Economie

Débat autour de la TVA sur le livre : que payez-vous quand vous achetez un livre ?

© RTBF

Par Pierre-Yves Millet

C’est l’un des débats qui agite le petit monde de l’édition et de la librairie en Belgique en ce moment : celui de l’augmentation de la TVA sur le livre. Dans son projet de réforme fiscale, le ministre des Finances Vincent Van Peteghem propose de la faire passer de 6 à 9% (d’autres produits bénéficiant d’une TVA réduite aujourd’hui seraient aussi concernés).

Cette proposition s’est déjà attirée les foudres du syndicat des librairies francophones de Belgique, qui juge les conséquences "désastreuses". C’est maintenant au tour de la ministre de la Culture en Fédération Wallonie-Bruxelles de s’opposer fermement à ce projet. Interrogée par plusieurs députés en commission ce mardi, Bénédicte Linard estime que la hausse de la TVA serait dommageable pour les libraires indépendants mais aussi pour les lectrices et lecteurs qui verraient le prix du livre augmenter.

Le prix du livre pourrait-il augmenter ?

Si la TVA devait passer à 9%, les libraires seraient sans doute contraints de répercuter cette hausse sur le prix de vente du livre. "Ils ne pourraient pas assumer seuls l’augmentation de 3%" estime Benoit Dubois, le directeur de l’ADEB, l’association des éditeurs belges.

Il faut savoir qu’aujourd’hui, le prix du livre est unique, quel que soit l’endroit où on l’achète, en librairie, en grande surface ou en ligne. La seule variable, c’est la TVA. Plus de 70% des livres vendus en Belgique viennent de France, où la taxe est fixée à 5,5%. "En Belgique, c’est 6% actuellement. Cette différence de 0,5% n’est pas répercutée sur le prix. C’est donc déjà une perte pour les libraires. Passer à 9%, serait synonyme d’une augmentation forcée du prix du livre. Le lecteur paierait plus cher et le libraire belge serait moins compétitif. Personne n’y gagne, sauf l’Etat", explique Benoit Dubois.

Qui gagne quoi sur le prix du livre ?

Une augmentation de la TVA risquerait surtout de fragiliser toute la chaine du livre, "un marché qui se tasse d’année en année." C’est ce que craint un secteur où les marges bénéficiaires sont réparties entre de nombreux acteurs et globalement assez faibles.

Premier maillon, indispensable, de cette chaine, c’est bien entendu l’auteur. "Il touche des royalties, des droits d’auteur en quelque sorte", explique Benoit Dubois. "En général, c’est un pourcentage entre 8 et 10% du prix de vente du livre. Certains écrivains à succès parviennent à négocier 15%, mais c’est l’exception".

Vient ensuite l’éditeur. Il perçoit 35% du montant du livre. Avec ce pourcentage, il doit assumer les coûts de fabrication du livre (environ 18%) et la promotion de l’ouvrage (5%). "Ce sont des frais que l’éditeur engage, avant d’avoir touché le moindre euro. A la fin, il lui reste en réalité 12% du prix du livre pour ses propres frais de fonctionnement et son bénéfice".

"L’auteur et la maison d’édition sont les 2 acteurs qui prennent le plus de risques", estime le directeur de l’association des éditeurs belges. Ce sont aussi ceux qui gagneront le plus en cas de succès.

Une fois le livre publié, deux autres intermédiaires interviennent, le diffuseur et le distributeur. "Le premier assure la commercialisation du livre auprès des libraires et des différents points de vente, pour environ 7%. Le second prend en charge la logistique et le transport, des coûts qu’on estime à 11% du prix de vente d’un livre."

Au bout de la chaine, le libraire

Enfin, c’est le libraire qui prend la marge la plus importante, entre 35 et 38%. "Cela peut paraitre beaucoup, mais en réalité, c’est très peu", tempère Benoit Dubois. "Souvenez-vous que le prix est unique, en moyenne, 16-17€. Il est fixé par l’éditeur. Le libraire n’a donc pas la possibilité de le vendre plus cher, sauf pour répercuter la TVA, qui revient à l’Etat. Le pourcentage est donc appliqué sur le prix de vente public HTVA. Avec cette somme, il doit payer son loyer, ses frais fixes et ses employés. En réalité, il lui reste entre 1 et 2% de son chiffre d’affaires total. C’est sans doute l’une des marges bénéficiaires la plus faible dans le secteur du commerce au détail", conclut le représentant des éditeurs belges.

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