Covid-19 : vers une 3e dose de vaccin généralisée à tous les Belges ? Voici les arguments pour et contre

Un homme se fait vacciner à l’hôpital militaire Reine Astrid, à Neder-Over-Heembeek, Bruxelles, le 3 mai 2021.

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La task force vaccination a décidé ce 30 octobre 2021 d’élargir l’injection d’une dose de rappel du vaccin anti-Covid au personnel soignant. Un élargissement de la population cible de cette injection supplémentaire qui fait planer encore un peu plus la possible et extension d’une troisième injection à l’ensemble de la population belge âgée de 12 ans et plus.

Alors que les plus de 65 ans sont déjà éligibles à cette dose "booster" depuis la fin septembre, l’éventualité de voir cette troisième dose se généraliser fait débat et la Flandre s’est déjà positionnée positivement à ce sujet.

 

On fait le point sur les arguments favorables et défavorables à une telle extension des injections de doses de rappel.

Les arguments pour

L’efficacité des vaccins mise à mal par le variant Delta

On le sait depuis plusieurs mois, le variant Delta qui a émergé en Inde à la fin du mois de mars a rebattu les cartes de la vaccination contre le Covid-19.

Selon une étude israélienne, "l’immunité contre le variant Delta" diminue "dans tous les groupes d’âge quelques mois après la réception de la deuxième dose de vaccin". Début juillet, Israël, bien que précurseur en matière de vaccination, a enregistré d’importants taux de contamination alors qu’une percée de cette souche était observée début juillet et malgré un important taux de sa population vaccinée avec le vaccin Pfizer/BioNTech.

Une immunité réduite par le temps

En plus de la réduction d’efficacité liée à l’apparition de nouvelles souches auxquelles répondent moins les vaccins, de récentes études nous ont également appris que l’efficacité diminue à l’épreuve du temps qui passe.

C’est ce que confirme une étude parue dans The Lancet et commanditée à la fois par Pfizer et le réseau de santé américain Kaiser. D’une efficacité estimée à 90% juste après la seconde injection, elle diminue à 88% après un mois puis à 47% après 6 mois. En revanche, les risques d’infection sont accrus quelques mois après injection, le vaccin continue de protéger à 90% contre les formes graves du virus.

C’est pourquoi l’Agence européenne du médicament (EMA) a approuvé début octobre l’administration d’une dose de rappel Pfizer, puis Moderna la semaine dernière, pour tous les majeurs. L’injection d’une dose supplémentaire permettrait de rehausser l’efficacité liée aux contaminations qui s’élève alors à 95,6% selon un essai préliminaire de Pfizer.

Booster les défenses contre le virus

Une dose supplémentaire permet donc de booster les défenses immunitaires des personnes ayant reçu la première et deuxième dose. Ce schéma à deux doses  "visait une protection immédiate", selon Jean-Daniel Lelièvre, expert vaccin à la Haute autorité de santé en France, interviewé par Ouest France. Il a donc permis de limiter les dégâts "dans le cadre d’une urgence pour contrôler une pandémie", pas pour une protection sur 10 ans, insiste-t-il.

Toutefois, "les protocoles montrent très bien qu’il faut attendre six mois après la deuxième dose" pour que les effets positifs d’une troisième injection ne soient pas nuls, a précisé l’épidémiologiste et professeur santé publique à l’ULB Yves Coppieters sur LN24.

Les arguments contre

Le manque de données scientifiques

Si l’idée d’un élargissement de la population cible de la dose "boost" est dans toutes les têtes depuis plusieurs semaines, certains estiment que les données disponibles ne penchent pas en faveur d’une telle décision.

C’est le cas du chef de la Taskforce vaccination qui a assuré le 23 octobre qu’"à ce stade, il n’y a aucune preuve scientifique que l’immunité diminue dans la population jeune et en bonne santé". Il plaide en faveur de "mesures simples qui ont déjà fait leurs preuves, comme le masque buccal et le Covid Safe Ticket".

Un constat partagé par le Conseil supérieur de la Santé, qui estime qu’il n’existe "aucune preuve" qui permet de justifier d’élargir la troisième dose à tous les Belges de plus de 12 ans.

Sur LN24, Yves Coppieters a estimé qu’il "ne faut pas faire de la troisième dose un automatisme".

L’arrivée de nouveaux vaccins

D’autres épidémiologistes estiment qu’il ne faut pas se ruer sur l’option de la troisième dose des vaccins actuels alors que les laboratoires pharmaceutiques travaillent sur des vaccins adaptés aux dernières mutations du virus.

Selon le porte-parole interfédéral de la lutte contre le coronavirus en Belgique Yves Van Laethem, il "serait bête d’aller arroser tout le monde d’une 3e dose avec un 'vieux' vaccin" tandis que "des vaccins mieux ciblés sur les variants sont attendus pour le printemps prochain", a-t-il confié au Soir.

Au-delà de la simple adaptation des vaccins actuels, plusieurs nouveaux vaccins sont aussi attendus dans l’arsenal belge. C’est le cas de celui développé par la société française Sanofi qui repose sur la technologie des protéines recombinantes. Il génère une production de concentrations élevées d’anticorps neutralisants, "ce qui souligne le solide intérêt potentiel que représente son développement pour la vaccination de rappel", se réjouit le groupe pharmaceutique. Attendre son arrivée sur le marché pourrait donc être une bonne façon de maximiser l’efficacité de la dose de "boost".

Donner la priorité au programme Covax

L’argument éthique est brandi par les scientifiques à chaque fois qu’une extension du public cible des vaccins est évoquée. Et la troisième dose n’y échappe pas.

"La priorité absolue est maintenant de donner des vaccins aux pays où les opérations de vaccination sont moins avancées", a insisté Dirk Ramaekers, chef de la Taskforce vaccination. Il a précisé que la Belgique a déjà offert "environ trois millions de doses à Covax et il y en aura plus".

En d’autres termes, la troisième dose n'est pas une priorité et il est préférable qu’une plus grande partie de la population mondiale soit vaccinée plutôt qu’une petite minorité de la population des pays développés ait reçu trois doses de vaccin. Les semaines et mois à venir seront sans doute décisifs pour trancher d’un élargissement ou non.

 

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