Liège

Dossier Inondations : le budget catastrophe des 9 communes liégeoises les plus sinistrées

Inondations : le budget catastrophe des 9 communes liégeoises sinistrées les plus touchées (ici, Verviers)

© RTBF

Décembre, c’est l’époque où les communes établissent leur budget annuel. Pour celui de 2022, les inondations de juillet ont largement compliqué l’exercice. Il a d’abord fallu engager du personnel pour porter secours à la population. Ensuite, il a fallu organiser des repas, acheter du matériel de première nécessité, dégager les déchets. Aujourd’hui, le chantier de reconstruction après la catastrophe est énorme.

Et les communes doivent évaluer l’ampleur des dégâts et le coût des réparations : entretien de voiries, rénovation de bâtiments, aménagements des berges…


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Heureusement, plusieurs sources de financement existent. En plus des assurances, le fonds des calamités, le Fédéral, la Région, la Province et la Croix-rouge participent aux frais. Mais ce ne sera pas suffisant. Les communes liégeoises lourdement touchées par les inondations ont établi un budget de crise pour s’adapter à la situation.

TROOZ dans la tourmente : des dégâts pour plus de 10 millions d’euros, plus que tout le budget annuel !

Avec Limbourg et Pepinster, Trooz fait partie des trois communes prioritaires les plus sinistrées.

A Trooz, les stigmates des inondations sont encore très visibles. La commune s’emploie toujours à évacuer les déchets. Avec Limbourg et Pepinster, elle fait partie des trois communes prioritaires les plus sinistrées. A Trooz, 55% des habitants ont été victimes des inondations : 4700 personnes sur environ 8300.

Une commission priorité 2022 examine les travaux à effectuer et leur impact sur les finances. Mais le budget n’est pas finalisé. La commune fonctionnera en "douzième provisoire". Mais le budget en personnel a déjà explosé. Des intérimaires ont dû être engagés par exemple, pour des services de gardiennage. Pour rassurer la population qui craignait les vols, ils patrouillaient dans des zones sinistrées sans éclairage.

La commune espère obtenir une aide en personnel de niveau 1 pour renforcer les employés communaux qui gèrent toujours la crise. Et il y a beaucoup à refaire : berges, poteaux d’éclairages, écoles, terrains de foot…

Le bourgmestre, Fabien Beltran estime entre 11 et 12 millions la somme nécessaire pour réparer les dégâts. Un montant colossal pour une petite commune qui tourne avec un budget annuel de moins de 10 millions d’euros !

PEPINSTER Reconstruction : un budget réaliste impossible à évaluer

Autre commune particulièrement ravagée par les inondations, Pepinster aussi aura recours au douzième provisoire pour financer la commune début 2022. Selon son bourgmestre, Philippe Godin, il n’est pas possible à l’heure actuelle d’évaluer les dommages et les interventions des compagnies d’assurances pour proposer un budget qui tient la route.

D’autant plus qu’à cause du covid, la commune s’attend à une diminution des rentrées de l’impôt sur les personnes physiques. Et c’est sans compter sur la baisse de revenus issus du précompte immobilier : des dizaines de maisons ont été détruites et plus encore sont inoccupées ou inoccupables. Il faut également pouvoir estimer la dotation de la Région wallonne en matière de relogement.

Bref, la commune s’attend à une année difficile vous l’aurez compris, avec comme priorités la rénovation de l’administration communale et de tous les halls et terrains sportifs qui ont été saccagés par les inondations.

Pepinster
Pepinster © RTBF

LIMBOURG beurrerie Corman à l’arrêt : une perte d’un million d’euros de taxes et revenus

Au niveau du personnel, les dépenses de la commune ont augmenté de presque 6% à cause des inondations. Et à Limbourg, sur les 5,3 millions d’euros de budget extraordinaire de 2022, plus de 3 millions d’euros sont prévus pour la reconstruction des voiries et des bâtiments publics. Notamment le pont Vesdray, à Goé.

Beaucoup ont déserté la commune

La commune craint aussi une importante perte de revenus l’année prochaine. 1000 ménages sur 2500 ont été sinistrés à Limbourg. "Beaucoup ont déserté la commune" explique la bourgmestre Valérie Dejardin.

La beurrerie Corman est aujourd’hui toujours à l’arrêt.

La bourgmestre s’inquiète aussi de la perte de recettes issues des entreprises. Parmi elles, la beurrerie Corman aujourd’hui à l’arrêt. Un gros manque à gagner pour le budget communal : Limbourg estime à environ un million la perte de revenus sur un budget d’un peu plus de 8 millions.

ESNEUX La commune doit puiser un million d’euros dans ses réserves budgétaires

A Esneux, 22% de la population ont été victimes des crues dont 12% très fortement. Plus de 500 personnes ont dû quitter leur logement. L’échevin des finances, Pierre Georis parle d’"un budget d’après crise" mais concède qu’il est difficile d’avoir une vision claire sur les estimations. Les bâtiments communaux ont beaucoup souffert des inondations comme l’escale, l’Amirauté, l’Office du tourisme, la crèche communale de Mery…

Le camping de Méry à Esneux ravagé après les inondations.
Le camping de Méry à Esneux ravagé après les inondations. © RTBf – Erik Dagonnier

Pour réparer le patrimoine communal, il a fallu plus que doubler le budget extraordinaire qui est passé de 4 millions à 8 millions 500.000.

Parmi les gros chantiers figurent les voiries (1,75 million euros), le renouvellement des véhicules (1 million euros), l’aménagement de la place de Tilff (850.000 euros), les écoles (677.000 euros), l’éclairage public (125.000)…

Esneux a payé aussi près de 90.000 euros d’heures supplémentaires aux membres du personnel à la suite des inondations. Pour pouvoir équilibrer son budget, la commune a dû prélever plus d’un million d’euros dans ses réserves.

CHAUDFONTAINE : 10,8 millions d’euros pour reconstruire écoles, halls sportifs… et le Source O Rama

A Chaudfontaine, 1871 habitations ont été touchées, 3800 sinistrées 37 bâtiments publics impactés, des véhicules et du matériel communaux emportés par les flots.

Au budget ordinaire, la commune a déjà dépensé environ 3 millions d’euros "pour par exemple, du relogement, des repas du gardiennage, la location de containers…" précise le bourgmestre Daniel Bacquelaine. 1,4 million d’euros sont prévus au budget 2022.

Concernant la reconstruction, difficile d’évaluer les frais de rénovation et de rachat. La commune avance une première estimation à 10 millions 800.000 euros nécessaires. L’assureur Ethias a versé une provision de 5 millions d‘euros en 2021.

Vaux-sous-Chèvremont envahie par la Vesdre.

Pour le budget 2022, le budget spécial inondations s’élève à 5,384 millions d’euros. Parmi les gros chantiers figurent l’école du Val et la crèche de Vaux-sous-Chèvremont, le complexe sportif de Vaux, le bâtiment de l’échevinat social de Vaux, celui de la culture à Chaudfontaine, le Source O Rama, l’esplanade de Chaudfontaine… Et 100.000 euros sont aussi prévus par exemple, pour dépolluer des terres.

VERVIERS 40 millions d’euros pour réparer le chaos et 3 millions d’euros empruntés

A Verviers, les problèmes financiers de la ville ne datent pas d’hier. Et le covid, le Cpas, le recrutement des pompiers… accentuent la difficulté. Imaginez alors en plus, les inondations…

La ville dénombre environ 8500 sinistrés sur une population de 55.000 habitants. Concernant les heures supplémentaires prestées par le personnel lors des inondations, la commune est parvenue à les compenser par heures récupérées. Mais pour équilibrer son budget, la commune a eu recours à un prêt d’aide extraordinaire CRAC de 3 millions d’euros.

A terme, il faudra trouver 4 millions d’euros de notre poche

Verviers estime à 40 millions, le prix de l’ensemble de la reconstruction des infrastructures de la ville. Mais Alexandre Loffet se plaint que la région ne rembourse que 90% de la somme pour les communes sinistrées de catégorie 1 dont il fait partie. "A terme, il faudra trouver les 10% restant, soit 4 millions d’euros de notre poche, une opération difficile dans une ville qui a déjà des problèmes d’endettement !"

Verviers estime à 40 millions, le prix de l’ensemble de la reconstruction des infrastructures de la ville
Verviers estime à 40 millions, le prix de l’ensemble de la reconstruction des infrastructures de la ville © RTBF

Pour cette reconstruction post-inondations, la ville a prévu en 2022, un budget de 20 millions d’euros sur les 78 millions prévus à l’extraordinaire. Ils devront servir à construire le nouveau pont de la Raye à Ensival, à la réfection des ponts endommagés, à la rénovation des écoles sinistrées…


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L’échevin des finances Alexandre Loffet craint aussi surtout pour le budget de l’année prochaine : le revenu des taxes sur les enseignes par exemple risque de baisser fortement car certains commerces ont cessé leur activité. L’IPP et le précompte professionnel rapporteront sans doute moins également suite au départ de Verviétois vers d’autres communes.

LIEGE 10 millions d’euros de frais liés aux inondations et un budget non bouclé

Dans les rues de Chênée, le chaos après les inondations.

Autre grosse commune touchée, Liège. Avec 13.700 sinistrés. L’échevine des finances, Christine Defraigne estime à environ 10 millions les frais liés aux inondations : réquisitions, nettoyage, sécurisation, enlèvement de déchets… qui ne sont pas compensés par la Région wallonne.

Mais la ville peine à établir son budget. Ses gros problèmes financiers datent déjà d’avant les inondations. La commune va recourir au "douzième provisoire", en attendant. Difficile dès lors, d’obtenir des estimations plus précises à propos de la reconstruction.

THEUX entre 10 et 13 millions d’euros de dégâts estimés et 33 bâtiments communaux à réparer

A Theux, 7,5 millions sont prévus au budget extraordinaire 2022 pour la reconstruction, notamment des berges et des voiries. Une somme colossale pour une petite commune dont le budget annuel ordinaire atteint à peine 16 millions d’euros.

Il faut refaire le rez-de-chaussée de l’hôtel de ville, la bibliothèque, le hall des sports, deux terrains de foot synthétiques (qui n’était pas assurés !), la piscine endommagée, … 33 bâtiments communaux sont touchés. Montant estimé : entre 10 et 13 millions d’euros. Et l’échevin des finances, Alexandre Lodez, craint de devoir financer la sécurisation des berges et du dragage de la Hoëgne. Il espère aussi la prolongation en 2022, des subventions régionales pour des emplois temporaires APE destinés à aider le personnel communal.

La piscine, fortement endommagée lors des inondations, doit être refaite.
La piscine, fortement endommagée lors des inondations, doit être refaite. © RTBF – Philippe Collette

EUPEN 4 millions d’euros pour les rues et les ponts

La ville d’Eupen a prévu 4 millions d’euros dans son budget extraordinaire pour la reconstruction. Il faut refaire certaines rues, plusieurs ponts et d’autres infrastructures communales… Parmi elles, le tennis, la maison des scouts et la maison des associations.

Suite aux inondations, les Câbleries d'Eupen sont à l'arrêt.

La ville s’inquiète également d’une future baisse de revenus tirés de la taxe sur la force motrice à cause de l’arrêt d’activité des Câbleries d’Eupen. Et elle redoute l’impact des pertes d’emplois sur l’impôt des personnes physiques.

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