Dans sa chronique Dans l’air du temps, Réal nous parle d’une figure spécifique de la chanson réaliste, "l’épouse de marin".
Tragédie de la rue
Damia est une chanteuse majeure de l’entre-deux-guerres. Drame, mélancolie, malheur, voici les ingrédients des chansons de Marie-Louise Damien, mieux connue sous le nom de Damia. C’est elle qui sera la première à chanter dans une robe à fourreau noire, c’est elle qui sera la première à se faire éclairer par un projecteur devant un rideau noir.
La scénographie est toujours la même : un gros plan sur un visage en souffrance, sur une chanteuse statique qui porte ses bras en croix sur sa poitrine.
Véritable inspiratrice de la stature de la chanteuse "réaliste", c’est elle qui inspirera à Edith Piaf – et à tant d’autres chanteuses de son époque – cette position d’interprète debout et souffrante, face à son public, c’est-à-dire, à son destin.
Sa chanson "Sombre Dimanche" a même été interdite en Hongrie et dans d’autres pays car les autorités considéraient que ce titre poussait au suicide.
On ne compte pas le nombre de chansons dans lesquelles elle est battue et agressée…
Mais Damia incarne aussi une autre figure de l’histoire de la chanson francophone, la femme, la fille ou la mère de l’homme qui part à la conquête des océans.
La femme de marin
Les représentations des femmes de marins en veuves ou mères meurtries et courageuses, emmurées dans la solitude, renvoient à des stéréotypes solidement ancrés dans la littérature et dont le monde de la chanson a été un écho.