On n'est pas des pigeons

Comment les escrocs se glissent impunément sur votre fil Facebook ou Instagram

Réseaux sociaux et arnaques: quelles solutions?

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Par François Louis via

Des escrocs profitent de vos moments de distraction sur les réseaux sociaux pour vous piéger ! Vous voyez apparaître une publicité, elle parle d'un produit ou d'une solution miraculeuse pour vous enrichir facilement. Difficile de résister, vous cliquez. Rien n'a l'air suspect. Et pourtant, vous risquez gros si vous allez plus loin...

" Investissez 250 euros dans Tesla et gagnez beaucoup d’argent en quelques semaines…"

"Amazon lance sa nouvelle plateforme de cryptomonnaies : une formidable opportunité pour vous…"

Des publicités comme celle-là sont peut-être déjà apparues sur votre fil Facebook ou Instagram. Attention arnaque ! Les plateformes numériques sont incapables de faire la police sur leur propre territoire. Elles gagnent même de l’argent grâce à ces contenus illicites. Et c’est le consommateur pigeon qui paye !

Les escrocs s’abritent derrière des grands médias belges, comme Le Soir

Les escrocs s’abritent derrière des grands médias belges
Les escrocs s’abritent derrière des grands médias belges © On n'est pas des pigeons

Si naïvement ou distraitement vous cliquez sur ce genre de publicité, vous allez sans doute tomber sur un article d’un grand média belge, comme par exemple un faux article du Soir, qui vante les avantages de ces investissements.

C’est une stratégie classique des escrocs de s’abriter derrière la légitimité d’un média sérieux.

Mais si vous regardez bien l’adresse du site web au-dessus de l’article, vous verrez que ce n’est pas l’adresse du média en question, explique Mathieu Saudoyer, porte-parole de la FSMA (Autorité des services et marchés financiers). C’est une stratégie classique des escrocs de s’abriter derrière la légitimité d’un média sérieux. "

Un œil aiguisé détectera d’autres anomalies dans ces pseudo-articles. Mais beaucoup d’internautes n’y voient que du feu. Et franchissent l’étape suivante. Au bas de l’article, un formulaire attend vos coordonnées personnelles : nom, prénom, e-mail, numéro de téléphone.

Un baratin bien rodé

Mathieu Saudoyer, porte-parole de la FSMA (Autorité des services et marchés financiers)
Mathieu Saudoyer, porte-parole de la FSMA (Autorité des services et marchés financiers) © On n'est pas des pigeons

Il ne faut que quelques minutes pour être recontacté par un " conseiller financier " au baratin bien rodé.

Quel est votre profil d’investisseur ? Plutôt offensif ou défensif ? "

Au bout de quelques minutes, on entre dans le vif du sujet : " Pourriez-vous me donner les coordonnées d’une carte bancaire : numéro, date d’expiration et le code CVV. C’est nécessaire pour ouvrir votre compte d’investisseur ".

L'objectif des escrocs est de vous convaincre de verser vous-mêmes de l’argent !

Si vous franchissez cette ligne rouge, vous êtes déjà sûr de perdre quelques milliers d’euros, au minimum les montants que votre carte de crédit permet de retirer. Mais ce n’est pas le premier objectif des escrocs qui vont d’abord essayer de vous convaincre de verser vous-mêmes de l’argent. Comment ?

Si vous avez versé disons 250 euros comme mise de base, explique Mathieu Saudoyer, vous allez voir rapidement sur votre pseudo-compte d’investisseur des rendements tout aussi imaginaires : 1000 euros au bout d’une semaine ; plusieurs dizaines de milliers d’euros au bout d’un mois, etc. Et sur foi de cette fausse information, les escrocs vous recontactent pour vous proposer d’investir plus d’argent. "

Les Belges ont perdu des dizaines de millions d’euros dans ces arnaques

Close up of woman's hand using smartphone in the dark, against illuminated city light bokeh
Close up of woman's hand using smartphone in the dark, against illuminated city light bokeh ©  2021 Yiu Yu Hoi

On estime à 68 millions d’euros le montant des pertes encourues par des consommateurs belges !

Certaines plaintes déposées à la FSMA portent sur des montants de plusieurs dizaines de milliers d’euros. Depuis mai 2019, la FSMA estime à 68 millions d’euros le montant des pertes encourues par des consommateurs belges sur ce type de plateformes. Mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg. Beaucoup de victimes ne portent pas plainte.

C’est que les chances de retrouver son argent ne sont pas très grandes. Derrière ces escroqueries se cachent des réseaux internationaux bien organisés. Une fois versé, l’argent circule rapidement d’un compte à l’autre dans plusieurs pays différents. Les enquêtes sont très difficiles à mener.

C’est pourquoi nous faisons de la prévention, explique Mathieu Saudoyer. Nous avons notamment publié un test interactif sur notre site : Suis-je victime d’une arnaque ? En répondant à quelques questions tout simples, les citoyens peuvent déjà se faire une idée sur la fiabilité d’une proposition d’investissement. " Suis-je victime d’une arnaque ? | FSMA.

Quelle est la responsabilité des plateformes numériques ?

Xavier Degraux, consultant et formateur en réseaux sociaux
Xavier Degraux, consultant et formateur en réseaux sociaux © On n'est pas des pigeons

Et les plateformes numériques, elles n’ont pas une responsabilité dans ces escroqueries ? Dans le cadre de cette enquête, nous avons signalé, via la procédure prévue par Meta (les trois petits points en haut à droite de la publication sponsorisée), le caractère illicite de ces publicités. Trois semaines plus tard, les appâts des escrocs continuent à polluer notre fil Facebook et Instagram personnel. Ces signalements ne servent-ils vraiment à rien ?

Si le message publicitaire ne contient ni drogue, ni arme, ni alcool, ni sexe, ils passent au travers des mailles.

Meta compte d’abord sur l’intelligence artificielle pour filtrer ce genre de contenus indésirables, explique Xavier Degraux, consultant et formateur en réseaux sociaux. Mais en gros, si le message publicitaire ne contient ni drogue, ni arme, ni alcool, ni sexe, ils passent au travers des mailles. Meta compte aussi sur le civisme des internautes, qui seraient enclins à signaler des contenus indésirables. En fonction de ces retours, un deuxième filtre d’intelligence artificielle est appliqué. Et en cas de doute, c’est au tour des modérateurs, l’intelligence humaine donc, de faire le travail. Mais comme vous le savez, récemment, Meta a licencié énormément d’employés, principalement des modérateurs, qui coûtent de l’argent mais en rapportent peu. "

Dans le Far West d’internet

Bref, ça marche très mal. Et les grandes plateformes numériques ressemblent au Far West où des brigands vous attendent au coin de la rue pour vous détrousser. Le pire c’est qu’une partie de ce butin est reversée au shérif (en l’occurrence ici à Meta) puisqu’en tant que contenus sponsorisés, les publicités des escrocs rapportent de l’argent à Facebook et Instagram.

Le Digital Service Act, une nouvelle législation européenne, veut mettre fin à cette zone de non droit sur les grandes plateformes numériques : Google, Amazon, Facebook, Instagram, Tik Tok, etc.

S’il est adopté dans les prochains mois par le Conseil et le Parlement européens, le DSA va obliger les entreprises qui ont fait fortune grâce à internet à faire beaucoup mieux la police sur leur propre territoire, sous peine de lourdes amendes. Mais après les 11.000 licenciements de novembre dernier, Meta vient d’annoncer la suppression de 10.000 postes supplémentaires dans le monde, comme si de rien n’était…

Retrouvez "On n’est pas des pigeons" du lundi au vendredi à 18h30 sur la Une et en replay sur Auvio.

Pour plus de contenus inédits, rendez-vous sur notre page Facebook et sur YouTube.

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