Climat

"Donne ta voix pour le climat" : un rapport et des recommandations rédigés par des centaines de jeunes envers les politiques

Par Miguel Allo sur base de l'invité dans l'Actu sur la Première via

"Ils ne jouent pas leur rôle !". "C’est du greenwashing encore, on en a marre." "Un pas en avant, trois pas en arrière, c’est la politique du gouvernement. Ça fait des années qu’on essaye que les choses changent par des manifestations, par des actions, etc., et les partis bougent, mais les mesures ne sont pas là et rien ne change alors que de plus en plus de scientifiques disent que c’est la merde."

Donne ta voix pour le climat

Ces phrases sont extraites du podcast "Après nous les mouches" de notre journaliste Myriam Baele. Et on peut les résumer par : les faits sont là, mais pas les actions et ils en demandent. Ils se sont 550 jeunes de la Fédération Wallonie-Bruxelles qui ont pu donner leur avis sur les politiques climatiques. "Donne ta voix pour le climat" était le nom de cette consultation. De leurs échanges et discussions, il en est sorti 85 recommandations envers les politiques. Leur rapport final sort aujourd’hui.

Des recommandations qui arrivent, notamment après les marches pour le climat. L’idée était "de récolter d’abord les peurs pour identifier ensuite les problèmes et puis des solutions", précise Lino Paoletti, délégué à l’Organisation des Nations unies (ONU) pour la biodiversité au Forum des jeunes qui a participé à l’élaboration de tout ce projet. Au niveau des peurs, dit-il, "le constat est quand même sans appel. "Il y a une phrase qui ressort dans la consultation où une jeune fille dit que nos perspectives d’avenir sont terriblement sombres et qu’on n’a aucune idée de ce à quoi le monde va ressembler dans 50 ans".

Pour celui qui a participé à l’élaboration de tout ce projet, cela reflète "vraiment pas mal l’éco-anxiété" qui guette de nombreux jeunes et moins jeunes en ce moment.

Intégrer les enjeux climatiques dans la formation scolaire

Cette crainte ne se limite pas aux émissions de gaz à effet de serre, puisque les recommandations des jeunes touchent également l’alimentation, l’appauvrissement des terres, la perte des forêts. Et, l’un des messages clés, c’est aussi d’intégrer les enjeux climatiques dans la formation scolaire.

Lino Paoletti rappelle qu’il y a effectivement les enjeux environnementaux de manière plus large : la biodiversité, la pollution, le cycle de l’azote, le cycle du phosphore, le cycle de l’eau. Et il y a une vraie demande de la part des jeunes qui se rendent bien compte qu’il y a une légère dissonance entre la situation actuelle et comment sont formés les élèves dans leur parcours scolaire.

Et dans ce contexte, le Forum des jeunes avec l’équipe environnement, est en train de lancer une autre consultation sur l’éducation relative à l’environnement. L’objectif est de déterminer quel type de programme et sous quelle forme il pourrait s’intégrer dans le parcours scolaire. "Et ça", dit-il, "ça concerne l’éducation formelle, mais aussi l’éducation non formelle finalement, puisqu’il y a aussi cette problématique, au-delà de comprendre comment fonctionnent, par exemple les gaz à effet de serre, il y a aussi cette problématique de vouloir peut-être essayé de se reconnecter un peu au vivant".

"L’écologie sans justice sociale, c’est du jardinage"

Un thème transversal revient dans chaque domaine, c’est celui de la justice sociale. L’enjeu aussi pour les plus démunis. Pour Lino Paoletti, ce slogan a fait son chemin. "Donc l’écologie sans justice sociale, c’est du jardinage. C’est vraiment cette idée qu’on se rend bien compte qu’il y a des inégalités déjà aujourd’hui dans les conséquences du réchauffement climatique, que ce soit entre les pays, au sein des pays."

Présent également dans les recommandations des jeunes, des réflexions autour bâtiment ou du logis. "Le fait qu’il y ait des bâtiments vides alors que des gens dorment à la rue, ça questionne beaucoup. Le fait qu’on gaspille 30% de notre alimentation de ce qu’on produit alors que des gens meurent encore de faim. En Belgique, on a 600.000 personnes qui ont besoin de l’aide alimentaire."

Pour le délégué à l’Organisation des Nations unies (ONU) pour la biodiversité au Forum des jeunes, ces injustices sociales se cristallisent avec les crises actuelles "et donc qu’on n’a pas envie de régler une seule crise pour empirer les autres. On a envie de prendre à bras-le-corps toutes ces questions".

La question de la représentation

Tous les jeunes répondent-ils dans ce sens ? Les jeunes ayant participé à cette consultation sont en principe déjà convaincus, engagés. Peut-on dès lors dire que c’est là la voix de tous les jeunes ? "Non" répond Lino Paoletti, mais il précise qu’il y a eu pratiquement une moitié des répondants qui ont répondu en ligne. Une enquête en ligne qui a demandé à des jeunes de faire l’action, un effort de leur propre chef. Des jeunes que l’on peut donc imaginer plutôt engagés.

"Mais l’autre moitié des répondants était aussi imposée par des structures dans des écoles ou autres, des mouvements de jeunesse. Et donc là, on a bien vu qu’on avait une diversité de réponses un peu plus diverses. Justement, on n’était pas que sur des jeunes engagés. On voyait bien que parfois – pas qu’il y avait des incohérences, mais des enjeux qui sont complexes à saisir. Et donc des jeunes qui ont répondu aussi, même s’ils n’étaient pas spécialement engagés."

Des recommandations compatibles avec le mode de vie actuel ?

Nous vivons dans une société de désirs plutôt que de besoins, c’est ce qui ressort également du rapport. Mais est-ce compatible avec le mode de vie actuel, avec un téléphone portable en main ou en achetant sur des plateformes en ligne ?

 

Lino Paoletti, confirme et explique qu’il est même difficile parfois de vivre cette forme de dissonance. "Et donc, c’est là qu’en fait, on peut vraiment faire la différence entre les changements individuels qui sont nécessaires, mais insuffisants, et les changements structurels dont on a vraiment besoin".

Celui qui participé à l’élaboration du projet "Donne ta voix pour le climat" rappelle qu’avec cette consultation on sait ce qu’il faut faire, "mais il faut mettre des changements politiques ambitieux en place, donc des changements structurels. Par exemple, les smartphones, vivre sans aujourd’hui, décider de s’en passer, c’est quand même fort compliqué. Par contre, mettre en place une politique de lutte contre l’obsolescence programmée, mettre en place une économie circulaire qui va faire qu’on les réutilise de plus en plus et qu’on les garde 10 ans au lieu de seulement 2 ans parce qu’ils sont plus à la mode. Là, par contre, ça devient intéressant."

Ce rapport sera présenté ce jeudi 21 avril à 18 heures, au centre l’Ilon à Namur avec le ministre Henry. Reste à voir, se dit Lino Paoletti à quel point cette consultation et les recommandations des jeunes sont intégrées dans l’actualisation du plan climat énergie de la Région wallonne. "Et à partir de là, on peut faire un peu notre lobbying politique du côté des jeunes pour voir si, de fait, les jeunes ont été écoutés ou non."

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