Cyclisme

David van der Poel, frère aîné, frère de sang, frère d’armes… frère tout simplement

Interview de David van der Poel, le frère de Mathieu

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On va vous la jouer en mode Julien Lepers (ou Samuel Étienne, au choix) dans l’indéboulonnable émission télévisée " Questions pour un champion " : " Je m’appelle van der Poel, je suis cycliste professionnel, j’ai débuté par le cyclo-cross avant de passer sur la route, je parle aussi bien français que néerlandais, mon papa Adrie a remporté le Tour des Flandres et Liège-Bastogne-Liège, mon papi Poupou est monté huit fois sur le podium du Tour de France, je suis, je suis, je suis… attention il y a un piège… je suis David van der Poel ! "

David, c’est le grand frère de Mathieu. Il est l’aîné, relégué dans l’obscurité depuis des années mais avec beaucoup de lucidité. " Je connais mes qualités, je connais les qualités de Mathieu et c’est clair qu’il y a une grande différence ! " À bientôt 31 ans, il n’a remporté aucune course sur route chez les pros alors que Mathieu, qui a fêté ses 28 ans le 19 janvier, s’est imposé à… quarante reprises depuis ses débuts en 2015 !

David et Mathieu van der Poel sont inséparables puisqu’ils défendent les intérêts de la même structure professionnelle, Alpecin-Deceuninck.
David et Mathieu van der Poel sont inséparables puisqu’ils défendent les intérêts de la même structure professionnelle, Alpecin-Deceuninck. © David Stockman / BELGA

Thorgan Hazard est moins populaire que son frère Eden, Venus Williams a moins gagné que sa sœur Serena, le cadet des Gilbert, Jérôme, n’a jamais pu rivaliser avec Philippe, Seth Curry n’aura jamais pas la même aura que son aîné Stephen, Frank Schleck a un palmarès moins prestigieux que son frérot Andy… Bref, le sport de haut niveau regorge d’exemples plus ou moins similaires. Quoiqu’ils (elles) puissent chacun(e) en dire, ce n’est jamais évident de passer sa carrière dans l’ombre de son frangin ou de sa frangine. Un peu plus de talent, un peu plus de caractère, un peu plus de chance, un peu plus d’opportunisme… font que l’un(e) passe sa vie à recevoir des fleurs pendant que l’autre passe la sienne à ramasser les casquettes.

Au quotidien, David van der Poel a fait sienne la maxime " On ne sera toujours que la moitié d’un tout, mon frère ". Il est l’équipier de Mathieu dans la structure Alpecin-Deceuninck (NDLR : il porte le maillot de l’équipe de développement où il encadre les plus jeunes) et il est surtout son premier supporter ! Sur route et évidemment dans les labourés. À quelques heures de la course élites des Championnats du monde de cyclo-cross sur le circuit d’Hoogerheide, la ville natale de leur papa Adrie au sud des Pays-Bas, David, réserviste dans l’équipe néerlandaise ce week-end, s’est confié sur la relation si particulière qu’il vit avec son petit frère.

David, avez-vous l’impression de devoir votre contrat chez les professionnels à Mathieu ?

" S’il n’était pas lui-même coureur, avec un tel talent, carrière aurait peut-être été différente, c’est vrai. Être dans la même équipe, connaître le même environnement depuis si longtemps, partager tant de choses, c’est clairement spécial, ce n’est que du bonheur. Mais je ne dois regarder que ma situation. Si un jour, je n’ai plus le niveau, je devrai l’accepter. Réclamer une place juste parce que je suis le frère de Mathieu ne serait bon ni pour moi, ni pour l’équipe. "

Parfois, je me dis que ça doit être vraiment gai d’avoir ses jambes, d’avoir ses qualités, de pouvoir courir comme lui… Mais bon, ça ne sert à rien de comparer, ça ne changera rien à la situation. Mathieu a atteint un tel niveau, il doit suivre de tels plans d’entraînement que ça devient difficile de nous entraîner ensemble comme on le faisait toujours au début de nos carrières respectives.

Je cherche le bon mot : ressentez-vous un peu de jalousie ou du moins de l’envie ?

" Je ressens tout d’abord de la fierté mais pas de jalousie, non. En revanche, je reconnais qu’il y a de l’envie, oui ! Si je dois être battu, je préfère l’être par lui que par un autre (NDLR : l’an dernier, David a terminé deuxième du Grand Prix de la Ville de Grammont derrière… Mathieu). J’adore suivre à la télévision les courses auxquelles il participe. Regarder avec ou sans sa présence donne une autre dimension à l’épreuve. Parfois, en réfléchissant, je me dis que ça doit être vraiment gai d’avoir ses jambes, d’avoir ses qualités, de pouvoir courir comme lui… Mais bon, ça ne sert à rien de comparer, ça ne changera rien à la situation. Je dois rester concentré sur moi-même, essayer de faire le plus possible avec mes qualités et satisfaire mes employeurs. Vous savez, je sais ce que Mathieu doit faire pour avoir son niveau, les difficiles séances d’entraînement auxquelles il doit s’astreindre… et je serais incapable d’en faire autant ! "

On a ce sentiment que vous devrez toujours prouver un peu plus que vos collègues que vous méritez votre place…

" Je ne le ressens pas vraiment comme ça même s’il est clair que certains détracteurs le pensent. Moi, je connais très bien mes qualités et mes défauts. Je sais ce que l’équipe attend de moi et je suis convaincu qu’elle me conserve pour ce que je vaux et non parce que je suis le frangin de Mathieu. Il a atteint un tel niveau, il doit suivre de tels plans d’entraînement que ça devient difficile de nous entraîner ensemble comme on le faisait toujours au début de nos carrières respectives. "

Dans la maison de mes parents, il y a une chambre, dans laquelle, gamins, on regardait la télé et où on jouait aux jeux vidéo, qui a été transformée en petit musée avec nos différents maillots distinctifs, à Mathieu et moi. Les maillots de papa, eux, sont probablement au grenier…

Parler d’autres choses que du vélo

Comment Mathieu vous considère-t-il dans l’équipe ? Comme le grand frère ? Comme un équipier ?

" Il me voit surtout comme son frère, tout simplement ! Finalement, sur une saison, je ne participe pas à énormément de courses avec lui. Il apprécie, et c’est vice-versa, que je sois dans la même structure, qu’on puisse partager des choses sur le vélo. Mais on en parle peu. "

Et donc, vous parlez de quoi ? De la famille ? Des amis ? Du chien ? Des vacances ?

" Oui, comme tout le monde ! Il est évident qu’on parle pas mal de cyclisme mais pas uniquement. Mentalement, il faut éviter d’être toujours fixé sur la course. C’est tout bon de pouvoir parler d’autres choses sans penser au vélo. "

À eux deux, votre papa et votre frère ont été sacrés cinq fois champions du monde de cyclo-cross chez les élites. Où se trouvent tous ces maillots arc-en-ciel aujourd’hui ?

" Dans la maison de mes parents, il y a une chambre, dans laquelle, gamins, on regardait la télé et où on jouait aux jeux vidéo, qui a été transformée en petit musée avec nos différents maillots distinctifs, à Mathieu et moi (NDLR : David a notamment gagné deux fois les Championnats des Pays-Bas de cyclo-cross chez les espoirs et chez les juniors). C’est spécial. Les maillots de papa, eux, sont probablement au grenier… " (Il rit)

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