Issue d’une famille d’émigrés polonais juifs, Chantal est la fille et petite-fille de rescapés des camps de concentration. Se définissant elle-même comme "la fille de la génération sacrifiée", elle s’empare de la caméra pour briser ce silence.
"Il n’y a rien à ressasser disait mon père, il n’y a rien à dire disait ma mère, et c’est sur ce rien que je travaille", lit-on dans cet article du Monde diplomatique.
"Sans modèle ni méthode, elle transforme le trou noir de son histoire en une prodigieuse capacité à habiter le temps". (Source : "Chantal Akerman (1950-2015) – Intérieur extérieur" sur France Culture).
Dans "Dis-moi" (1980), Chantal Akerman part à la rencontre de trois grands-mères juives immigrées touchées par la Shoah. Une tasse de thé à la main ou autour d’un morceau de tarte, la cinéaste recueille leurs souvenirs d’avant, pendant et d’après-guerre. Si elle maintient un rapport obsessionnel avec la destruction des Juifs d’Europe, Akerman cherche à sortir de l’affect et opte pour un dispositif simple, sans mise en scène.
La propre mère de Chantal Akerman incarne cette marque indélébile de la Shoah. Son dernier film, "No home movie" (2015), questionne les origines de l’artiste à travers le portrait de sa mère, avec qui elle s’entretient sur Skype.
Chantal Akerman livre son synopsis :
"Parce que ce film est avant tout un film sur ma mère, ma mère qui n’est plus.
Sur cette femme arrivée en Belgique en 1938 fuyant la Pologne, les pogroms et les exactions. Cette femme qu’on ne voit que dans son appartement. Un appartement à Bruxelles. Un film sur le monde qui bouge et que ma mère ne voit pas."
Peu de temps après la sortie du film, le 5 octobre 2015, la cinéaste belge se donne la mort à Paris. Elle laisse dernière elle des chefs-d’œuvre du septième art et reste aujourd’hui une influence importante pour bien des cinéastes.