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Crise de l’énergie : et si le partage d’énergie était une alternative ?

Tendances Première: Le Dossier

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Le partage d’énergie permet à tous ceux qui le souhaitent de bénéficier d’énergie renouvelable sans pour autant disposer d’une installation à domicile. Ce partage est aujourd’hui possible en région bruxelloise et pourra l’être prochainement en Wallonie. C'est une solution intéressante du point de vue écologique, économique et social, au regard des crises actuelles.

 

Le partage d'énergie est prévu par la directive européenne de 2019 et chacun des pays de l'UE est libre de la transcrire à sa manière. Bruxelles est un élève modèle en la matière et permet déjà ce partage à tous les citoyens qui le souhaitent. Pour la Wallonie, cette notion est déjà transcrite dans un décret et le dossier est en cours de finalisation. Le partage d'énergie concerne l'énergie renouvelable, qu'il s'agisse d'électricité, de biogaz...

"On est au début d'un long processus dans lequel l'électricité produite localement peut être vue comme une ressource commune, mais il va falloir aller beaucoup plus loin", souligne Grégoire Wallenborn, chercheur-enseignant à l’IGEAT -Institut de gestion de l’Environnement et de l’Aménagement du Territoire à l’ULB

© Pixabay

Un partage virtuel

Grégoire Wallenborn préfère d'ailleurs parler plutôt de partage virtuel.

"Aujourd'hui, quand on produit de l'électricité avec des panneaux photovoltaïques, elle est de toute façon injectée dans le réseau et elle va là où elle est demandée. Il y a donc déjà un partage de fait des flux d'énergie."

Avec les communautés d'énergie, on vient comptabiliser autrement cette énergie. On installe des compteurs électroniques communicants chez les participants, pour pouvoir faire une comptabilité très précise, quart d'heure par quart d'heure, pour savoir combien a été produit, qui a consommé quoi. 

"Il me semble qu'on ne va pas suffisamment loin, parce qu'un dispositif qui est pensé pour être collectif, on le réindividualise beaucoup, et il y aurait peut-être d'autres modèles à développer."

Mais potentiellement, c'est vraiment quelque chose d'extrêmement intéressant de se dire qu'on a un commun, c'est-à-dire quelque chose qui n'est pas privatisé, qui n'est pas non plus du ressort de l'Etat, mais qui est une ressource gérée localement par des individus, parce que ça les intéresse.

A Bruxelles, des partages de pair à pair

A Bruxelles, il y a principalement des demandes pour du partage d'électricité, souvent de pair à pair, entre deux citoyens ou deux entreprises, dont l'un a des panneaux et l'autre pas. Ainsi que des demandes pour du partage d'énergie dans le même bâtiment, soit des copropriétés ou des logements sociaux qui équipent leur toiture, explique Benjamin Wilkin, directeur d'Energie Commune, anciennement APERe, qui fait la promotion de la réappropriation de l'énergie par les consommateurs.

Entre plusieurs bâtiments, c'est plus complexe à mettre en place parce qu'il faut créer une structure juridique qui va fédérer les différents acteurs. Mais des écoles et des communes sont notamment intéressées par le concept.

Energie Commune accompagne et facilite ces partages d'énergie pour Bruxelles Environnement. Ce partage se fait via le réseau public existant d'électricité, "parce que le réseau est aussi un bien commun."

Des voisins d’énergie pour plus de cohésion sociale

Monique Thomas fait partie de la communauté d’énergie Voltataqa, qui concerne des logements sociaux de binômes dans un quartier mixte à Bruxelles, Boondael, et qui vise à aider des gens qui ont beaucoup de difficultés, dont celle de la langue.

"Actuellement, nous sommes voisins d'énergie. Nous pensons nous diriger vers un partage d'énergie. C'est un gros travail à mettre en place." 

C'est effectivement un long processus que de pouvoir se parler entre voisins sur des sujets très techniques que peu de personnes maîtrisent, souligne Grégoire Wallenborn, l'un des chercheurs à l'origine de ce projet.

Le grand intérêt des communautés d'énergie est précisément que des citoyens, des gens qui ne sont pas versés dans le domaine énergétique, commencent à parler d'énergie. Parce qu'on va avoir besoin, dans la transition, de personnes qui vont devoir faire de la flexibilité, de la sobriété. 

Et rien de tel que des échanges entre pairs, dans un voisinage, sur les petites astuces qui permettent de mettre en question les normes sociales qui aujourd'hui façonnent nos consommations.

On constate que parfois, les communautés d'énergie sont un moyen de faire de la cohésion sociale et que, finalement, le partage d'énergie n'est qu'un prétexte !

"Je crois aussi que c'est un vecteur de paix sociale. Quand tous les gens d'un quartier se connaissent bien, ils se côtoient avec plaisir. Je crois que ça peut vraiment pacifier un quartier", se réjouit Monique Thomas.

En Wallonie, déjà deux projets pilotes

En Wallonie aussi, on travaille déjà sur ce type de projets de cohésion. Dès que la réglementation sera passée, des communautés d'énergie COLECO seront mises en place dans des quartiers ou des villages, pour permettre à chacun de participer à la transition énergétique, même s'il a peu de moyens pour acheter par exemple des panneaux photovoltaïques, explique Olivier Bontemps, directeur d'Ideta.

Ideta est une agence de développement du territoire en Wallonie picarde, qui accompagne les communes dans la transition vers plus de durabilité, notamment énergétique, et qui mène déjà deux projets pilotes. L'un qui permet de partager l'énergie d'une éolienne, utilisée par les hôpitaux et le CPAS à Tournai. L'autre consiste en un partage d'énergie au sein d'un même bâtiment, dont les différents occupants bénéficient de l'énergie produite par les panneaux photovoltaïques.

Comment être certain de recevoir une part égale ?

La clé de répartition, définie au sein de la communauté, garantit à chacun ce qui lui paraît le plus juste et le plus intéressant. Différentes clés de répartition sont possibles selon les cas, au niveau de l'équité ou de l'optimum économique, explique Benjamin Wilkin.

C'est typiquement un débat sociétal qui se fait au niveau micro mais qui illustre d'autres débats sociétaux qui se font au niveau macro, avec la même question. 

Les gens peuvent y fournir une réponse ensemble. Ils doivent s'écouter, ils ne peuvent pas se taper dessus, sinon ils n'avancent pas. Il y a une vraie construction démocratique au niveau micro.

>>> Ecoutez la suite de l'émission ci-dessus >>>

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