Laisse tomber le masque, rouvrir les discothèques et revenir aux soirées dansantes, même avec l’usage d’un "Covid Safe Ticket", est-ce raisonnable avec le niveau de circulation du virus que l’on connaît actuellement ?
Les derniers chiffres de l’épidémie de Covid-19 en Belgique montrent en effet une certaine stabilisation au niveau du pays, mais avec des disparités importantes, et plusieurs paramètres laissent eux craindre une prochaine reprise des contaminations, dont la rentrée universitaire, dont on sait qu’elle a été un élément parmi d’autres dans "l’explosion" de la deuxième vague en 2020. En Wallonie, notamment, les chiffres continuent de progresser, en particulier en province de Liège.
Et aujourd’hui, outre l’extension de l’utilisation du Covid Safe Ticket, le Comité de Concertation devrait se pencher sur divers assouplissements supplémentaires, là où il en existait encore. Cela concerne notamment les soirées dansantes dans les cafés, l’ouverture des discothèques, le port du masque.
Mais est-ce bien le moment ? Pour le groupe d’experts qui conseille le gouvernement, il est trop tôt pour tomber le masque. Le GEMS a adressé cette semaine un avertissement aux dirigeants politiques face à ce risque remontée des contaminations et des hospitalisations à la faveur de l’automne. Aux yeux des experts, le port du masque doit demeurer une obligation à l’intérieur lorsque se côtoient des gens dont le statut vaccinal, immunitaire ou de test est inconnu ainsi qu’en cas de forte de densité de fréquentation.
On a besoin de voir avec précision combien parmi les nouvelles admissions, sont des vaccinés ou pas
L’épidémiologiste de l’ULB Simon Dellicour est également de cet avis. Les chiffres semblent se stabiliser mais "l’augmentation peut passer un moment sous le radar. Tellement de paramètres changent, avec les différentes rentrées, mais aussi un relâchement beaucoup plus important que l’an dernier car on estime le risque très différemment. Les 4 ou 5 prochaines semaines devraient être des semaines d’observation. On va voir si la remontée de la circulation du virus attendue va entraîner une hausse des admissions et jusqu’à quel point".
Même s’il existe des études pour d’autres pays, on n’avait pas encore réellement jusqu’ici en Belgique de moyen d’estimer parfaitement l’effet de la vaccination : "Il faut voir si on a un vrai découplement entre les contaminations et le nombre de nouvelles admissions. Pour le calculer, il nous faut des données. On a besoin de voir avec précision combien parmi les nouvelles admissions, sont des vaccinés ou pas".
Ces données, qui n’étaient fournies qu’avec retard et de façon incomplète, devraient dorénavant être envoyées à Sciensano dans les 48 heures. Mais en attendant de pouvoir les analyser, Simon Dellicour plaide pour la prudence : "En tant qu’analyste, je plaiderais pour un ‘wait and see' au niveau des mesures. On se pose notamment encore beaucoup de questions au sujet de la transmission avec des personnes vaccinées. Quels sont les risques réels s’il n’y a plus aucune prudence chez les vaccinés, à partir du moment où aucun vaccin n’est efficace à 100%, et que celle-ci est encore un peu plus réduite avec le variant Delta ?"
Attendre mi-octobre
Les modèles élaborés par les analystes illustrent en effet qu’avec l’efficacité connue des vaccins, on pourrait assister à une haute importante des transmissions cet automne. L’épidémiologiste se méfie en particulier de la réouverture des discothèques, dont on sait qu’elles ont été à l’origine de foyers importants dans d’autres pays : "Je suis désolé pour les discothèques, mais il faudrait qu’on puisse vraiment évaluer au préalable la transmission entre personnes vaccinées. Il faut de la prudence pour le moment, étant donné que la société n’est pas sous cloche".
Ce qu’il préconise donc ? "Attendre mi-octobre, et effectuer un gros changement à la fois afin de pouvoir l’évaluer". Mais aussi continuer à agir pour la vaccination, et pas seulement chez les jeunes : "Dans les projections en France, la grosse majorité des hospitalisés de plus de 60 ans seront tous des non vaccinés. Il y a donc un vrai enjeu à aller chercher la vaccination des plus âgés. Cela devrait être notre priorité d’aller chercher encore les personnes à risque."
Via une obligation vaccinale pour les personnes plus âgées? Pourquoi pas mais "on doit pour cela avoir dépassé la phase de test, et que le vaccin soit totalement agréé."