Partons sur la lune pour un voyage mi-onirique mi-prophétique.
Nous sommes dans un lointain futur. Sur la face cachée de la lune, bien à l’abri sous son dôme de verre, vit une communauté terrienne exilée. La planète Terre elle-même a été colonisée par des envahisseurs et chacun craint qu’un jour, ils découvrent ce dernier îlot de liberté. Mais peut-on vraiment parler de liberté ? Le lieu est régi par une série d’interdictions, pétri de croyances obscurantistes et gangrené par les complots. Il faut dire que cette communauté humaine est dirigée par une femme, Sélénie, qui dispose tout comme ses frères Verne et Méliès, de pouvoirs étranges. Ce qui lui vaut un solide lot d’ennemis parmi son propre exécutif. Comme toujours dans ce genre de récit, tout commence quand un petit grain de sable vient gripper la machine…
Un vaisseau inconnu s’abîmant sur la lune, à faible distance de la communauté humaine, c’est ça qui va servir de déclencheur à l’histoire. En vertu de leurs pouvoirs, Sélénie, Verne et Méliès s’auto-désignent pour aller enquêter sur place. A partir de là, tout s’enchaîne pour faire de cette histoire un conte fantastique mêlant paysages lunaires, intrigues de palais, personnages aux faciès caricaturaux, vaisseaux au design original et bestiaire improbable, pour le plus grand plaisir de la lecture. Il y a beaucoup de poésie dans le graphisme, on appréciera notamment les hippocampes géants servant de monture lunaire ou les éléphants blancs aux grands yeux qui peuplent les étendues désertiques de notre satellite. Cerise sur le gâteau : celui qui complète le trio de personnages principaux est un androïde à tête de quartier de lune nommé Monsieur Cacochyme.
On lira plutôt ''Sélénie'' pour sa poésie ou pour son côté Science-fiction :
On lira ce livre comme une bande dessinée d’aventure totalement dépaysante, mais aussi comme une fable politique. En cela, même s’il ne leur ressemble pas graphiquement, cet ouvrage fait penser aux nombreux livres des Mondes d’Aldébaran, parus chez Dargaud sous la plume de Léo. On y retrouve cette passion pour les êtres imaginaires, cette humanité profonde des personnages, aussi. Le fait qu’un des protagonistes porte le nom de Méliès n’est pas anodin. Le cinéaste Georges Méliès, l’un des premiers réalisateurs de l’histoire du neuvième art, a laissé en 1902 un imaginaire onirique indémodable dans son film ''Le Voyage dans la Lune''. Vous l’aurez compris, ce sont donc ces côtés plus poétiques qui m’ont séduit. '
''Sélénie'', de Fabrice Lebeault et Greg Lofé, chez Delcourt.