Coronavirus

Coronavirus : le comité de concertation relâche les mesures, mais quelle est la situation sanitaire en Belgique ?

© Getty Images

Par Sylvia Falcinelli, avec Sarah Heinderyckx et Céline Biourge

Un retour à la quasi-normalité, voilà ce qui s’annonce pour le Codeco de ce vendredi. Et pour cause, la situation épidémiologique s’est améliorée.

Les quatre indicateurs utilisés pour suivre l’évolution de l’épidémie sont le nombre de cas confirmés, les nouvelles hospitalisations de cas Covid-19 (confirmés en laboratoire), l’occupation des unités de soins intensifs (USI) et les décès. Tous ces indicateurs sont en phase descendante depuis plusieurs semaines, comme on peut le lire en détail ici, dans le dernier rapport de Sciensano.

Voici les moyennes journalières pour les 7 derniers jours pris en compte dans ce rapport :

  • 3536 cas confirmés (pour la période du 9 au 15 mai, trois derniers jours non consolidés, en baisse de 19% par rapport à la moyenne journalière de la période précédente),
  • 91,3 admissions à l’hôpital (pour la période du 11 au 17 mai, en baisse de 25% par rapport à la moyenne journalière de la période précédente),
  • 9,9 décès (pour la période du 9 au 15 mai, en baisse de 22% par rapport à la moyenne journalière de la période précédente).

A la date du mercredi 18 mai 2022, on comptait 1408 lits occupés dans les hôpitaux, dont 105 en soins intensifs (en baisse de respectivement 28% et 5% par rapport au mercredi 11 mai 2022).

On est dans une dynamique descendante

"On est dans une dynamique descendante", confirme Yves Van Laethem, le porte-parole interfédéral Covid-19. "Il faut insister sur le fait que le nombre de tests devient faible, de l’ordre de 18.000 par jour donc on rate des infections très clairement – il y a plus de virus qui circulent que ce que l’on détecte mais tout va lentement, de manière continue, vers une diminution des différents indicateurs."

Toujours selon le dernier rapport de Sciensano, on voit diminuer le taux de reproduction (estimation de la contagiosité, qui dépend du virus mais également de nos comportements). Une diminution valable aussi bien pour le taux calculé sur base des hospitalisations en Belgique que pour celui calculé sur base du nombre de cas détectés. Les deux sont en dessous de 0,9. Or, en dessous de 1, cet indicateur indique une dynamique épidémique en cours de ralentissement.

 

Qu’observe-t-on dans les hôpitaux ?

Derrière ces chiffres globaux, quelles précisions peut-on donner à propos de la situation concrète sur le terrain, en particulier dans les hôpitaux ?

Marcel Van der Auwera, chef du département "Aide médicale urgente" au SPF Santé publique décrit une nette amélioration. "Au niveau des soins intensifs, on fluctue ces derniers temps autour des 100 patients. Parfois un peu plus, parfois un peu moins. Comme nous avons 128 sites hospitaliers en Belgique, cela signifie que certains hôpitaux n’ont plus du tout de patients COVID dans leurs unités de soins intensifs", explique-t-il, avant de détailler : "Les hôpitaux où on retrouve le plus de patients COVID en soins intensifs sont les "centres tertiaires", c’est-à-dire en gros les hôpitaux universitaires. C’est assez logique parce que c’est là qu’ont été envoyés les patients les plus lourds. Quelques exemples d’hôpitaux où il y a encore le plus de patients COVID en soins intensifs : Grand Hôpital de Charleroi (5 patients soins intensifs), Citadelle à Liège (7 patients), CHU Sart Tilman (8 patients)".

Au niveau des patients hospitalisés en dehors des soins intensifs, le dernier comptage fait état de 1400 personnes hospitalisées, soit une quinzaine par hôpital en moyenne. "Ça s’améliore partout mais ce n’est pas encore fini", précise Marcel Van der Auwera.

Au Grand Hôpital de Charleroi par exemple, où l’une de nos équipes s’est rendue, il y avait encore 41 patients "Covid". Mais il n’y a plus d’unités spécifiquement "Covid" : les patients sont isolés dans leurs chambres au sein des services. Et il faut préciser que le Covid n’est souvent pas la raison de leur hospitalisation (beaucoup sont testés positifs alors qu’ils viennent pour une autre raison et ne sont donc pas malades du Covid). En pratique cependant, "pour l’équipe soignante, c’est toute l’infrastructure qui doit être mise en branle et donc c’est la lourdeur de l’équipement spécialisé, toute une série de mesures d’hygiène plus lourdes", explique le Dr Manfredi Ventura, le Directeur médical.

"On a encore des patients fragilisés, qui peuvent attraper le Covid avec parfois des issues fatales, donc le problème n’est pas résolu, la situation est bien meilleure qu’avant mais ça nécessite encore de prendre quelques mesures de précautions, notamment de garder le masque à l’intérieur de l’hôpital", poursuit-il. L’amélioration est malgré tout réelle et "depuis de nombreuses semaines, nous n’avons plus de clusters c’est-à-dire de dissémination du virus à l’intérieur de l’hôpital".

Dans d’autres sites, comme à la Clinique Saint-Pierre d’Ottignies, l’embellie est encore plus nette. Depuis Pâques, il n’y a plus aucun patient Covid aux soins intensifs. "Ça change parce qu’on ne vit plus dans le stress de ne soigner qu’une seule pathologie […] On a l’impression que la vie reprend un peu comme avant", partage la médecin Ester Ponzetto, interviewée par nos équipes à l’unité des soins intensifs de l’hôpital. Les pathologies sont redevenues diverses. Le bloc opératoire a repris son activité normale. "En général, on tourne autour de 12 lits occupés en continu", commente Sandrine Pirson, infirmière-cheffe aux soins intensifs dans le même hôpital. Ce qui ne veut pas dire que tous les problèmes ont disparu, en particulier celui du manque de personnel infirmier au quotidien, une situation généralisée. "Je m’estime heureuse car on a un effectif plus ou moins correct, ce qui n’est pas le cas dans les autres unités", poursuit Sandrine Pirson. "C’est vrai qu’on fonctionne avec un petit sous-effectif parce qu’on doit donner des congés aux gens – qui le méritent – en période estivale comme maintenant. On est correct mais il me manque une infirmière par jour."

Sur ce thème de la pénurie d’infirmiers et d’infirmières, accentuée depuis la crise du Covid, revoir ce reportage du Journal télévisé du 3 mai 2022 :

La fin partielle du masque, mais pas de la vigilance

Aujourd’hui, le port du masque est encore obligatoire dans quelques lieux dont les transports en commun – obligation qui devrait tomber avec le Codeco de ce vendredi, vu la situation épidémiologique. Selon les données actuelles, une telle décision semblerait logique à Yves Van Laethem : "Il paraît logique actuellement, avec les chiffres que nous avons, d’avoir dans l’idée de relâcher les mesures, à la fois grâce aux chiffres, à la fois grâce au fait que nous sommes en train d’entrer dans l’été, et que logiquement la main est plutôt de notre côté que de celui du virus".

 

Il est donc selon Yves Van Laethem "défendable" que le masque ne soit plus porté, mais tout de même éventuellement encore recommandé "aux personnes non vaccinées, fragiles, immunodéficientes, âgées". D’autant plus que "cette mesure n’a probablement plus beaucoup d’impact". Continuer à l’imposer, en particulier dans les transports en commun pourrait entraîner son rejet – on observe d’ailleurs qu’elle est de facto de moins en moins suivie – or, "dans le futur, on aura peut-être besoin de ressortir cette mesure, à l’automne par exemple, et alors il faudra pouvoir expliquer aux gens qu’il faut le faire".

"On est un peu dans cette zone où le virus circule beaucoup moins que ce qu’il a fait récemment, mais beaucoup plus que ce qu’il a fait à certains étés", poursuit le porte-parole interfédéral. "Ce qu’on peut espérer, c’est que dans les semaines qui viennent, on rejoigne cette zone où effectivement la circulation virale va devenir plus basse, ce qui renforcerait la justification d’abandonner cette mesure – qui n’est plus très suivie."

A noter que dans la perspective du Codeco de ce vendredi, le ministre de la Santé publique, Frank Vandenbroucke, a exprimé le souhait de maintenir l’obligation de porter le masque dans les hôpitaux et dans les pharmacies, ainsi que lors de visites chez un médecin.

Globalement, même si la situation épidémiologique s’améliore, la vigilance reste de mise. "L’attention doit rester bien branchée sur le fait que d’autres variants pourraient poser problème", souligne Yves Van Laethem. "On songe tous pour l’instant au problème éventuel – je dis bien éventuel – que BA.4, BA.5, deux variants d’Omicron nés en Afrique du Sud pourraient poser, mais il n’est pas du tout évident qu’ils aient un réel impact dans notre situation européenne". Le personnel soignant des hôpitaux croise les doigts.

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