Entre Emmanuel Macron et Elisabeth Borne, ça n’a jamais été le fol amour. Quand elle a été nommée il y a un peu plus d’un an, elle n’était pas le premier choix du président.
Macron-Borne, ce sont deux styles très différents. Et ils n’ont pas toujours été alignés sur certains dossiers. Mais depuis l’activation du fameux article 49.3, en mars dernier, leurs relations se sont fortement détériorées.
Ce passage en force de la réforme des retraites a été perçu comme un fiasco par beaucoup, qui ont réclamé la tête de la Première ministre. Emmanuel Macron aurait pu la congédier à ce moment-là, mais il a préféré temporiser. Notamment pour montrer qu’il ne cédait pas à la pression de la rue ou à la pression médiatique.
Il a donné 100 jours à Élisabeth Borne pour relancer la machine gouvernementale. Mais depuis, on peut dire qu’il ne lui fait aucun cadeau. Il lui envoie uppercut sur uppercut. Il l’humilie à coup de phrases assassines.
Comme lorsque, deux jours après le vote de la réforme des retraites, sur le plateau de TF1, il lui confie la mission d’élargir la majorité, et qu’il ajoute cette petite phrase féroce : "J’espère qu’elle y parviendra".
Ou quand, deux semaines plus tard, Elisabeth Borne tente une sortie de crise en prônant l’apaisement avec les syndicats, et qu’elle dit souhaiter respecter une "période de convalescence", Emmanuel Macron, de son côté, jette de l’huile sur le feu, en taclant précisément les syndicats. Clairement un désaveu.
Il y a quelques jours encore, le président remet ça. Et cette fois le coup est encore plus violent. L’affaire remonte au 28 mai. Ce jour-là, Elisabeth Borne est l’invitée de Radio J (radio juive en France). Elle évoque, au micro, une filiation entre le Rassemblement National et le maréchal Pétain. "Le Rassemblement National, dit-elle, est l’héritier du pétainisme".
La Première ministre est aussitôt recadrée sèchement par Emmanuel Macron. Ça se passe à huis clos, lors d’un conseil des ministres, mais l’information fuite rapidement. Le président estime que ce n’est pas comme ça qu’on arrivera à décrédibiliser le parti de Marine Le Pen. Que les mots utilisés par Elisabeth Borne sont des mots des années 90. Et qu’il ne peut croire que les millions de Français qui ont voté pour l’extrême droite sont des fascistes…
Un nouvel uppercut à l’intention d’Elisabeth Borne (décroché, selon les personnes présentes, sans adresser un regard à sa Première ministre), et d’autant plus douloureux que le père d’Elisabeth Borne était un rescapé des camps nazis.
Bref, la Première ministre semble clairement en sursis. La question est de savoir quand Emmanuel Macron débranchera la prise. Peut-être le 14 juillet, jour de la fête nationale. Mais peut-être attendra-t-il jusqu’en septembre.