Bruxelles

Des artistes et des figurants dénoncent les conditions de tournage d’un clip de Stromae

Le tournage du clip de la chanson "Fils de Joie" de Stromae fait l’objet de critiques

© Michael Ferire

C’était au mois de janvier. La température hivernale frigorifiait les centaines de danseurs, danseuses et figurants présents au parc du Cinquantenaire pour le tournage du clip de la chanson "Fils de Joie", extraite de "Multitude", le dernier album en date de Stromae.

150 euros pour 5 jours

La semaine passée, sur sa page Facebook, une danseuse ayant participé au tournage (elle l’a quitté après deux jours, dégoûtée), poste le texte suivant, adressé au chanteur :

"Toi qui défends des valeurs de justice sociale, pourquoi avoir choisi Abyssal production qui ne semble même pas se préoccuper de rémunérer décemment les travailleur.euses de la culture ?

Est-ce vraiment cohérent ?
150€ pour 5 jours de travail (répétitions, essayage et tournage en extérieur).
Contrats, conditions et charges de travail révélées après le résultat du casting.
Mail de planning reçu la nuit ou en dernière minute.
Mépris et manque de professionnalisme de la part de l’organisation et des chorégraphes pour les danseur.euses.
Sans parler des gaufres en guise de catering.." […]
 
A notre micro, la jeune femme confirme ses propos. "On connaissait les jours de tournage, mais pas les jours de répétition. Donc pour quelqu’un qui travaille – il y avait des profs, il y avait un peu de tout…- c’était très incertain de savoir comment s’organiser pour cette semaine, "est-ce que je vais devoir annuler des cours", etc. Au départ, il s’agissait d’un projet rémunéré et quand on a appris qu’il s’agissait de 150 euros pour les cinq jours, on était déjà un peu engagé dans le projet. […] On attendait une rémunération. Pour moi, une rémunération, c’est un contrat de travail, ce n’est pas un défraiement. Si on veut offrir 150 euros pour un tel travail, c’est ok dans certains cas. Si le projet fait appel au bénévolat, alors là, oui."

Des figurants immobiles dans le froid

Cécile n’est pas danseuse mais figurante. Pour sa participation au clip, elle a perçu un défraiement de 60 euros par jour. Rien d’incorrect à ce niveau, a priori du moins. Par contre, Cécile et les autres figurants ont souffert le martyre sur le tournage. "Ça implique une très grande disponibilité puisqu’on devait être là à partir de 6 heures du matin et globalement, la journée se terminait vers 17 heures. Et ça deux jours de suite. Le souci, c’est quand on se rend compte de ce que ça demande en termes de temps, de disponibilité, d’énergie, et là, en l’occurrence, de condition physique, puisque le tournage s’est déroulé au mois de janvier et qu’il faisait à peu près 1°C mais ressenti moins 2, sachant qu’on ne bougeait pas. Ça veut dire qu’on reste sur des scènes le temps que les caméras passent, en tant que public on était statique. C’était extrêmement difficile."

Une rémunération indécente

Bien au fait des pratiques du milieu culturel, Pierre Dherte est le président de l’Union des Artistes. Il ne mâche pas ses mots envers la société de production. "150 euros pour 5 jours, on rentre ici dans des conditions qui ne sont pas des conditions financières décentes, ni même recevables, acceptables d’emploi artistique mais de simple défraiement. Et on entend parler d’une gaufre ou de quelques gaufres en guise de catering sur une journée, tout ça ne rentre pas dans les normes réglementaires de ce qu’on fait habituellement et de ce qui s’applique habituellement. 30 euros par jour, on est bien évidemment en dessous du salaire journalier légal en vigueur… C’est tout à fait irrecevable".

Nous avons bien entendu appelé le responsable de la société de production "Abyssal". Il n’a pas souhaité s’exprimer publiquement.

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