Les pertes d’énergie peuvent être détectées depuis le ciel. Équipé d’une caméra thermique, l’avion photographie et scanne les toits pour révéler les niveaux d’isolation et les éventuelles pertes d’énergie. Interrogé sur La Première, Régis Martel, directeur commercial d’Action Air Environnement, une société de thermographie aérienne, explique que "l’intérêt principal de la thermographie aérienne est de pouvoir survoler un territoire en un minimum de temps et pouvoir réaliser des acquisitions à distance pour pouvoir détecter et localiser les différentes pertes de chaleur, principalement au-dessus des toits. En fait, on va déterminer des anomalies thermiques à l’issue du traitement des données et on va ensuite essayer de déterminer l’origine des anomalies thermiques qu’on a détectées à l’issue du vol. On va d’abord réaliser des acquisitions qui vont prendre des clichés par l’intermédiaire de la caméra infrarouge. On va ensuite assembler ces différents clichés et on va opérer un traitement qui va permettre de convertir ces mesures en des niveaux de couleur, et ce sont ensuite ces niveaux de couleur qui vont être transmis à l’issue des résultats".
Il faut de bonnes conditions de vol pour faire voler l’avion, poursuit Régis Martel : "C’est uniquement la nuit puisque, comme on mesure dans l’infrarouge, il faut pouvoir faire en sorte qu’il n’y ait plus l’influence du rayonnement solaire qui a été emmagasiné par les toitures et les façades durant la journée. On fait donc en sorte de déclencher les vols durant la nuit pour permettre que cette inertie thermique se dissipe. Et il nous faut également survoler les territoires lorsqu’il fait très froid. C’est pour ça que la thermographie ne se fait que l’hiver, pour que les bâtiments soient chauffés. On essaie donc de réaliser les acquisitions avec des températures extérieures inférieures à six degrés pour avoir le maximum de gradients de température. Ensuite se rajoute le fait de ne pas avoir de brouillard sur le territoire qui est survolé, l’absence de neige sur les toits, et il faut éviter également qu’il y ait eu des précipitations 24 heures avant l’acquisition aérienne. Il y a donc toute une série de paramètres qu’il faut que notre équipage prenne en compte avant de décider d’effectuer le survol d’une agglomération".
"Nos clients sont exclusivement des collectivités locales, que ce soit en France ou en Belgique, l’objectif étant que les données récoltées servent à la population et puissent également servir de support à tout ce qui est en train de se constituer en tant que service public d’aide à la rénovation énergétique, en France comme en Belgique. Donc, les données sont la propriété exclusive des communes, des communautés de communes ou des provinces, comme ça va être le cas pour la province du Brabant wallon. Les données sont donc la propriété exclusive des autorités et c’est ce qui en garantit toute l’objectivité, puisque l’objectif de ces données n’est pas d’inciter les gens à faire des travaux s’il n’y en a pas besoin. C’est au contraire de pouvoir localiser et faire prendre conscience aux habitants ou aux exploitants des bâtiments qui ont été survolés de l’emplacement de phénomènes qui peuvent être la conséquence d’un défaut d’isolation ou d’un problème localisé sur une toiture ou sur une conduite de cheminée, par exemple, qui ne serait plus utilisée, mais qui continuerait malgré tout à évacuer de manière inutile la chaleur de l’intérieur d’une maison vers l’extérieur. Tout l’intérêt de la thermographie est d’apporter une information de qualité pour aider les habitants ou les exploitants à réduire leur consommation énergétique", dit aussi Régis Martel.
Gün Gedik, coordinateur de la plateforme Liège-Énergie, explique l’intérêt d’une cartographie thermique qui a été réalisée sur Liège il y a cinq ans : "Entre 2016 et 2019, nous avons eu la chance d’avoir un projet européen à Liège de quartiers actifs pour le climat, et cette subvention européenne et wallonne nous a permis de participer aux objectifs de réduction des émissions de CO2. Et à Liège en particulier, il faut augmenter le taux de rénovation, et une des actions était justement de réaliser cette thermographie aérienne pour mieux connaître notre territoire. L’objectif était donc vraiment de voir de façon différente notre territoire et c’est ce qu’on propose encore aujourd’hui aux citoyens liégeois des codes postaux 4000 à 4032, c’est de découvrir leur maison vue du ciel et de venir nous parler de leur maison. On leur remet cette maison vue du ciel et on analyse la situation ensemble. Le Collège communal de la Ville de Liège et Liège-Énergie ASBL ont décidé de ne pas publier ces images, ces données, parce qu’on souhaite rendre acteur le candidat rénovateur pour qu’il vienne nous voir, il y a cinq ans comme aujourd’hui, pour connaître toutes les aides qui existent en Wallonie et sur le territoire de la Ville de Liège pour aujourd’hui faire face à la crise et rénover ce qu’il est possible de rénover maintenant ou dans cinq ans, et donc de constituer son projet de rénovation énergétique".
Cette carte thermographique n’est pas une preuve, mais un outil "qu’on espère reproduire dans les années à venir, par exemple sur la métropole liégeoise. Pourquoi ? Il faut savoir qu’il y a 1.600.000 logements en Wallonie, 500.000 sur le territoire de la province et 100.000 sur le territoire de la ville. Et donc, si on veut vraiment avoir une action volontaire par rapport à la rénovation énergétique, il nous faut des outils et l’avantage de la thermographie est de faire en une action l’ensemble du territoire. Après, il y a le traitement des données, puis la restitution pendant toutes les années qu’on veut".
Sur ces cartes, il y avait beaucoup de rouge, dit encore Gün Gedik : "On a le parc le plus ancien de Wallonie, donc un parc construit avant les normes énergétiques. Et, comme partout en Europe du nord-ouest, il y a un travail important à faire dans la rénovation énergétique, et l’isolation de la toiture est une priorité".