manchester et il a rencontré Kasper et je pense qu’ils ont joué ensemble un peu de musique mais ils ont par la suite bougé sur Londres avec l’idée de vouloir lancer un projet musical plus propre et discipliné. C’est ce qu’ils ont fait, puis ils m’ont demandé si je voulais venir jouer avec eux et c’est vite devenu caroline. Doucement d’autres nous ont rejoints, comme Oliver qui joue du violon et un ami de Manchester, Hugh, qui avait l’habitude de jouer avec nous avant, a commencé à jouer de la batterie. Les autres se sont joints à nous par la suite, de part des rencontres.

C’est marrant ce mélange de couleurs musicales que tu citais à l’instant et qui se reflète dans votre musique. Quelles sont vos principales influences ?

Je ne sais pas quels artistes nous ont réellement influencés. C’est compliqué pour moi de répondre à cette question car je pense que c’est un mélange d’intérêts différents plus que d’artistes spécifiques.

Peut-être au début quand on a commencé à écrire et jouer, j’étais du genre à dire que ça sonnait un peu comme du Dirty Three. C’est un peu le même genre. Mais je pense que ce qui nous influence est très large et c’est assez dur de répondre à cette question pour être honnête.

Revenons un moment sur le nom du groupe "caroline"… qui est "caroline", à quoi fait-il référence ?

Ça part d’en malentendu (rires). J’avais un ami qui avait un groupe qui s’appelait "Carola" (ndlr, pas certains du nom) , je ne l’avais jamais vu écrit et j’ai toujours cru que c’était "Caroline". Je trouvais ça super cool et me suis toujours dit que c’était dommage que ça soit déjà pris comme nom de groupe à l’époque.

Je pense qu’on n’a jamais pensé devoir nommer notre projet parce que nous ne savions pas que ça allait devenir plus conséquent. Ce n’est que quand on a commencé à faire des concerts qu’on a dû y repenser. Le nom du groupe de mon pote ne m’était jamais sorti de la tête et quand j’en ai parlé on m’a dit que non "Caroline" n’était en fait pas utilisé.

C’est caroline avec un petit C, pour ne pas faire référence au prénom.

Votre formation est composée de huit membres, ce n’est pas rien : en termes de processus, comment arrivez-vous à composer ? D’où part l’impulsion ?

Généralement, l’un d’entre nous arrive avec une petite idée et il l’envoie sur notre groupe. Ensemble avec Jasper et Casper on en discute et on essaye de voir quel propos on voudrait attribuer à ce son, quels arrangements on voudrait y ajouter et puis on le soumet au reste de la bande. Ensuite on improvise, on arrange. Mais ça change à chaque fois

En vrai, ça fait longtemps que nous n’avons pas écrit de nouvelles musiques, tous nos sons ayant été écrits pendant et avant le confinement.

Parlons maintenant de "caroline" : y a-t-il une idée principale à travers l’album, un thème fort derrière le disque où est-ce une collection de son qui finalement vont très bien ensemble ?

C’est définitivement une collection de sons différents. Certains ont été enregistrés il y a quatre ans, où peut-être trois. En fait, ils n’ont pas été écrits pour être sur un album ensemble mais à chaque fois que nous avions un nouveau son finalisé, qu’on savait qu’il allait potentiellement apparaître sur le disque, ça affectait un peu la manière dont on finissait le morceau suivant parce qu’on savait au fond qu’on allait les ordonner d’une certaine manière.

Mais je pense que quand tu as tous tes sons prêts et que tu as fini de les mettre dans un certain ordre, tu commences à ressentir une vraie connexion entre eux, ça apparaît d’une manière assez naturelle.

Dans ce premier album, il y a une alternance entre des moments de grandes envolées musicales et des silences, des interludes entre le plein et le vide, entre le noir et la lumière… Tu es d’accord avec ça ?

Oui je pense que c’est devenu comme un dispositif que nous avons beaucoup utilisé et qui a nos yeux rend un morceau de musique si intéressant: on a toujours en tête l’idée de la tension et de son opposé. Le soulagement de cette tension peut se passer sur une très petite échelle de temps ou peut se passer tout le long du morceau, tout deux peuvent même arriver simultanément.

De la tension dans l’intention, ce genre de chose est intéressante. Donc oui, c’est basé sur cette dynamique.

Tu parles de silence dans notre musique et je comprends qu’on puisse le ressentir comme tel parce qu’il y a comme beaucoup d’espace mais il n’y a pas de "vrai" silence dans notre musique. ll existe des disques où tu as de véritables silences, de véritables contrastes.

Si tu devais décrire l’atmosphère de votre album, que dirais-tu ?

Je pense que ça change, il n’y a pas qu’une seule atmosphère. Par moments c’est très intense, tendu, chaud, parfois c’est même totalement chaotique. J’aime à penser que ça change.

© Tous droits réservés

J’adore la photo du bunker sur votre cover d’album. Tu m’expliques l’histoire autour et à quoi fait-il référence ?

C’est un endroit appelé "l’île de Sheppey" dans le Kent en Angleterre. Je ne pense pas qu’il y ait de concept particulier derrière cette photo mais nous voulions quelque chose de similaire à la pochette du single, un objet dans une position bizarre, pris dans l’instant. La spontanéité est quelque chose de très important pour nous.

La première pochette que nous avions faite pour le single, c’est une photo que j’avais prise, où je balance un truc (une échelle en l’occurrence). Pour le deuxième single, c’est une photo assez spontanée qu’un ami a prise où Jasper monte une paroi rocheuse.

On a trouvé cet endroit à la suite d’un concert et on a fait des centaines de photos. Je pense qu’on aimait l’angle du bunker parce qu’il ne devait sûrement pas se situer là à la base mais plutôt sur la colline. On a tout fait en une heure car le temps et la lumière changeaient très vite et puis c’était une plage un peu dangereuse, ce n’était pas vraiment du sable mais plus de la vase. La colline était aussi pas mal érodée et donc beaucoup de pierres tombaient sur la plage, c’était un peu flippant. Sur la centaine de photos prises à ce moment-là, c’était peut-être la plus belle que nous ayons faite.

"caroline" est en concert aux Nuits Botanique ce 27 avril 2022.

 

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