Chroniques

Ecolo et les nominations politiques : malaise ?

Les coulisses du pouvoir

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Mais pourquoi Ecolo est-il si mal à l’aise avec les nominations politiques ? Plusieurs cas défraient la chronique : Délégué général aux droits de l’enfant, Banque nationale, Bruxelles Environnement. Des blocages très médiatisés, où Ecolo étale ses contradictions face à la politisation du management public.

Bonjour Milquet !

Le cas de la nomination du nouveau Délégué général aux droits de l’enfant, Solaÿman Laqdim, est emblématique de ce malaise. Un jury est désigné pour départager les candidats. Dans la liste, une certaine Joëlle Milquet. Plusieurs personnalités socialistes, des Engagés et du MR se parlent et se mettent d'accord pour soutenir sa candidature. (NDLR : contrairement à ce que j'ai écrit ce matin, il s'avère qu'il n'y avait pas d'accord formel entre les trois partis du gouvernement Ecolo, PS et MR, veuillez m'en excuser et ne considérer que cette dernière version). Au bout du compte, le jury, censé être indépendant, classe Joelle Milquet derrière Solaÿman Laqdim, un candidat adoubé par l’IEV, l’Institut Émile Vandervelde.

Dans le secteur, l’annonce de l’arrivée de Joëlle Milquet hérisse au plus haut point. Une lettre ouverte est publiée. Au sein du PS, la pression monte pour que Paul Magnette soutiennent Solaÿman Laqdim contre Joëlle Milquet. Problème, la ministre de tutelle écologiste Bénédicte Linard ne veut pas de ce candidat qui a travaillé auparavant dans un cabinet socialiste. Elle insiste pour un ou une candidate "indépendante" c’est-à-dire soutenu par aucun parti. Ecolo choisit donc de pousser une candidate censée elle être "vraiment indépendante".

Indépendance ?

Mais si elle est poussée par un parti, est-elle encore indépendante ? Pas pour le PS. On se retrouve donc candidat contre candidat. Le vaudeville dure 6 mois. La ministre Linard ira jusqu’à défendre dans la presse sa candidate, contre le classement du Jury. Le ministre président Jeholet concluant lui que la procédure est ainsi viciée quelques jours avant de nommer quand même le candidat classé premier.

Ecolo a perdu son bras de fer et en passant a participé à salir la réputation des candidats et de l’institution du Délégué général aux droits de l’enfant.

Contradiction

Quel est donc le problème d’Ecolo avec les nominations de mandataires publics ? Les verts retrouvent une contradiction historique avec la culture de pouvoir. Ecolo veut faire de la politique autrement, moins de particratie, plus de délibération, moins de politisation et plus d’indépendance. Mais pour avancer dans cet agenda il doit assumer le pouvoir, agir comme un parti, imposer des décisions, et nommer des administrateurs publics.

Sur ce dernier point une contradiction majeure apparaît. L’indépendance s’oppose parfois au pluralisme. En effet, imaginons une procédure de nomination de hauts fonctionnaires et de managers publics totalement aveugle, administrative, sans intervention même d’un gouvernement. Cette procédure serait logiquement méritocratique. Mais si les candidats les plus méritants sont tous ou presque d’un même parti, tiens, par exemple du PS ? Ou si les candidats sont tous issus de l’administration cultivant un entre-soi bureaucratique ?

Sur fond de tension entre bureaucratie et politique, on voit bien que l’indépendance ne veut rien dire sans le pluralisme. Comment organiser une juste répartition des tendances de la société si ce n’est par un partage, forcément politique des hautes fonctions ?

Pluralisme

Le pluralisme c’est ce qu’Ecolo demande à la Banque nationale. Ecolo propose une candidate, Géraldine Thiry, économiste de l’UCL, renommée et brillante, au comité de direction de la Banque nationale. Là, trônent 6 hommes, 3 francophones, 3 néerlandophones représentant tous un parti, un courant, libéral, socialiste, nationaliste, chrétien-démocrate.

Pas de pluralisme homme-femme, pas de pluralisme entre, pour faire court, économiste orthodoxe et hétérodoxe. Enfin un pluralisme politique imparfait puisque Ecolo est le seul parti de l’exécutif à ne pas en faire partie. La candidate désignée par Ecolo a été rejetée par le conseil de régence au nom de l’indépendance de la banque. Mais au nom du pluralisme, Ecolo pousse donc sa candidate, c’est au Gouvernement de décider. On retrouve clairement ici, le souci de pluralisme avant le souci d’indépendance.

D’autres cas récents démontrent ce souci du pluralisme chez les verts : Ihsane Haouach comme commissaire du Gouvernement ou de Zakia Khattabi à la Cour constitutionnelle.

Pour faire de la politique autrement, Ecolo a pu croire un temps qu’il fallait nommer autrement : dépolitiser et œuvrer à l’indépendance des candidats. Cette argumentation a été reprise, maladroitement par Bénédicte Linard. Mais depuis quelques années, Ecolo a compris que pour faire de la politique autrement il devait surtout assumer de nommer politiquement pour instaurer plus de pluralisme.

Après avoir critiqué la politisation à outrance de la fonction publique, Ecolo est accusé d’incohérence par les autres partis qui ne cessent de mettre les verts face à leurs contradictions dès qu’ils le peuvent.

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