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Didier Lamkel Zé (Courtrai) sur le Gril : "J'ai besoin de me sentir aimé"

Sur le Gril

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Didier Lamkel Zé (Courtrai) en mode selfie
Didier Lamkel Zé (Courtrai) en mode selfie © Tous droits réservés

Il ne laisse personne indifférent. Surdoué du ballon, il fait le buzz partout où il passe, trahi par sa désarmante sincérité… ou son incomparable sens de la polémique. Le médian camerounais de Courtrai évoque la tactique, Didier Drogba, son image d’enfant terrible, Ronaldinho, les clans de vestiaire, Yannick Bolasie, le coup du sombrero et Alexis Saelemaekers. Mais aussi le sens du show, Laszlo Bölöni, la presse anversoise, Dieumerci Mbokani, les hypocrites, la Seleçao brésilienne et le maillot d’Anderlecht. Et bien sûr… les Brasseries du Cameroun. Didier Lamkel Zé (Courtrai) passe " Sur le Gril ".

Clap de fin : Didier Lamkel Zé ne jouera plus pour Courtrai, il ne prestera plus en Belgique. Depuis la tenue de cet interview, le jeudi 3 novembre dernier au Stade des Eperons d’Or, le Camerounais s’est fait écarter de la sélection du KVK. Après avoir révélé son probable départ, au prochain mercato hivernal, vers Ferencvaros (Hongrie), Lamkel Zé aurait aussi " manqué au règlement disciplinaire " de son club actuel (dixit le KVK). Le coach flandrien Adnan Custovic a donc décidé de ne plus le sélectionner. Rien pourtant ne laissait supposer de tels développements lors de notre rencontre…

J’aime bien les interviews, ça me permet de me livrer et de montrer aux gens qui est le vrai Didier " explique Didier Lamkel Zé en s’installant, sourire banane, dans un local du stade flandrien. " Mais c’est vrai que mes paroles sont souvent déformées et les gens ont, du coup, une image faussée de moi, celle d’un type qui créé des problèmes… C’est comme ça, je ne peux rien y faire… Alors qu’en vrai, je suis un simple joueur de foot, qui aime se faire plaisir et donner du plaisir au public. J’ai appris ça au Cameroun : il faut faire le show, pour mes supporters… mais aussi pour les supporters adverses ! C’est un truc que j’ai pris de Ronaldinho (sic), qui était mon idole de jeunesse : faire du spectacle ! Depuis que je suis ici à Courtrai, tout se passe bien : ce club m’a accueilli chaleureusement, mes équipiers sont charmants et personne ne se plaint de moi. Un kiné me disait encore la semaine dernière qu’il ne me reconnaissait absolument pas par rapport à la réputation qui me précédait... "

"Comme si j’avais tué quelqu’un…"
"Comme si j’avais tué quelqu’un…" © BELGA

"Comme si j’avais tué quelqu’un…"

Les malheurs du Camerounais viennent principalement de son passage à l’Antwerp, où il a passé quatre saisons... contrastées – doux euphémisme.

" Il y a eu beaucoup de malentendus, et ils ont été montés en épingle par la presse d’Anvers. Je ne parlais pas le flamand, il y avait des clans au sein du vestiaire : chacun mangeait à des tables différentes, les Flamands, les Francophones, les Africains… Des joueurs allaient parler dans mon dos auprès de leurs copains journalistes, qui ont vraiment sali mon image. Dès qu’on parlait de moi, c’est comme si j’avais tué quelqu’un (sic) : il est donc temps que je me fasse oublier en Belgique et que j’aille voir ailleurs. (NDLA : C’est là qu’il nous révèle son prochain départ vers Ferencvaros). Mais mes deux premières années à Anvers étaient top ! J’ai aimé ce club, j’ai aimé ce public et c’est là, avec un coach comme Laszlo Bölöni, que j’ai appris à défendre. Parce que sinon, je le reconnais, le foot pour moi, c’est d’abord attaquer et marquer des buts. J’ai toujours joué dans des équipes de possession : ici à Courtrai, on est dans la zone rouge et il faut se battre pour le maintien… On fait le gros dos, on balance de longs ballons : ce n’est pas le foot que j’aime, mais je m’adapte. "

"Avec de l’amour, tu fais des merveilles..."
"Avec de l’amour, tu fais des merveilles..." © BELGA

"Avec de l’amour, tu fais des merveilles..."

C’est à Anvers que le football belge a découvert le styliste Didier Lamkel Zé : un jeu chaloupé, fait d’imprévisibilité et de coups de génies. Avec son compère Dieumerci Mbokani.

Dieu est évidemment le meilleur joueur avec qui j’ai joué : un attaquant comme pareil te rend le foot si facile ! (sic) Le voir en D1B avec Beveren est un peu choquant… car il aurait encore facilement sa place au sein de l’élite. Mais que voulez-vous, il est vieux ! (clin d’œil) On est encore en contact, c’est lui qui m’a conseillé de quitter définitivement l’Antwerp, où ça n’allait plus... Moi, je suis un joueur qui marche à l’affect et à la confiance : j’ai besoin de me sentir aimé ! Si tu ressens de l’amour, tu peux faire des merveilles ! (sic) Au début, à Anvers, c’était comme ça… puis ça a changé. Des joueurs comme Abdoulaye Seck, Alexis De Sart, Dorian Dessoleil et moi, on a été mis en réserve du jour au lendemain : on t’utilise… puis on te jette ! " (sic)

"Le maillot d’Anderlecht par provocation"
"Le maillot d’Anderlecht par provocation" © BELGA

"Le maillot d’Anderlecht par provocation"

Vient alors le fameux épisode de janvier 2021 : en plein mercato hivernal, Didier Lamkel Zé débarque au Bosuil… vêtu d’un maillot d’Anderlecht ! Décryptage du hors-texte.

Moi, du temps d’Ivan Leko, je voulais partir… et je le lui ai dit : du coup, il ne comptait plus sur moi, il ne m’a pas repris, c’est logique. Puis Monsieur Lucien (NDLA : D’Onofrio) est intervenu car l’Antwerp perdait tous les matches amicaux de l’été… et j’ai joué la finale de la Coupe contre Bruges. Après cela, j’ai joué contre Gand, coaché par Bölöni, qui m’a proposé de le rejondre. Mais l’Antwerp a refusé… Après cela, retour en réserve : pendant 4 mois, personne du club n’a pris de mes nouvelles ! A l’approche du mercato, on m’a demandé de me trouver un club, j’ai trouvé un accord avec le Panathinaikos. Puis Leko est parti en Chine… et l’Antwerp n’a plus voulu me libérer : ‘Tu joues chez nous ou on te bloque !’ Je leur ai dit : ‘OK, vous allez voir, je vais mettre le brin’… et c’est là que j’ai débarqué au club avec ce maillot d’Anderlecht. Je les avais prévenus que ça allait faire un tollé sur les réseaux sociaux, ils ne m’ont pas cru… Après, on a trouvé une solution… "

© BELGA

LES PETITS PAPIERS

Le moment venu des petits papiers : parmi une quinzaine de papiers-mystères, il en choisit 5 au hasard. Et commente.

PAPIER 1 : HYPOCRITES (Il grimace) " Des hypocrites, il y en a quelques-uns dans le monde du foot… En apparence, en foot, on vise tous le même objectif. Mais derrière, ça se donne des balles… (sic) En football, il ne faut pas trop vite donner sa confiance. A l’Antwerp, tout le monde rigolait avec toi en ta présence… mais derrière ton dos, on te tuait (sic). Des joueurs allaient dire du mal de moi à Bölöni, mais lui voulait que tout soit dit au sein du vestiaire… et là, plus personne ne parlait. Le coach n’aimait pas toutes ces hypocrisies. En football, c’est toujours comme ça : ceux qui prennent la parole et disent ce qu’ils pensent sont détestés. Samuel Eto’o a vécu ça, Emmanuel Adebayor aussi… Aujourd’hui, je me fous de ce qu’on pense de moi. Les seules personnes qui comptent pour moi, elles connaissent le vrai Didier. " (sic)

PAPIER 2 : ANDERLECHT. J’y ai fait un test quand j’avais 15-16 ans, c’est d’ailleurs là que j’ai vu la première fois Mbokani. Cette semaine-là, j’ai aussi assisté au dernier match des Play-Offs, décisif pour le titre, contre Zulte Waregem. J’ai réussi ce test mais Anderlecht ne pouvait pas me faire signer avant mes 18 ans… Alors, j’ai signé une convention avec le LOSC, à Lille. J’aurais rêvé de signer à Anderlecht, car c’était vraiment le grand club de l’époque, chaque année en Ligue des Champions… pas comme maintenant ! (sic) Quand j’étais petit, je ne rêvais pas de clubs comme Barcelone ou le Real, comme tout le monde… Je rêvais plutôt de Dortmund, de Leicester, de Nice ou de Monaco… A Leicester, j’aimais bien les fans… et la manière dont les lignes du terrain étaient tracées (sic). A Monaco, c’est parce que j’avais un ami qui y jouait et on s’est juré d’y jouer ensemble un jour…  La meilleure décision de ma carrière ? (Il réfléchit) D’être parti en prêt à Metz : mes amis me titillaient sur le niveau du championnat en Belgique, alors je leur ai prouvé que je pouvais aussi marquer des buts en France. Même si, je l’avoue, on court beaucoup en Belgique… alors qu’en France, c’est le ballon qui court ! " (sic)

Avec son coach à Courtrai Adnan Custovic
Avec son coach à Courtrai Adnan Custovic © BELGA

"Le meilleur joueur du Cameroun ? Moi !"

PAPIER 3 : QATAR. Ah, la Coupe du Monde… (Ses yeux s’écarquillent) Le sélectionneur Rigobert Song m’a envoyé un mail, je suis dans sa pré-sélection et je me donne 50% de chances d’être au Qatar. (NDLA : Au final, il ne figure pas dans la sélection divulguée ce jeudi soir...) Dans 4 ans, j'aurai 30 ans, ce sera un peu vieux… C’est un rêve d’enfant… Si je ne suis pas repris, ce sera une année gâchée pour moi… mais je vais rester debout (sic) et je continuerai à bosser. Le meilleur joueur du Cameroun ? C’est moi évidemment ! (Son visage reste sérieux) Si je disais autre chose, je ne croirais pas en moi... Mais il y a d’autres fameux joueurs chez nous comme Vincent Aboubakar… On a une très bonne équipe, tous les espoirs sont permis… même si notre groupe est difficile (NDLA : Brésil, Suisse, Serbie). Pour moi, les 3 favoris pour la victoire finale sont le Brésil, l’Argentine et l’Allemagne. Mais l’Afrique a aussi ses chances : le Sénégal est très fort ! (NDLA : l’interview a été réalisée avant le forfait de Sadio Mané) La Belgique ? Pourquoi pas ? Je connais bien Alexis Saelemaekers, vous avez de très bons joueurs ! "

PAPIER 4 : LASZLO BÖLÖNI. Un grand coach, très dur, mais qui nous transmettait la rage de vaincre. Pour lui, tout ce qui comptait, c’était de gagner… quel que soit le moyen ! Mbokani était son petit protégé (sic), c‘est vrai, mais c’est parce qu’il savait que c’était un joueur de classe. Il nous disait : ‘Balancez les ballons sur Dieu, et il fera le reste !’ Bölöni est une très bonne personne : comme je l’ai dit, il m’a appris à défendre. Même si ce n’est pas trop mon truc… " (sourire)

Avec Laszlo Bölöni à l'Antwerp
Avec Laszlo Bölöni à l'Antwerp © BELGA

PAPIER 5 : SHOW. (Il sourit) " Le show, ça fait partie du foot : sans spectacle, le foot serait ennuyeux… Le foot, c’est les cris, les spectateurs, l’ambiance du stade : c’est pour voir quelque chose que les gens viennent au stade. (sic) Mon grigri préféré, c’est le coup du sombrero : j’en fais, et le coach l’accepte car il sait que mon jeu est fait de ça. Après, ce qui compte c’est la réaction derrière : si ça rate, tu dois t’arracher pour récupérer le ballon. Il y a des coaches qui veulent des joueurs formatés, il y en a d’autres qui laissent les joueurs libres. Les coaches qui m’ont bien cerné ont pigé qu’il fallait me laisser faire mon truc. Pour les équipiers, c’est pareil : s’ils constatent que tu leur fais gagner le match, ils oublient tout… (sic) Si je dois trop défendre, je ne peux plus créer : il faut me laisser libre dans ma tête… " (sic)

"Dans 3 ans, je signe au Qatar…"

Formé à l’Académie des Brasseries du Cameroun (" C’était un sport-études adossé à cette usine de bières et de jus… mais non, on ne buvait pas de bière ! "), Didier Lamkel Zé va donc devoir se trouver un club…

Je suis croyant, je prie Dieu chaque jour et je ne m’inquiète pas trop… Je m’inspire de Didier Drogba qui a aussi percé sur le tard et dont j’admirais le sens de la finition. Ronaldinho, Pierre-Emerick Aubameyang et Yannick Bolasie m’ont aussi toujours inspiré. Quand Bolasie jouait à Anderlecht, j’ai même demandé à Mbokani de me mettre en contact avec lui : j’aimais bien ses dribbles à Crystal Palace. Aujourd’hui, je laisse venir. Au départ, mon père ne voulait pas que je fasse du foot… puis il a changé d’avis, mais là ç’a été ma mère qui ne voulait plus. Au final, j’ai tout misé sur le foot. Aujourd’hui, je me donne encore 3-4 ans en Europe, puis ce sera le Qatar ou l’Arabie Saoudite. Pour l’argent, oui… Pour mettre ma famille à l’abri… "

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