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Eddy de Pretto s’exprime pour la première fois depuis le procès contre ses cyberharceleurs

Eddy De Pretto s’exprime pour la première fois depuis la fin du procès l’opposant à ses cyberharceleurs.

© Sylvain Lefevre / Getty Images

"Personne n’a envie de voir le visage des gens qui vous ont menacé de mort et traité de tous les noms, mais il fallait que je fasse entendre ma voix personnelle et celles de ceux qui ne peuvent pas se défendre ". Voilà une citation extraite de l’entretien très touchant qu’Eddy de Pretto a accordé à Mediapart suite au procès l’opposant à ses cyberharceleurs.

Juin 2021, Eddy de Pretto se produit dans une église à Paris. Le lendemain il publie un extrait de ce concert sur ses réseaux sociaux. Démarre alors un torrent d’insultes et de menaces à son encontre. Pris pour cible en raison de son orientation sexuelle et du fait d’aborder la question de l’homosexualité et de la religion dans une église, l’artiste décide de porter plainte.

Octobre 2022, un procès s’ouvre à Paris. Dix-sept hommes sont jugés devant le tribunal correctionnel pour harcèlement sur les réseaux sociaux.

Décembre 2022, des peines de trois à six mois de prison avec sursis sont prononcées à l’encontre de onze prévenus.

Le verdict tombe le 12 décembre. Dans la foulée, Eddy de Pretto réagit – pour la première fois depuis le début de la procédure judiciaire – dans l’émission "A l’air libre" de Mediapart. S’il n’a pas souhaité s’exprimer plus tôt, c’est par peur qu’on l’accuse de vouloir faire "le buzz": "Je ne voulais pas qu’on m’accuse d’utiliser ce procès pour mon image, que ce soit une histoire de buzz. Je voulais précisément utiliser ma parole une fois le verdict tombé pour pouvoir expliquer pourquoi j’ai fait cette procédure et quelle était la motivation pour la cause générale."

"La cause générale" lui tient beaucoup à cœur justement : "Je pense qu’il faut aller porter plainte quand on le peut, c’est très difficile mais on a besoin de toutes ces petites pierres-là pour avancer, pour montrer que c’est possible de changer notre société."

3000 à 4000 messages reçus lors de "raids"

Du changement c’est ce qu’a espéré l’artiste en répondant favorablement à l’invitation de l’église Saint-Eustache en juin 2021 : "Pour moi, le rôle de l’artiste est de soulever des questions et celle de l’homosexualité dans l’église en fait partie. L’invitation de l’église Saint-Eustache, je l’ai prise pour une main tendue vers moi pour discuter ".

Le cyberharcèlement dont il a été victime ensuite l’a profondément choqué et terrorisé : "Pendant 4-5 jours, je me suis pris des raids de la part de groupes de gens qui ont commencé à lancer énormément de messages sur les réseaux. Ça va être des menaces de mort, des attaques homophobes, des discriminations sur mes prises de position, des liens avec le racisme, des choses assez violentes, assez flippantes. Ma grande peur, c’était que ça puisse arriver véritablement. Certains disaient connaître mon adresse, d’autres parlaient de me trouver là où je faisais des dédicaces. C’était des messages toutes les minutes." Au total, Eddy de Pretto a reçu 3000 à 4000 messages lors de ces "raids". S’en sont suivis des troubles du sommeil et l’obligation de faire appel à un garde du corps. Le chanteur témoigne : "Ce ne sont pas que des mots ".

Education aux médias : "Le juge m’a demandé de lui expliquer une story"

Finalement, malgré l’appréhension de "voir le visage des gens qui vous ont menacé de mort et traité de tous les noms" Eddy de Pretto a donc entamé une procédure judiciaire par solidarité avec "ceux qui ne peuvent pas se défendre". Aujourd’hui il se déclare "content de voir que la justice répond en ce sens pour le cyberharcèlement et contre les discriminations." Il se rend compte néanmoins qu’il y a encore beaucoup de travail : "On est un peu au début de cette ère-là. Comment on gère ces commentaires, ces flux ?" Il regrette que les réseaux sociaux ne prennent pas davantage position et que "les instances politiques et judiciaires" ne soient pas mieux formées : " Au procès, à plusieurs reprises, le juge m’a demandé comment ça se passait Instagram, il m’a demandé de lui expliquer une story."

Au-delà de la lutte contre l’homophobie qui lui est chère, l’artiste se bat désormais pour une meilleure éducation aux médias : "Plus on aura éduqué notre justice à voir ce qu’il se passe sur les réseaux sociaux, plus on arrivera à nos fins, c’est-à-dire moins de violence et de haine "

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