Depuis 1998, Laurent Naveau élève des Bison à Orchimont. Une aventure née de la passion pour cet animal encore sauvage mais qui porte aussi un projet : celui d’une agriculture moins productive mais plus respectueuse de l’environnement, ardennais notamment.
Un Stetson vissé sur la tête, Laurent Naveau pénètre dans l’une de ses nombreuses parcelles de son "Bison Ranch" avec un pick-up. Un petit bout d’Amérique au cœur de l’Ardenne pour aller rendre visite à une partie de ses bisons d’Amérique : "Il y a ici une soixantaine de mères avec leurs petits et quelques mâles, difficile de les approcher car ils ne sont pas domestiqués. C’est un désavantage quand il faut les capturer mais pour le reste, ils vivent leur vie à l’extérieur toute l’année et on les laisse tranquille. Il n’y a même pas d’étable pour l’hiver". Une rusticité qui permet de réduire drastiquement les coûts de production pour des animaux qui voyagent beaucoup d’une prairie à l’autre.
Un amour né lors des nombreux voyages réalisés aux Etats-Unis pour cet ancien pilote de moto (72 départs en 500cc, actuelle catégorie du MotoGP) : "J’ai rencontré un éleveur en 1993 près de San Diego. Je me suis toujours dit que la vie était trop courte et qu’après ma carrière, je devais faire quelque chose de totalement différent et c’est un peu un retour aux sources car je venais au départ de l’agriculture". Résultat, après s’être lancé en 1998 : 153 hectares de prairies naturelles et un troupeau qui tourne autour de 200 têtes pour un bison qui le passionne toujours : "C’est un animal génial. Son instinct, sa mémoire. Il ne faut pas le domestiquer mais si on tente de le faire, on pourrait presque l’éduquer comme un chien. Et puis quel instinct de survie ! Les bisons peuvent vivre dans un cagnard dingue et tout autant en plein hiver par un froid terrible".
Un exemple d’agriculture respectueuse
Mais le bison permet aussi à Laurent Naveau de pratiquer une agriculture avec une empreinte carbone très faible : "Au même âge, un bison produit 50% de viande en moins qu’un blanc bleu belge mais on réduit grandement les coûts et nous mettons nos bisons sur des prairies naturelles qu’on ne retourne pas, ces hectares deviennent des puits à carbone. Et comme on fait presque tout en circuit court, nous parvenons à avoir une agriculture bio qui respecte réellement l’environnement". Un modèle qui n’est pas applicable partout évidemment. Pour des bisons, moins productif et non domestiqués, il faut énormément d’espace qu’on ne trouve plus de façon abordable ailleurs en Belgique "et même en Ardenne désormais". Impossible de couvrir la demande en viande rouge s’il n’y avait plus que des bisons partout. Mais la philosophie de Laurent Naveau, c’est de réduire la vitesse, l’intensité de la production mais en parallèle aussi, la consommation : "On ne doit pas continuer à manger autant de viande rouge. Alors l’idée, c’est de consommer moins mais de la viande avec une qualité énergétique hors pair et produite de façon locale. Aujourd’hui, on continue de produire de la viande pour l’exportation de façon intensive. Et ça, ça n’a plus de sens".