Ces dernières semaines, beaucoup d’entre vous ont contacté la rédaction pour nous poser des questions sur l’immunité acquise suite à l’infection au Covid-19. Nous avons essayé d’y voir plus clair grâce à deux expertes.
Tout d’abord, petite précision sur les mots utilisés. Sophie Lucas, professeure à l’UCLouvain et responsable du groupe de recherche en immunologie et immunothérapie du cancer à l’Institut de Duve, recadre : "L’immunité acquise suite au vaccin ou suite à une infection au Covid-19 est toujours naturelle, dans le sens où dans les deux cas, il est 'naturel' de développer une réponse immunitaire et des anticorps". Pour être précis, donc, il faudra parler d’immunité acquise suite à une infection et d’immunité acquise suite à la vaccination.
A propos d’immunité, beaucoup de choses ont été dites depuis le début de la crise. D’une part, l’état des connaissances sur le Covid évolue très rapidement. D’autre part, onze mois après le début de la vaccination en Europe, les scientifiques ont plus de recul quant aux réponses immunitaires induites par les vaccins.
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Une protection un peu différente
En ce sens, la recherche permet d’en savoir un peu plus sur la nature de la protection induite par la vaccination et par l’infection.
Dans cet article publié dans The Lancet, on explique par exemple que "les anticorps sont des indicateurs incomplets en matière de protection. Suite à une infection ou à la vaccination, il existe plusieurs mécanismes d’immunité, non seulement au niveau des anticorps, mais également au niveau de l’immunité cellulaire". Autrement dit, les anticorps ne représentent qu’une partie de la réponse immunitaire que notre corps peut fournir.
Muriel Moser, professeure à l’ULB et immunologue, nous explique pourquoi : "Lorsqu’on nous injecte le vaccin, celui-ci induit la production de la protéine spike, la protéine à la surface du virus Sars-Cov-2 et notre organisme réagit à la présence de spike, alors que si on est infecté au Covid-19, l’organisme réagit aux différentes protéines du virus. Il n’y a pas que les anticorps qui entrent en jeu, mais aussi les lymphocytes T, qui tuent la cellule infectée", explique Muriel Moser.
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Des études reprises dans The Lancet montrent que des personnes infectées par le Sars-Cov entre 2002 et 2003 gardent, encore aujourd’hui, des lymphocytes capables de reconnaître et réagir au Covid-19. "Il semble alors que les lymphocytes de mémoire reconnaissent les antigènes de manière plus large, ce qui est très important pour les variants. Cet effet de long terme est moins décrit pour les vaccins, à ce stade", détaille l’immunologue.
Cette immunité acquise par l’infection n’est pas pour autant "meilleure". Elle est, par contre, plus large, dans la mesure où elle permet de reconnaître des virus "un peu différents".
Les études en effet l’affirment : celle-ci, encore en 'preprint', signale que "toutes les études [analysées] ont permis de trouver au moins une équivalence statistique en matière de protection entre l’immunité induite après une vaccination et celle développée après infection ; et trois études démontrent la supériorité de cette dernière".
D’autres études approfondissent le constat, ajoute Muriel Moser : une étude menée au Danemark sur les tests PCR effectués sur 4 millions de personnes en 2020 (avant le vaccin, donc) montre que la protection après une infection était de 80%, mais elle chutait à 47% pour les personnes âgées de plus de 65 ans.