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Élections de mi-mandat aux États-Unis : les candidats célèbres, une stratégie bien rôdée du parti républicain

Ronald Reagan et Donald Trump, deux exemples emblématiques de l'accession au pouvoir de célébrités sans expérience politique préalable.

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La scène politique américaine, grand théâtre s’il en est, n’est pas étrangère au parachutage de célébrités sur la scène électorale. C’est Ronald Reagan, acteur hollywoodien avant d’être élu gouverneur de Californie puis président en 1980 qui a ancré cette tradition, même si quelques-uns de ses illustres prédécesseurs à la Maison Blanche, Herbert Hoover par exemple, étaient connus du grand public avant de faire leur apparition en politique.

Donald Trump, fantasque homme d’affaires et star de la télévision avant d’être élu aux responsabilités suprêmes en 2016, constitue le dernier exemple de personnalité publique ayant décroché un poste d’importance sans la moindre expérience politique préalable. 

Quatre personnalités en lice pour les républicains

Mark Kelly, ancien astronaute à la NASA, défend son siège de sénateur fédéral pour les démocrates.
Mark Kelly, ancien astronaute à la NASA, défend son siège de sénateur fédéral pour les démocrates. © Getty Images

Dans le cadre de ce cycle d’élection de mi-mandat, qui ce mardi 8 novembre verra se décider le sort des deux chambres fédérales ainsi que de nombre de postes d’importance dans les cinquante États de l’Union, diverses célébrités sont aussi entrées en action, le plus souvent pour le compte du parti républicain.

Si Mark Kelly, ancien astronaute à la NASA, défend son siège de sénateur fédéral pour les démocrates, le parti conservateur présente dans les différents scrutins pas moins de quatre célébrités, toutes dénuées d’expérience politique.

En Pennsylvanie, le docteur Mehmet Oz (à droite sur la photo), star de la télévision, tentera de se défaire d'un de John Fetterman, un candidat démocrate atypique.
En Pennsylvanie, le docteur Mehmet Oz (à droite sur la photo), star de la télévision, tentera de se défaire d'un de John Fetterman, un candidat démocrate atypique. © Getty Images

En Pennsylvanie tout d’abord, le docteur Mehmet Oz, chirurgien cardiaque mais surtout star de télévision, tentera de se défaire dans un scrutin très serré de John Fetterman, un candidat démocrate atypique : ancien maire d’une petite ville ouvrière aux abords de Pittsburgh, il désire rester fidèle à sa philosophie de politicien accessible. Élu lieutenant-gouverneur en 2017, soit le deuxième poste le plus important de l’État, il déambule de meeting en apparition télévisuelle le plus souvent en short et en sweatshirt à capuche. Victime d’un AVC en mai, il est régulièrement moqué par son opposant, quinze ans plus âge que lui, pour sa faible forme physique.

Dans l'Ohio, c'est JD Vance (à droite sur la photo), auteur à succès d'une autobiographie adaptée à l'écran par Netflix, qui affrontera le démocrate Tim Ryan.
Dans l'Ohio, c'est JD Vance (à droite sur la photo), auteur à succès d'une autobiographie adaptée à l'écran par Netflix, qui affrontera le démocrate Tim Ryan. © Getty Images

Dans l’Ohio voisin, c’est JD Vance, un auteur à succès, qui défendra les couleurs du parti républicain dans une autre confrontation très indécise. M. Vance, brillant étudiant diplômé en droit de l’université de Yale, a connu le succès populaire avec son autobiographie Hillbilly Elegy, adaptée à l’écran par Netflix.

Le livre raconte l’enfance de l’auteur dans un milieu défavorisé dans l’Ohio rural. Il constitue avant tout une explication sociologique pointue des raisons pour lesquelles la classe blanche défavorisée a voté en masse pour Donald Trump en 2016. Le soutien de Trump à JD Vance, crucial dans son élection primaire républicaine, fut donc une demi-surprise. Reste à voir si celui-ci sera suffisant pour le voir triompher de son opposant Tim Ryan.

En Géorgie, l'ancien joueur star de football américain Herschel Walker, défie le démocrate Raphael Warnock, ancien pasteur qui tente de conserver son siège.
En Géorgie, l'ancien joueur star de football américain Herschel Walker, défie le démocrate Raphael Warnock, ancien pasteur qui tente de conserver son siège. © Getty Images

Un avortement non assumé

En Géorgie, c’est l'ancien joueur star de football américain, Herschel Walker, qui défie le démocrate Raphael Warnock, noir lui aussi et ancien pasteur, qui tente de conserver son siège. Dans cet État où subsiste une ségrégation tacite – comme dans nombre d’États du Sud, le choix par le parti républicain d’un afro-américain n’est pas un hasard : il s’agit aussi de grappiller quelques pourcents des votes de la communauté noire, historiquement affiliée aux démocrates.

Mais là où le bât blesse, c’est que M. Walker, en plus d’avoir prouvé une méconnaissance profonde de ses dossiers dans son unique débat avec son opposant, a commis un impair sérieux : alors que la question de l’avortement est centrale dans les midterms, le candidat républicain, qui s’est rangé derrière la ligne de son parti en la matière en jurant ne jamais avoir encouragé l’IVG, a été mis face à ses propres contradictions : il a été prouvé qu’il avait payé une de ses anciennes conquêtes pour qu’elle recoure à un avortement.

Dans l'Arizona, Kari Lake, une ancienne présentatrice de télévision, tentera de devenir gouverneure.
Dans l'Arizona, Kari Lake, une ancienne présentatrice de télévision, tentera de devenir gouverneure. © Getty Images

Dans l’Arizona, enfin, c’est une ancienne présentatrice de télévision, Kari Lake, particulièrement hargneuse contre les positions démocrates, qui tentera de devenir gouverneure. Cette femme de 53 ans, qui a changé trois fois d’affiliation politique au cours de sa carrière, fait campagne sur les thèmes de l’immigration et du pouvoir d’achat. Mme Lake, qui entretient une paranoïa publique sur la fiabilité du processus électoral, tentera de capter une partie du vote latino dans cet État où un tiers des électeurs est hispanophone.

Une stratégie risquée

Alors qu’elles constituent pourtant les trois courses sénatoriales les plus disputées et les plus cruciales – dans la mesure où elles décideront de la couleur politique du sénat fédéral lors de ces deux prochaines années au moins –, le parti républicain a choisi la stratégie de candidats "stars" mais dépourvus d’expérience politique pour tenter de rafler la chambre haute fédérale, sous l’influence directe de Donald Trump.

"C'est une stratégie loufoque et risquée, directement diligentée par Trump, et qui risque de peser lourd dans la balance car soutenant des candidats issus du monde des célébrités, le parti prend le risque de se décrédibiliser auprès des votants indécis", analyse le politologue de l'université du Massassuchetts Alexander Theodoridis.

Les démocrates, de leur côté, sont plus orthodoxes en matière de sélection des candidats. À part Mark Kelly, l’astronaute de l’Arizona, les "progressistes" ne sont pas friands de célébrités, préférant sélectionner des politiciens issus de l’intérieur du parti.

"Les candidats démocrates sont généralement plus sérieux", estime David Jackson, professeur à l’université de Bowling Green (Ohio). "Quant aux "célébrités" défendant les couleurs du parti républicain, elles sont toutes inféodées aux théories de Trump sur les élections présidentielles "volées" de 2020".

La journée du 8 novembre prochain permettra de déterminer qui, du chirurgien star de télévision à l’ancienne star de football américain, sera porté par les électeurs pour défendre les couleurs de son parti dans les différentes institutions fédérales et locales concernées par le scrutin.

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