La CNIL a été saisie par les Conférences des grandes écoles et des présidents d’universités à la suite de ce qu’on appelle l’arrêt Schrems II. Un arrêt qui porte le nom de l’activiste autrichien Maximilian 'Max' Schrems. L’homme s’était d’abord fait connaître en 2011 en demandant à Facebook toutes les données le concernant (plus de 1200 pages). Quelques années plus tard, en 2015, il obtient, à travers l’arrêt Schrems I, l’invalidation auprès de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) de l’accord Safe Harbor, un accord qui permettait à des sociétés américaines le transfert de données personnelles de leurs clients européens vers les Etats-Unis. Enfin, au mois de juillet 2020, il obtient de la même CJUE, l’arrêt Schrems II et l’invalidation du Privacy Shield, un autre accord permettant le transfert des données personnelles entre l’UE et les Etats-Unis, jugé trop peu protecteur face aux programmes de surveillance américains.
Le Juriste spécialisé en droit des Technologies de l’Information et chercheur à l’UNamur, Florian Jacques, nous rappelle ce qui se trouve dans l’arrêt Schrems II. La CJUE dit : "très clairement, le fait que les données à caractère personnelles soient utilisées par les agences de renseignement américaines dans le cadre de programmes de surveillance, c’est une atteinte aux droits fondamentaux. Et, est-ce qu’il existe suffisamment de recours pour le citoyen européen dans ce cas-là ? La réponse est non. La CJUE dit que le droit américain ne confère pas pour les citoyens européens de saisir une juridiction américaine et que les mécanismes en place ne peuvent être assimilés à un tribunal indépendant et impartial". La CJUE précise aussi que les transferts des données personnelles sont contraires au RGPD, sauf si des mesures supplémentaires sont mises en place ou que les transferts sont justifiés par des dérogations prévues par le RGPD.
Florian Jacques précise : "à la sortie, la CJUE laisse entendre qu’en l’état, sauf exception (transferts de données réalisés dans des situations dérogatoires où le transfert est nécessaire), le droit des Etats-Unis, ne permet pas un niveau de protection équivalent (au cadre européen) et donc il faut partir du principe que le transfert ne devrait pas se faire sans consultation d'une autorité de contrôle".
La CNIL, dans son avis, rappelle les conséquences de l’invalidation du Privacy Shield : "Si la CNIL et ses homologues continuent d’analyser toutes les conséquences de cette décision, les organismes publics et privés, français et européens, doivent d’ores et déjà respecter ces nouvelles règles en privilégiant des solutions respectueuses du RGPD, notamment quand ils ont recours à des solutions d’informatique en nuage (cloud computing)".
Et Florian Jacques d’ajouter : "parce que même en l’absence de transfert de données, le droit des Etats-Unis permet de requérir d’une société américaine ou de ses filiales d’accéder à des données qu'elles détiennent". Le Juriste spécialisé en droit des Technologies de l’Information parle ici du Cloud Act.
Notons qu’à l’heure d’écrire ces lignes, nous n’avons pas réussi à joindre l’Autorité de protection des données en Belgique afin de vérifier s’il existe un avis similaire dans le Royaume.