La truffe au vent, Smokey le berger malinois de 7 ans renifle avec attention les berges de la Semois. Il cherche des excréments (épreintes) de loutres. Pour remplir sa mission, il a parcouru de nombreux kilomètres puisqu’il est venu de Flandre avec sa maîtresse. Ellen Van Krunkelsven est biologiste et maître chien. Elle entraîne Smokey depuis ses 5 mois à détecter ce type d’excréments. "Le chien facilite les recherches. Il a un odorat beaucoup plus développé que le nôtre. C’est une aide précieuse surtout dans les accès complexes. Le chien est agile. Il se faufile".
Une équipe d’une petite dizaine de personnes, les yeux rivés au sol cherche la preuve de la présence du mustélidé. Cela fait une vingtaine d’années qu’aucune loutre ni trace n’ont été observées dans la vallée de la Semois. "On la pensait disparue. Mais en juin 2022, des recherches d’ADN dans l’eau de la Semois ont permis d’établir avec certitude sa présence sur trois zones" explique Antonio Ramirez, chargé de mission environnement au Parc Ardenne Méridionale.
Pour les scientifiques, ces recherches sont très importantes à plusieurs niveaux. "Si on trouve une épreinte de loutre, cela permettra de la localiser plus précisément. On pourra plus cibler nos actions de restauration de l’environnement. Et puis aussi, on estime la population totale sur les 210 kilomètres de Semois entre 5 à 10 individus. On craint une forte consanguinité. Si on trouve des excréments, on pourra analyser l’ADN et déterminer si la population est en bonne santé ou pas".
La loutre est un animal difficile à observer : discret et nocturne. Il est également très mobile et parcours entre 5 à 40 kilomètres par jour. Des pièges photographiques ont été placés le long du cours d’eau. Si de nombreux animaux se sont vus tirer le portrait, dame loutre n’a pas daigné montrer son joli minois. Les scientifiques sont bien conscients que leurs recherches ont peu de chance d’aboutir, mais "on se lève le matin avec l’espoir de trouver". Pour augmenter les chances d’aboutir, des zones clefs sont fouillées. "Les ponts sont des lieux qu’elles aiment marquer, les confluences, les îles, les lieux où de gros objets comme des troncs d’arbres sortent de l’eau".
Dans les personnes présentes, le biologiste Corentin Rousseau du WWF. "On mène des actions de restauration de l’environnement. Pour la loutre, ça peut être planter des arbustes en bord de cours d’eau pour qu’elle puisse s’y cacher, restaurer des frayères pour les poissons pour qu'elle trouve plus de nourriture. Sous les ponts, on peut également recréer une berge artificielle pour faciliter son passage. La loutre n’aime pas nager sous les ponts bas et sombres. Elle préfère traverser à sec. S’il n’y a pas de berge, elle traverse la route et risque de se faire écraser".
Les recherches avec le berger malinois vont cibler diverses zones clefs entre Chiny et Vresse durant deux jours (les 9 et 10 février 2023). Le 16 mars, de nouvelles recherches seront lancées, cette fois uniquement avec une équipe de bénévoles.