Athlétisme

Du saut à la perche au saut dans l’eau, le saut de carpe de Thibaut Duval devenu… directeur de piscine!

Thibaut Duval pose devant la Piscine des Dauphins... juste avant le début des travaux de transformation. Depuis l'interview, le chantier a débuté.

© RTBF / Samuël Grulois

Avoir plusieurs vies. Vous êtes sans doute nombreux à en avoir rêvé. Thibaut Duval l’a fait. En 2000, ce Nivellois d’origine représentait la Belgique aux Jeux Olympiques de Sydney, en Australie. La tête en bas, les pieds dans les nuages. Duval était perchiste. Mais accablé par les blessures, il prend sa retraite sportive en 2005, à seulement 26 ans, et devient prof de gym. Un job qu’il cumule ensuite avec la gestion d’un centre de fitness. Avant de tout quitter pour devenir, début 2021, directeur de la Piscine " Les Dauphins ", à Mouscron. L’homme aux plusieurs vies, c’est donc bien lui !

Hurlu d’adoption par mariage, c’est avec une chaleur toute mouscronnoise qu’il nous accueille dans son bureau de ‘boss’. " Dans une piscine, il y a toujours des perches ! Comme je ne suis pas maître-nageur, je ne les utilise pas... Mais je pourrais proposer de découper mes anciennes perches pour les recycler ici ! " Le ton est donné. Thibaut Duval, petites lunettes toujours vissées sur le nez, n’a pas perdu son humour ni sa légèreté.

Au mur, des photos des bassins actuels mais aussi les plans de la future piscine. Depuis le 10 janvier, les cris des enfants qui s’amusent dans l’eau sont remplacés par les vibrations assourdissantes des marteaux-piqueurs. La piscine est en train de subir une profonde cure de jouvence. D’énormes travaux sont en cours. 12 millions d’euros sont investis ! Après une fermeture complète de six mois, les nageurs habitués de l’endroit découvriront un bassin de 50 mètres flambant neuf et des douches rénovées. Dans la foulée, une deuxième phase débutera avec la construction d’un nouveau bâtiment qui accueillera un bassin supplémentaire de 25 mètres. Fin du chantier prévue en septembre 2023.

Bref, le nouveau directeur est très occupé. Et ça tombe bien car c’est ce qu’il recherchait en changeant de métier. Descriptif de sa nouvelle fonction, plongeon dans ses souvenirs, avis de spécialiste sur les records d’Armand Duplantis… Du saut à la perche au saut dans l’eau, voici un long entretien avec Thibaut Duval.

Thibaut, puisqu’on parle de perche et de saut, comment fait-on le grand bond de la piste à la piscine, du statut de sportif à celui de directeur ?

" En fait, je me suis toujours intéressé à la gestion des infrastructures sportives, c’est un domaine qui m’a toujours inspiré. Quand j’habitais encore Nivelles et que je m’y entraînais, j’étais déjà attiré par la piscine locale. J’avais des contacts avec le directeur de l’époque Michel Goffaux. La transition s’est donc faite tout naturellement. Mais j’ai vu l’annonce assez tardivement. Il fallait envoyer sa candidature pour le 27 novembre 2020… j’ai déposé la mienne le 26 en soirée au bureau de l’I.E.G., l’Intercommunale d’Étude et de Gestion de Mouscron propriétaire du bassin de natation. "

Vous avez donc fait le choix de quitter l’enseignement alors que vous adoriez votre job de professeur d’éducation physique…

" C’est vrai que je me plaisais énormément dans l’école où je travaillais, à Irchonwelz (NDLR : dans l’entité d’Ath), un chouette établissement où on compte quinze profs de sport ! Mes élèves étaient de futurs animateurs sportifs et agents d’éducation. Oui ça a été un choix assez difficile. Mais la passion de la gestion d’un centre sportif a pris le dessus… "

Juste après ma carrière sportive, j’ai enseigné, d’abord en primaire, puis avec des élèves plus âgés. J’adorais ! Mais il y avait très peu de changements d’année en année. Je ne retrouvais pas l’aspect " on se fixe des objectifs " comme c’était le cas quand j’étais perchiste.

Pendant quelques années, vous avez également géré une salle de fitness à Tournai. C’était déjà, à l’époque, une nouvelle vie pour vous. Vous accumulez donc les " nouveaux départs " ?

(Il sourit) " C’est vrai, c’est vrai… Je retrouve d’ailleurs ici des similitudes avec ce que je faisais à Tournai. Juste après ma carrière sportive, j’ai donc enseigné, d’abord en primaire, puis avec des élèves plus âgés. J’adorais ! Mais il y avait très peu de changements d’année en année. Je ne retrouvais pas l’aspect " on se fixe des objectifs " comme c’était le cas quand j’étais perchiste. Alors que, dans la gestion d’un centre sportif, cette notion-là existe. Il faut créer une équipe, lui fixer des objectifs et tout mettre en place pour les atteindre. "

Si je caricature, cela veut-il dire qu’il y a toujours un moment où vous commencez à vous lasser ? Risquez-vous de quitter la piscine de Mouscron d’ici quelques années ?

" Non, non, non, pas du tout ! Ici, le travail est justement tellement varié que je ne m’en lasserai pas. Je peux très bien bosser un jour sur la gestion pure du personnel, faire du marketing le lendemain et du pédagogique le surlendemain. Je n’ai pas la même routine que dans l’enseignement. "

Quand vous avez quitté votre salle de sport à Tournai, vous en avez pris, permettez-moi l’expression, plein la gueule sur les réseaux sociaux. Avez-vous souffert des accusations liées à ce départ ?

" Oui, bien sûr. Tout est parti d’incompréhensions auprès de la clientèle au moment de la revente de la salle. Ce sont des choses que je n’ai pas pu maîtriser. C’était difficile à vivre car on avait construit une chouette structure avec une chouette ambiance. Les réseaux sociaux sont parfois injustes. Mais j’ai tourné la page, je suis apaisé. "

Thibaut Duval... sous le bassin de 50 mètres de la piscine de Mouscron. "Une piscine c’est un truc incroyable surtout à Mouscron, avec des bassins… flottants ! La cuve en béton armé repose sur des pilasses. Impressionnant!"
Thibaut Duval... sous le bassin de 50 mètres de la piscine de Mouscron. "Une piscine c’est un truc incroyable surtout à Mouscron, avec des bassins… flottants ! La cuve en béton armé repose sur des pilasses. Impressionnant!" © RTBF / Samuël Grulois

L'île flottante hurlue

Une piscine, c’est très lourd à gérer !

" Oui, surtout au niveau technique. Une piscine c’est une vraie usine ! C’est un truc incroyable surtout ici, à Mouscron, avec des bassins… flottants ! Je m’explique : la cuve en béton armé repose sur des pilasses et on a donc l’impression, quand on est dans la salle des machines au sous-sol, que les bassins flottent au-dessus de nos têtes. C’est vraiment très impressionnant. Et puis, il y a toute la technologie utilisée pour rendre l’eau propre, c’est juste incroyable. "

C’est vraiment une piscine sportive qui est finalement unique en Wallonie avec un bassin de cinquante mètres, un autre de vingt-cinq mètres. On peut accueillir des compétitions et ça plaît énormément à l’ancien compétiteur que je suis. À certains moments de la journée, les nageurs élites occupent cinq ou six couloirs !

Pourquoi l’I.E.G. vous a-t-elle engagé ?

" D’abord parce que l’ancien directeur, Alain Denys, a pris sa retraite. Ensuite, je pense que nos visions se rejoignaient. On avait les mêmes idées pour la piscine. On ne va pas changer toute la politique mise en place depuis des années car la piscine tourne très très bien. Mais avec les travaux récemment entamés dans le cadre du " Plan piscines ", un grand lifting, on va pouvoir créer un nouveau dynamisme dans certains domaines. "

Cette " Piscine des Dauphins " n’est pas qu’une piscine " tout public ". On croise régulièrement ici des sportifs de haut niveau, les nageurs entraînés par Horatiu Droc (NDLR : dont, jusqu’il y a peu, Fanny Lecluyse) ou encore les joueurs du club de water-polo multiples champions de Belgique…

" C’est vraiment une piscine sportive qui est finalement unique en Wallonie avec un bassin de cinquante mètres, un autre de vingt-cinq mètres. On peut accueillir des compétitions et ça plaît énormément à l’ancien compétiteur que je suis. D’ailleurs le club porte le même nom que la piscine… " Les Dauphins ". Il y a donc une relation particulière. À certains moments de la journée, les nageurs élites occupent cinq ou six couloirs, ce qui est pas mal sur les huit disponibles. "

Je vous le dis en boutade mais une légende urbaine raconte que la piscine de Mouscron ne mesure pas vraiment cinquante mètres mais juste un peu moins…

" Alors là, c’est vraiment une boutade parce que cette piscine est bel et bien olympique ! Elle a été mesurée par un géomètre avec des plaques de chronométrage en 1989. Et nous avons une attestation de la F.F.B.N., la Fédération Francophone Belge de Natation, confirmant que c’est un bassin aux dimensions olympiques. En fait, les gens pensent le contraire parce qu’il n’y a tout simplement jamais eu ici de grandes compétitions. "

Ce pourrait devenir l’un de vos objectifs de directeur ?

" En effet ! Mais il faudra trouver un bon partenariat avec le club et recruter, et c’est compliqué, des bénévoles. "

Je n’ai commencé l’athlétisme qu’en 1995 et… à peine cinq ans plus tard j’étais aux Jeux Olympiques ! Ce devait être une découverte, une étape, un passage vers d’autres Olympiades. Malheureusement, j’ai été poursuivi par les blessures. Les Jeux de Sydney ont donc été mes uniques Jeux.

Je reviens à votre carrière de sportif de haut niveau. Désormais, quand vous entendez la Brabançonne à l’occasion d’une compétition retransmise à la télévision, que ressentez-vous ?

" Une très grande fierté ! Mon seul regret personnel, c’est que je ne l’ai jamais entendu en étant sur un podium international. J’ai fini quatrième d’un Championnat d’Europe (NDLR : l’Euro Indoor 2000 où il était en tête à l’issue des qualifications), la plus mauvaise place, celle à côté du podium… mais bon, même troisième ou deuxième, je ne l’aurais pas entendue non plus. "

5 mètres 55 lors des qualifications aux J.O. de Sydney. Un résultat insuffisant pour disputer la finale. L'aventure olympique de Thibaut Duval fut brève. Mais quelle fierté pour lui!
5 mètres 55 lors des qualifications aux J.O. de Sydney. Un résultat insuffisant pour disputer la finale. L'aventure olympique de Thibaut Duval fut brève. Mais quelle fierté pour lui! © BELGA

Fier d'être olympien!

Vous avez participé une fois aux Jeux Olympiques, à Sydney, en 2000. Vous avez été éliminé lors des qualifications avec un saut à 5 mètres 55. Que retenez-vous de cette aventure ? Surtout de la déception ? Auriez-vous pu faire mieux ?

" J’avais 21 ans et ces J.O. devaient me servir d’apprentissage. Je n’ai commencé l’athlétisme qu’en 1995 et… à peine cinq ans plus tard j’étais aux Jeux Olympiques ! Ce devait être une découverte, une étape, un passage vers d’autres Olympiades. Malheureusement, j’ai été poursuivi par les blessures. Les Jeux de Sydney ont donc été mes uniques Jeux. J’ai fini treizième des qualifs. Il fallait faire 5 mètres 65 pour aller en finale. J’ai donc échoué à une barre. J’étais le plus jeune de tous les engagés dans le concours de saut à la perche. Je n’ai aucun regret sur 2000. Mais j’ai de grands regrets de ne pas avoir pu participer en 2004. "

La rupture du tendon d’Achille était une blessure typique de l’époque ! Notre modèle, c’était Sergueï Bubka. Ce qu’il faisait, on devait le faire. Être le plus fort, le plus rapide et prendre les plus grandes perches possibles. Du coup, nous nous sommes tous entraînés plus dur encore. En salle de musculation, on chargeait beaucoup, etc.

À cause d’une rupture du tendon d’Achille, c’est ça ?

" Oui, une rupture longitudinale partielle du tendon. "

Une blessure typique des perchistes ?

" Je dirais plutôt une blessure typique de l’époque ! Notre modèle, c’était Sergueï Bubka. Ce qu’il faisait, on devait le faire. Être le plus fort, le plus rapide et prendre les plus grandes perches possibles pour s’envoyer le plus haut possible. Du coup, nous nous sommes tous entraînés plus dur encore, en nous octroyant moins de temps de repos, en écoutant moins notre corps. En salle de musculation, on chargeait beaucoup, etc. Et puis, Renaud Lavillenie est arrivé avec une autre façon de sauter, beaucoup plus technique, plus adaptée à ses propres qualités basées sur un gros mental. Chez les espoirs, alors qu’il ne sautait que 5 mètres 20, il disait déjà vouloir être le meilleur, ce qui a d’ailleurs donné cette impression qu’il avait la grosse tête. Il ne s’est mis aucune barrière et il a battu le record du monde. Là, tous les sauteurs ont constaté qu’on pouvait faire autrement. Lavillenie court moins vite que Bubka, il est beaucoup plus petit (NDLR : 1 mètre 77 pour Lavillenie, 1 mètre 83 pour Bubka), il est moins fort physiquement… mais il a transformé le saut à la perche, il a vraiment laissé son empreinte ! Et il a ouvert la voie à Armand Duplantis, qui l’avait pris en modèle. "

Sergueï Bubka a fait beaucoup de bien au saut à la perche et, en même temps, quand un athlète archi-domine son sport, ce n’est jamais vraiment bon…

" Avec comme conséquence qu’on se dit qu’il n’y a qu’une seule façon de faire. Un piège dans lequel n’est donc pas tombé Renaud Lavillenie. Avec ses qualités, moindres sur papier, il a prouvé qu’il pouvait sauter plus haut que Bubka. "

Si je vous demande de choisir entre Bubka (qui vous a inspiré), Lavillenie (qui a changé la manière de sauter) et Duplantis (qui est la nouvelle star), qui gardez-vous ?

" C’est un choix très difficile car ils ont tous les trois apporté énormément au saut à la perche. Bubka a montré la constance dans les Championnats du monde avec cinq titres. C’est incroyable, d’autant plus qu’au début des années 80, les Mondiaux n’étaient organisés que tous les quatre ans ! Il a certes été moins heureux aux Jeux Olympiques avec une seule médaille d’or, à Séoul en 1988. En 1984, il a été " victime " du boycott. Et en 1992, il s’est blessé, malheureusement pour lui. Mais il reste l’ogre de la discipline. En chiffres, il n’y a pas mieux pour l’instant. Lavillenie, lui, a vraiment exploité au mieux la perche sur base de ses qualités. C’est lui qui a le meilleur rapport poids-performances. Et puis, à mi-chemin entre Bubka et Lavillenie, il y a Duplantis, beaucoup plus rapide que le Français mais dont il se rapproche techniquement, avec des qualités physiques proches de celles de l’Ukrainien, même s’il est un petit peu moins grand (NDLR : 1 mètre 81). ‘Mondo’ Duplantis est un phénomène, il est extraordinaire ! "

Pour moi, on peut imaginer voir Armand Duplantis sauter un jour 6 mètres 25 !

Duplantis au-delà des 6 mètres 25?

The sky is the limit… Jusqu’où peut sauter Duplantis ? On ne pourra pas allonger les perches à l’infini !

" Non, c’est certain. À un moment donné, on sera physiquement bloqué. Lavillenie et Duplantis utilisent tous les deux des perches de 5 mètres 20 qu’ils tiennent quasi au bout. On a connu une époque où l’on faisait la course aux plus grandes perches. Viktor Chistyakov a utilisé des perches de 5 mètres 30 mais c’était un géant de 2 mètres 02. Finalement, il n’a jamais vraiment réussi à exploiter le bénéfice de la prise de levier par rapport au geste technique (NDLR : le record de Chistyakov est de 5 mètres 90). Il faut vraiment trouver le bon timing. Avec sa vitesse, Duplantis peut espérer prendre des perches un peu plus grandes à l’avenir mais sans certitude de pouvoir alors reproduire le bon geste technique. Pour moi, on peut imaginer le voir sauter un jour 6 mètres 25. Facilement, je pense. Mais, en sport en général, dans la perche en particulier, une année n’est pas l’autre. Un petit grain de sable peut rapidement enrayer la machine. En 2014, Lavillenie a sauté 6 mètres 16 avant une longue traversée du désert, malgré quelques médailles dans les championnats dont une médaille d’argent aux J.O. de Rio. "

Vous avez longtemps été détenteur du record national avec une barre à 5 mètres 70. Le record actuel est détenu par Ben Broeders avec un saut à 5 mètres 80. Avez-vous modestement ouvert la voie à la perche en Belgique ?

" Vu la rapidité de mon passage au plus haut niveau, je n’ai pas pu vraiment laisser une empreinte ‘Thibaut Duval’. Je n’ai commencé l’athlétisme qu’à l’âge de 16 ans, en 1995. Après avoir testé les épreuves combinées, je n’ai choisi la perche qu’en 1998 lors des Mondiaux juniors. Et j’ai arrêté en 2005… "

Je crois que vous bossez encore pour la L.B.F.A., la Ligue Belge Francophone d’Athlétisme, non ?

" Oui, j’y suis responsable de la formation des entraîneurs. L’A.D.E.P.S. propose des brevets pour moniteurs sportifs, initiateurs, éducateurs et entraîneurs, dans différentes disciplines. Et c’est la L.B.F.A. qui donne les formations liées aux courses spécifiques. "

En résumé, vous formez celles et ceux qui vont… former la base ?

" Voilà, c’est ça ! On forme les personnes qui vont entraîner les gamins en athlétisme. Il y a deux-trois ans par exemple, Raymond Castiaux, l’entraîneur de notre championne d’Europe du 1500 mètres Élise Vanderelst, a refait son parcours de formation. "

Même si nous réalisons cette interview dans votre bureau de directeur de la piscine de Mouscron, je sens que ça vous fait du bien de parler d’athlétisme !

" Évidemment ! Et ça fait surtout du bien d’en parler de manière positive. On a quand même souvent entendu des commentaires négatifs sur notre fédération, sur le fait qu’elle ne suivait pas correctement ses athlètes, etc. "

Vous avez désormais un job plus sédentaire. Ne risquez-vous pas de prendre quelques kilos ?

" Non, non… j’ai repris la course à pied et puis j’enfile souvent mon maillot de bain pour nager ! J’ai toujours aimé nager d’ailleurs. Pour la petite histoire, quand j’ai stoppé à 15 ans la gymnastique, mon premier sport, je voulais absolument faire autre chose. Je ne pouvais pas passer de vingt heures de sport par semaine à… plus rien du tout. J’ai donc tenté la natation. J’ai suivi quelques entraînements. Et un jour, en sortant de la piscine, j’ai croisé sur la piste d’athlétisme juste en face mon ancien coach de gym qui était aussi coach de saut à la perche. Et c’est comme ça que tout a commencé ! "

Comment un Nivellois qui vient vivre à Mouscron s’intègre-t-il chez les Ch’tis ?

" Mouscron est une ville très accueillante, les Mouscronnois ont un grand coeur. Je me suis donc très vite habitué. J’y habite depuis 2005. Ma femme, une vraie Hurlue, me dit souvent que je suis plus mouscronnois qu’elle ! J’adore la convivialité. "

Les deux-trois premières années après ma retraite sportive ont vraiment été difficiles. Je comprends que certains tombent dans la dépression.

Thibaut Duval pose à côté du bassin olympique mouscronnois... avant le début de l'énorme chantier de rénovation qui vient de débuter.
Thibaut Duval pose à côté du bassin olympique mouscronnois... avant le début de l'énorme chantier de rénovation qui vient de débuter. © RTBF / Samuël Grulois

Ne pas sombrer après sa carrière sportive

On a déjà lu et entendu de nombreux ex-athlètes évoquer leur dépression post-carrière sportive. De votre côté, quand vous avez été contraint d’arrêter, avez-connu des moments compliqués ?

" Oui, les deux-trois premières années ont vraiment été difficiles. Quand on est sportif de haut niveau, on a une vie très rythmée dans laquelle tout est pris en charge, on voyage beaucoup. Et puis, d’un coup, le rythme redevient normal sans les petits extras qui font que la vie d’athlète est belle. Ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit : j’ai personnellement réussi à bien m’épanouir après 2005 mais je comprends que certains tombent dans la dépression. "

En plus, dans votre cas, c’était une fin de carrière précipitée avec cette blessure au tendon d’Achille suivie d’une fracture du plateau tibial. Rien n’était prévu ni anticipé, ce qui a peut-être fait encore plus mal, non ?

" Clairement ! Pendant deux ans, j’ai un peu navigué dans le flou. J’ai repris l’enseignement mais en me demandant toujours si je ne tenterais pas un retour… Il faut faire le deuil de sa carrière. Quand c’est fini, c’est fini ! "

Vous aviez eu la bonne idée, tout en étant sportif de haut niveau, de poursuivre vos études. Est-ce que le fait d’avoir un diplôme au moment d’arrêter vous a empêché de sombrer ?

" Oui ! Finir mes études était vraiment un choix de ma part. J’avais d’ailleurs tout centré, études et entraînements, sur Nivelles, pour pouvoir minimiser les déplacements. À l’époque, pour un sportif, décrocher un diplôme était beaucoup plus difficile que maintenant. Le concept de ‘double projet de vie’ n’existait pas. Depuis lors, la Belgique a mis les petits plats dans les grands pour permettre à nos champions de mener de front leur carrière sportive et leurs études. Dès qu’un athlète a un certain statut, il peut bénéficier d’un accompagnement, il peut étaler ses cours, il peut aménager ses horaires. C’est une belle avancée. "

J’ai retrouvé trace de quelques-uns de vos résultats quand vous étiez dans la catégorie des scolaires : 10 secondes 91 centièmes sur 100 mètres, 6 mètres 97 à la longueur, vous auriez vraiment pu devenir décathlonien ?

" Je me souviens d’un de mes entraîneurs qui me poussait vers les épreuves combinées mais j’avais le saut à la perche dans le sang. Je ne voulais faire que ça. Les perchistes ont des entraînements très variés : course, saut, gymnastique… C’est d’ailleurs peut-être pour ça que je rebondis comme directeur d’une piscine, parce que c’est un job varié. C’est ça que je recherche. "

Si vous vous étiez spécifiquement entraîné sur le 100 mètres, auriez-vous pu titiller les 10 secondes ?

" 10 secondes 50 oui, mais pas 10 secondes, non ! Avec mon club français, j’ai un jour couru en 10 secondes 85. Mais rien à voir avec Usain Bolt… "

Vous avez fêté vos 43 ans le 1er février dernier. Vous vous êtes lancé dans ce nouveau projet de vie il y a un peu plus d’un an. Comment vous sentez-vous ? Apaisé ?

" Je suis très apaisé par rapport à ma réorientation professionnelle. Et je suis également très excité, avec plein de challenges, le suivi des travaux de transformation du bâtiment et la mise en place de la nouvelle politique sportive. "

Par ailleurs, auriez-vous pu postuler pour un poste de président ou de vice-président de la L.B.F.A. ? N’avez-vous pas rêvé d’un poste à haute responsabilité au sein de l’athlétisme belge ?

" Plus maintenant. Mais je reconnais avoir postulé, avant de devenir responsable des formations, pour devenir responsable du sport de haut niveau. Mais ça ne se combinait avec la salle de sport que je gérais à ce moment-là. C’est un poste très prenant qu’on ne peut pas assumer à moitié. D’ailleurs, quand ce poste s’est de nouveau libéré un peu plus tard, j’ai préféré ne pas être candidat. "

Le podcast complet " Du saut à la perche au saut dans l’eau, le saut de carpe de Thibaut Duval devenu… directeur de piscine ! " est disponible ci-dessous.

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