On n'est pas des pigeons

"C’est un monstre": l’entrepreneur prend des acomptes, mais ne termine jamais les chantiers

Des travaux a l'arrêt, des propriétaires sans toit et un pigeon d'or pour le pire entrepreneur !

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Par C. Dath via

Le Pigeon d’Or des chantiers inachevés pourrait certainement être remis à des dizaines d’entrepreneurs en Belgique, mais nous avons sélectionné l’un d’eux qui a déjà fait plusieurs victimes.

A Ransart, dans l’entité de Charleroi, nous avons rencontré Sarah, Mouloud et Raphaël qui ont, tous les trois, eu affaire à un homme peu scrupuleux. Ces trois personnes cherchaient un entrepreneur pour leur chantier respectif. Et c’est via un groupe Facebook, sur lequel ils avaient mis une annonce, que l’entrepreneur les a contactés. Le devis est envoyé rapidement, le prix est correct, mais surtout, l’entrepreneur vient de Ransart, comme eux. Ça suffit à les mettre en confiance. Sarah, Mouloud et Raphaël le choisissent… Et c’est le début de leur cauchemar.

Des petits travaux qu’il devait terminer… à la fin du chantier !

Un entrepreneur carolo a pris l’habitude de prendre des acomptes, mais de ne pas terminer ses chantiers.
Un entrepreneur carolo a pris l’habitude de prendre des acomptes, mais de ne pas terminer ses chantiers. © Raphaël Trompler

Sarah fait appel à notre lauréat du Pigeon d’Or en août 2021. Elle souhaite refaire le pignon de sa maison, la toiture et la façade. Il commence donc les travaux, mais très vite, Sarah déchante. " Au bout d’un an, un dixième des travaux a été réalisé et ce qui a été fait a été mal fait ", nous explique-t-elle. Exemple avec la cuisine toute neuve de Sarah. Pendant des mois, il n’y a pas eu de toit, juste une bâche pour protéger. Les murs ont pris l’eau. Résultat : des auréoles partout sur les murs. L’entrepreneur devait donner un coup de peinture en fin de chantier, mais il ne l’a jamais fait.

D’ailleurs, dans toute la maison, l’homme a entrepris des travaux qu’il n’a bien souvent pas terminés. Dans la chambre de Sarah, la porte ne ferme pas et n’est pas droite. Pire, il y a un jour énorme entre sa porte et le chambranle. Dans les escaliers, c’est un garde-corps, peu solide, qu’il a installé, mais le bois n’a jamais été poncé ni peint. Dans le salon, il a plafonné les murs qui, désormais, s’effritent. Enfin, le jardin de Sarah se retrouve envahi de gravats et planches de bois que l’homme devait récupérer en fin de chantier, " mais la fin du chantier n’a jamais eu lieu ", ironise Sarah.

Des acomptes et puis, plus grand-chose

Il n’abandonne jamais vraiment le chantier. Il se présente un demi-jour, puis revient une demi-journée la semaine suivante. " A chaque fois, il promettait de venir terminer, on était en attente ", poursuit Sarah. " Ça ne permettait pas de réaliser qu’il avait abandonné. " Il donnait des dates de fin de chantier qu’il ne respectait jamais.

Sur un total de 43.000 euros, notre victime a payé 23.000 euros : " On a estimé à 8000 euros ce qui a été fait ", précise Sarah. Ces 15.000 euros de différence, elle les a sortis de sa poche, mais elle n’en a jamais vu la couleur. Lors d’une conciliation, à laquelle il a accepté de venir, l’homme s’est engagé à les payer en plusieurs fois. Mais à l’heure d’écrire ces lignes, aucun centime n’est arrivé sur le compte de Sarah. Elle a donc décidé de porter plainte.

En 2022, Raphaël a lui aussi porté plainte contre cet entrepreneur après l’abandon de son chantier. " Un jour, je l’ai croisé et il m’a dit qu’il voulait arrêter les travaux, parce qu’il serait dans le rouge à la fin du chantier ", raconte-t-il. Et pourtant, depuis le début des travaux, en janvier 2022, Raphaël avait déjà payé 35.000 euros d’acompte. Avec des spécialistes, il a estimé que 10.000/12.000 euros de travaux ont été réalisés. " J’ai perdu un gros 20.000 euros ", conclut-il.

Toujours des travaux en plus

Un jour, l’entrepreneur appelle Raphaël pour lui annoncer qu’un des murs s’est effondré.
Un jour, l’entrepreneur appelle Raphaël pour lui annoncer qu’un des murs s’est effondré. © Raphaël Trompler

Chez Raphaël, il fallait refaire tout l’intérieur de l’habitation, héritée de sa grand-mère. Mais rien à l’extérieur. Sauf qu’un jour, l’entrepreneur l’appelle : " Il m’a dit que l’un des murs (ndlr : sur deux étages avec le toit) s’était écroulé ", explique le postier de 24 ans qui n’y croit pas du tout. " Un maçon est venu voir et il m’a dit que ce n’était pas possible que ça se soit écroulé comme ça. C’était trop parfait pour un écroulement .", poursuit Raphaël. L’entrepreneur reconstruit le mur, en demandant une somme supplémentaire, avant de lâcher le chantier.

​​​​​​Il a également abandonné les travaux chez Mouloud. Et là aussi, l’entrepreneur a vu les choses en grand en insistant pour faire plus que prévu, moyennant un acompte supplémentaire. Chez Mouloud, notre Lauréat du Pigeon d’Or ne devait refaire que le sol d’une des deux chambres.

Mais c’est bien avec deux chambres inhabitables que la famille se retrouve aujourd’hui. " La deuxième chambre n’était pas prévue. Je comptais la refaire plus tard. On dormait là. Mais il me disait qu’il y avait un risque que le plancher tombe. Je ne voulais pas ça, donc j’ai dit ok. ", témoigne Mouloud. Après avoir cassé, l’homme ne revient plus. " Il m’a laissé dans cet état. On était dans le salon, on voyait le plafond de la chambre au-dessus. ", se souvient-il.

Des mois de galère

© Mouloud Rami

Les travaux devaient durer trois semaines, mais aujourd’hui, six mois plus tard, Mouloud et sa famille sont toujours en rénovation. " Je finis les travaux petit à petit. On est dans la poussière, mais au moins, on est ensemble. ", explique notre troisième victime de cet entrepreneur.

Pendant plusieurs mois, Mouloud est seul dans l’habitation en travaux. Sa fille et son épouse sont en France, dans la belle-famille. " Je dormais dans la cuisine. Ma femme et ma fille (ndlr : âgée d’à peine quelques mois) étaient à Paris. Je ne les voyais plus. C’était le plus difficile ", nous raconte-t-il, ému. " Il m’a vraiment mis dans une sale situation, surtout morale et financière aussi. "

​​​​​​Mouloud a lui perdu 2000 euros dans cette " affaire ". Il a réussi à en récupérer 4000 après de grosses négociations avec l’entrepreneur, qui avait laissé plusieurs outils chez lui. Mais ça n’efface pas les mois de galère vécue par la famille. " C’est un monstre. Il n’a pas de cœur ", soutient-il.

Aucune des trois victimes n’aurait imaginé un chantier aussi catastrophique. A chaque fois, l’homme met en confiance. " Les gens d’une même commune sont censés s’entraider ", estime Raphaël. C’est aussi ce qui a rassuré Sarah. " Il me disait : ‘On est voisins, on va se rencontrer à la boucherie, je ne vais pas vous arnaquer’ ", raconte-t-elle. " Il avait un discours rassurant. Il me disait que je pouvais être rassurée, mais à aucun moment ses paroles n’ont été suivies d’actes. "

Mouloud, Raphaël et Sarah ont une seule espérance commune, que cet entrepreneur ne puisse plus continuer ses agissements. Mais pour l’instant, les démarches entreprises par les différentes victimes n’ont rien donné.

Notre journaliste dépose le Pigeon d'Or chez l'entrepreneur !

Pigeon d'Or du pire entrepreneur

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