Dernier d’une fratrie de quatre, fils d’un polytechnicien devenu officier de l’armée coloniale et d’une femme au foyer, Daniel Pennac s’est souvent confié sur sa scolarité désastreuse. En pension dès la cinquième, plusieurs redoublements, huit ans de taule pédagogiquement parlant, des années de douleur et de honte puis la rédemption grâce à trois professeurs et à son amour de la lecture.
Mais saviez-vous que la saga des Malaussène trouve en partie son origine dans ce passé de cancre.
Début des années 80, Daniel Pennac devenu professeur de lycée lit l’essai du philosophe et anthropologue, René Girard Le Bouc émissaire et sa théorie lui plaît. L’idée en est que tout groupe humain se constitue par rejet d’un des siens. En tant qu’ancien cancre, puis en tant que professeur, il connaissait bien le phénomène :
Celui qui incarne tous les défauts du groupe est sacrifié, martyrisé et ensuite par un revirement de conscience, il est divinisé et c’est le fondement du christianisme. On sait très bien que ce phénomène de bouc émissairisation est réel et que c’est lui qui est le mortier qui solidifie le groupe. Mais ça vaut aussi pour tous les groupes humains, les familles, une salle de classe, un gouvernement.
Toujours dans le début des années 80, Daniel Pennac découvre sur les conseils d’un ami, Jean-Bernard Pouy, la Série Noire et les polars où le sens de la métaphore schématise un propos plus efficacement que de longues descriptions. Il le défie ensuite d’écrire un roman noir.
Daniel Pennac se dit alors qu’il serait intéressant d’illustrer la théorie de René Girard à travers un personnage qui serait un bouc émissaire professionnel, un type explicitement salarié pour se faire engueuler à la place des autres. C’est ainsi qu’est né Au bonheur des ogres. La saga Malaussène, c’est l’incarnation de cette idée.