Pour Aakash Lamba, qui a grandi en Inde, la résolution de la crise climatique et de la crise de la biodiversité ne sont pas des questions distinctes. Il a donc voulu recueillir des "preuves tangibles" d'un lien entre protection de la faune et émissions de carbone.
Lui et ses équipes des universités de Singapour et de Princeton (Etats-Unis) ont fait appel à la méthode dite à "contrôle synthétique", utilisée en statistiques pour mesurer l'impact des politiques publiques en comparant les taux de déforestation dans les réserves spécifiquement dédiées aux tigres, à des zones abritant aussi des félins mais moins strictement protégées.
Résultat : entre 2001 et 2020, l'ensemble des aires étudiées (162) ont perdu plus de 61.000 hectares de forêt. Plus de 75% de cette déforestation est survenue dans les zones sans protection spécifique, comme le sanctuaire de Kotgarh (est de l'Inde), amputé à lui seul de 9000 ha.
A l'inverse, dans 45 réserves de préservation des tigres, la déforestation a été bien inférieure.
Près de 6000 hectares de perte nette ont été évités, ce qui correspond à environ 1 million de tonnes de CO2 évitées.
Cette trajectoire est plus nettement marquée dans les réserves du centre de l'Inde particulièrement "performantes" en la matière. L'étude cite en exemple celle de Nawegaon-Nagzira, qui a développé une "connectivité écologique" entre les parcelles de forêt, avec des corridors favorisant les mouvements des différentes populations de tigres. Une stratégie "cruciale pour le brassage génétique qui assure la survie de l'espèce à long terme", explique Aakash Lamba.