Economie

Elon Musk : un esprit libertaire, une tête dans les étoiles et un cœur proche du portefeuille ?

© BELGA/AFP

Ça y est, le petit oiseau est entre les mains de l’homme le plus riche de la planète. L’entreprise twitter a confirmé avant-hier le rachat de la plateforme par Elon Musk pour la bagatelle de 44 milliards de dollars (41 milliards d’euros).

Musk devient donc le propriétaire de la plateforme qu’il avait annoncé convoiter il y a moins de deux semaines, et malgré l’opposition initiale affichée par le conseil. Le principal argument moral pour cette opération est la liberté d’expression. Le fantasque PDG rêve d’une parole sans modération, sans censure. Sans suppressions de comptes aussi – on se souvient de celle qui avait frappé son ancien président, lui aussi twittomane compulsif -.

"J’espère que même mes pires critiques resteront sur Twitter, c’est ce que signifie la liberté d’expression", a écrit lundi Elon Musk, avant l’annonce du rachat.

Oiseau en cage ?

Cette opération financière déchaîne déjà les passions. Certains craignent de voir les innovations faites précédemment par le réseau social afin de lutter contre les fausses informations réduites à néant"Toute tentative d’utiliser la plateforme pour partager des informations légitimes sera éclipsée par un bourbier toxique de désinformation." a aussi réagi Angelo Carusone, président de l’ONG progressiste Media Matters for America. D’autres aussi voient venir une volonté de rentabilité accentuée. Car Elon Musk, ne l’oublions pas, est avant tout un homme d’affaires.

Qu’à cela ne tienne, celui-ci a déjà suggéré plusieurs évolutions, comme l’ajout d’un bouton "modifier" pour corriger un tweet après publication et des changements dans la formule d’abonnement payante.

Sujet de notre 13 heures de ce mardi :

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Top of the world

Quoi qu’il en soit, la firme au volatile bleu, pour Elon Musk, ça a toujours été son truc. Il a toujours beaucoup tweeté… Et ses publications de déclencher la pluie et le beau temps sur les places boursières, des polémiques et des effets d’annonce. Une véritable arme de communication massive pour le multimilliardaire.

Fin de l’année dernière, c’est la consécration. Elu "personnalité de l’année" 2021 par le prestigieux magazine "Time", Elon Musk, alors homme le plus riche du monde, a définitivement tiré la couverture à lui.

Personnalité de l’année 2021 par le prestigieux magazine "Times"
Personnalité de l’année 2021 par le prestigieux magazine "Times" © AFP

Archive JT du 8 janvier 2021 :

Elon Musk : Le plus riche du monde

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Milieu aisé

Musk, c’est tout d’abord une carrière assez fulgurante. Il affiche à présent 50 ans au compteur. Retour un demi-siècle en arrière, à Pretoria, en Afrique du Sud. C’est dans la capitale politique du pays, alors sous le régime de l’apartheid, que naît Elon Musk. Sa mère, Maye Haldeman, est une diététicienne et mannequin d’origine canadienne. Son grand-père est, lui, assez sulfureux. Joshua Haldeman (1902-1974) vécut une existence d’…aventurier. Il reliera Alger au Cap en voiture. D’origine canadienne, c’est lui qui s’installera finalement en Afrique du Sud, pays bien moins "socialiste" pour lui – selon Le Monde.fr, son obédience était plutôt à chercher du côté de l’extrême-droite -.

Le père d’Elon, Errol, est un ingénieur et promoteur immobilier. D’origine afrikaner et anglaise d’Afrique du Sud, il est co-propriétaire d’une mine d’émeraude en Zambie. Riche géniteur avec qui le petit Elon vivra son enfance, car ses parents divorcent en 1979 (après le troisième enfant, Elon étant l’aîné de la fratrie).

Enfant doué, il lit beaucoup. A 12 ans, il aurait vendu son premier programme de jeu vidéo. Son rêve, c’est outre-Atlantique qu’il sent qu’il doit se dérouler. C’est ainsi qu’en 1988, le voilà parti en direction du Canada. Grâce à sa mère, il obtient la nationalité. Ayant la nationalité canadienne, il est plus facile d’aller s’installer aux Etats-Unis que s’il était venu directement d’Afrique du Sud. Il ressortira diplômé de l’université de Kingston, en Ontario, en 1992. De là, direction les States. Université de Pennsylvanie où il étudie économie et physique. Très tôt attiré par l’informatique, il va se lancer dans le secteur, en 1995. Internet en est à ses balbutiements. Rentrons dans la danse…

SpaceX launches Falcon Heavy rocket for first time
Présentation du "Dragon" de Space X fin mai 2014 à Hawthorne (Californie)

Météore

Il cofonde Zip2, une compagnie éditrice d’un logiciel de publication de contenu en ligne pour les informations des entreprises. En 1999, voilà X. com. C’est une banque en ligne. La société (après l’arrêt des services bancaires) deviendra PayPal. Le paiement en ligne va se développer. En 2002, Paypal est revendue à eBay pour 1,5 milliard de dollars.

A l’époque déjà, Musk à la tête tournée vers le ciel. Il fonde une nouvelle société – une troisième en quelques années seulement – dont le nom connaîtra bientôt un écho retentissant : SpaceX. Space Exploration Technologies. L’espace fait rêver le jeune entrepreneur. L’objectif : accroître le domaine du spatial civil (il trouve que la NASA n’en fait pas assez). Avec Space X, il va développer, avec des fonds privés, la course à l’espace. Le but tout d’abord est de développer des véhicules et autres lanceurs techniquement fiables et dont les coûts sont moindres. Sortiront des ateliers des fusées comme les Falcon 1 et 9, mais aussi des vaisseaux cargos, tels le Dragon


A lire aussi : Un étage de la fusée Falcon 9 va s’écraser sur la Lune


Les coûts sont exorbitants pour l’entreprise. Les essais de lancements sont au départ infructueux. En 2008, c’est la crise financière, et Tesla, son autre entreprise phare (voir ci-dessous) est aussi dans le rouge. Menace de banqueroute, Musk est sur la corde raide. Il met ses dernières économies (tirées de la vente de PayPal) dans Tesla. Pour Space X, c’est la NASA notamment qui va sauver les meubles. Elle permettra bientôt à Space X de ravitailler la Station spatiale internationale.

Dans les années 2010, après cette période difficile, la société va donc entamer son envol vers les sommets stratosphériques : ravitaillement de l’ISS donc, développements et récupérations réussies de lanceurs. In fine, Space X lance des astronautes dans l’espace.

Le rêve du multimilliardaire, à terme, est de coloniser mars.

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Archive JT du 31 mai 2020

Elon Musk / Le milliardaire qui rêve de Mars

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Chapelets satellitaires

Il y a aussi dans sa besace Starlink, et sa galaxie de satellites, qui est en voie de réalisation. Un projet signé SpaceX pour une couverture internet mondiale qui n’en finit pas de faire parler d’elle. Que ce soit par les scientifiques ou les astronomes amateurs – les objets volants identifiés engendrant une grande pollution lumineuse-.

En voiture, Elon !

Mais avant d’aller conquérir la planète rouge, il va miser sur la voiture électrique. Et c’est, avec l’espace, l’un des domaines de prédilection de l’ingénieur surdoué – il révélera être atteint du syndrome d’Asperger en 2021 -. Et voilà… Tesla. Il dirige la société depuis 2008. Ce n’est pas lui qui a créé la boîte (il s’était associé en 2003 aux fondateurs, Martin Eberhard et Marc Tarpenning), mais il va, après des difficultés financières, en faire une vraie success story. D’abord pourvoyeur de modèles haut de gamme, sortiront des usines des modèles sportifs (la Roadster, qu’il enverra dans l’espace en 2018), des berlines et des SUV. Parfois comparées à des "Iphone à roulettes" – tant les gadgets, accessoires et l'"environnement" de la marque sont importants -, ces voitures électriques séduisent les plus nantis.

Présentation du modèle S en 2009 en Californie
Elon Musk visitait un site de construction Tesla dans la banlieue de Berlin, le 17 mai 2021.
Un patron très (très) actif sur twitter (ici en Allemagne)

Points faibles

Mais l’ingénieur PDG, dont les présentations de voitures font toujours l’objet d’impressionnants shows, va proposer des voitures plus accessibles financièrement à partir de la fin de la décennie 2010 – toutes proportions gardées, la Model 3 par exemple, dépasse à l’achat 40.000 euros en France -. Musk détient à présent 22% du capital de Tesla. Une usine de production est installée depuis mars près de Berlin. 500.000 voitures devraient en sortir annuellement (l’an passé, selon Libération, 1 million de véhicules sont sortis des autres sites dans le monde).

Cependant, Tesla peut souffrir de difficultés, encore actuellement. Des "bugs" industriels (avec rappel de véhicules en Europe, en Chine…), poursuite en Californie pour discriminations raciales, des cas de harcèlement sexuel, des problèmes judiciaires liés à de possibles défaillances

Dès le lendemain du très médiatisé rachat de Twitter, la société a en outre perdu plus de 100 milliards de dollars à la bourse de New York.

Parole écologique

Investissant aussi dans des entreprises comme SolarCity (photovoltaïque) et dans le système Powerwall (une marque de Tesla), qui vise à stocker de l’énergie intermittente (photovoltaïque ou éolienne) , Elon Musk promeut l’écologie, qu’il présente comme un cheval de bataille.

"Notre objectif avec Tesla a toujours été de servir d’exemple à l’industrie automobile en espérant que les autres constructeurs fabriquent aussi des véhicules électriques afin d’accélérer la transition vers des technologies durables", indiquait il y a peu l’entrepreneur dans un entretien accordé au Time.

Elon Musk et l’argument environnemental pour son usine de batteries à Hawthorme, en Californie, le 30 avril 2015.
Elon Musk et l’argument environnemental pour son usine de batteries à Hawthorme, en Californie, le 30 avril 2015. © 2015 AFP

Un objectif vert qui n’a pas été exempt de polémiques. Comme au début de 2021, quand il annonça avec fracas sur twitter qu’on pouvait acheter une de ses voitures en bitcoin. En mai, revirement complet. Elon Musk avait semble-t-il pris conscience que la cryptomonnaie est source d’une dépense énergétique effarante… "Tesla a suspendu les achats de voitures avec des bitcoins. Nous sommes inquiets du recours de plus en plus important aux combustibles riches en carbone pour miner des bitcoins, surtout le charbon, qui a les pires émissions (de gaz à effet de serre) de tous les combustibles" annonça-t-il.

Ce message avait immédiatement fait plonger la valeur du bitcoin et de ses acolytes cryptomonnaies… "Tesla ne l’utilisera (le bitcoin, ndlr) pour des transactions que lorsque les mines seront alimentées par des énergies plus durables" a-t-il tweeté par la suite.

 

Archive JT du 17 février 2021 :

En achetant du Bitcoin : Tesla devient un immense pollueur

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Des p’tits trous…

The Boring Company ("boring" veut dire "ennuyeux" mais aussi "forage" en anglais) est mise en chantier en décembre 2016. L’objectif : creuser et percer en dessous des villes pour éviter les embouteillages. Bon, ce n’est pas Musk qui a inventé le tunnel, mais la société va essayer d’en construire aux moindres coûts. Des machines de percement moins chères pour des réseaux souterrains où on pourrait voyager à des vitesses allant jusqu’à 200 km/h.

Chicago pourrait être un terrain de réalisation pour un "Chicago Express Loop" afin de relier le centre de la mégapole à son aéroport. En 12 minutes pour un trajet de plus de 32,2 km. Citons aussi un projet dans la tentaculaire "cité des Anges". Los Angeles.

A Las Vegas, il crée ce qui est surnommé la "Rainbow Road" ("route arc-en-ciel"). Pour désengorger le centre de Convention, quatre portions de 600 mètres chacune sont creusées. Des Tesla circulent dans ces tuyaux étroits. C’est joliment coloré, ça a le mérite de coûter moins cher qu’un métro classique, mais c’est très lent (56 km/h au lieu des 250 km/h annoncés) et ça ne permet pas à des foules immenses de se déplacer. Le Loop de 50 millions de dollars a essuyé pas mal de critiques. Le projet déçoit, comparé à une "attraction nulle de chez Disney".

 

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On the road again !

M’enfin, gageons que l’entrepreneur fantasque ne s’arrêtera pas là. D’autant que sa Boring Company avait déjà engrangé des bénéfices pas piqués des hannetons grâce à un lance-flamme (!). Aussi appelé "chalumeau", vendu 500 dollars pièces et estampillé du nom de la marque, il est parti comme des petits pains en 2018. Aux USA, les lance-flammes ne sont pas considérés comme des armes à feu et leur vente a engrangé 10 millions de dollars.

Evénement lors de l’inauguration du tunnel de test de la "Boring company" en décembre 2018, Hawthorne, sud de Los Angeles (avec le fameux "chalumeau — lance flamme")
Une Tesla Modele X dans le tunnel de test d’Hawthorne (décembre 2018)

Potache

Elon Musk est habitué des opérations marketing comme celle-ci. Jamais avare en coup de com', idées farfelues, gadgets et railleries envers ses petits camarades boursicoteurs, il a ainsi sorti en décembre dernier un sifflet en forme de Cybertuck, vendu 25 euros pièce, pour se moquer d’Apple, qui avait vendu une chiffonnette au même prix. Le succès fut, fallait-il s’en douter, au rendez-vous.

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Idées fulgurantes

Notre "Tony Stark",- en référence au héros Marvel ("Iron Man"), directement inspiré dans les films par Elon Musk-, ne fait pas que creuser des tunnels, il aimerait aussi des tubes où des "capsules" seraient projetées… encore plus vite. Et un de ses plus fascinants projets, c’est évidemment l’hyperloop.

Maquette Hyperloop, à Munich, le 12 juillet 2021
Intérieur d’une capsule hyperloop pour les passagers, à l’expo internationale de Dubaï (2021)
Modèle de capsule hyperloop à l’expo de Dubaï 2020

Hyperloop

C’est en 2012 que l’idée germe. Un "cinquième moyen de transport" (après le bateau, l’avion, la voiture et le train). Il s’agirait de déplacer des capsules sur des coussins d’air le long d’une voie faite d’un tube à basse pression. On projetterait ainsi à des vitesses vertigineuses (1200 km/h) passagers émoustillés et/ou fret. Musk Le projet est ouvert aux offres concurrentes de plusieurs entreprises, dont la start-up "Hyperloop One". Une démonstration d’un prototype est réalisée près de Las Vegas en mai 2013.

Il permettrait à terme de relier en une demi-heure les 600 km séparant Los Angeles de San Francisco, selon ses ingénieurs. Le projet a eu du plomb dans l’aile, notamment à cause du projet (déjà lancé) d’un train à grande vitesse entre San Francisco/ Sacramento et Los Angeles/San Diego.

Mais l’idée "hyperloopesque" a fait des petits. Elle donne des envies de projets notamment pour relier des capitales européennes (Vienne-Bratislava, par exemple), au Canada, ou encore dans le Limousin.

Archive JT du 12 mai 2016 :

Hyperloop, le train du futur, sera très très rapide

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Intelligence artificielle et cobayes

L’homme est pro-nucléaire, se prononce contre les armes autonomes (dites " robots tueurs "). Il s’inquiète aussi au sujet des dérives de l’intelligence artificielle. C’est ainsi qu’il crée le centre OpenAl, à San Francisco, où des dizaines de start-ups sont regroupées. L’entreprise vise à promouvoir et développer une "intelligence artificielle à visage humain".

En 2016, il fonde une autre start-up : Neuralink. Celle-ci, implantée aussi à San Francisco, mène des recherches en vue de connecter intelligences humaines et artificielles. Par le biais d’un implant cérébral (une interface neuronale directe comme une puce), des personnes lourdement handicapées pourraient donc recouvrer leur mobilité ou encore la parole. Le projet fait frémir de nombreux scientifiques. Une scientifique américaine explique, dans un article de futura sciences, qu’elle "s’inquiète d’un mariage inconfortable entre une entreprise à but lucratif… et ces interventions médicales qui sont, espérons-le, là pour aider les gens"Qu’à cela ne tienne, des expériences ont déjà été menées sur des singes – avec des décès à déplorer — et sur l’Homme, ce serait pour très bientôt, selon Musk lui-même.

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Management singulier

Elon Musk, qui se veut éternel optimiste, est, on l’a vu, un original. Mais concernant sa façon de manager ses équipes, il garde cependant bien les pieds sur terre. Et est plutôt carré. Ainsi, nos confrères de Slate.fr expliquent que dans le cas notamment du Loop de Las Vegas (dont nous vous parlions un peu plus haut dans l’article), les employés seraient fortement encouragés à respecter certaines contingences. Notamment concernant les questions posées sur le fondateur. Elon Musk a une aura fascinante chez bien des touristes, et il s’agit de ne pas les décevoir. Des commentaires ont donc été écrits et scénarisés. Les employés, qui ne l’ont pour la plupart jamais rencontré, doivent répéter à tour de bras qu’il est "génial", "inspirant", "motivant".

Un "leader maximo" qui serait donc malgré tout peu enclin à la critique, surtout au regard de l’auto-dérision dont il fait souvent part dans sa communication. Musk n’a par le passé pas toujours lésiné à divulguer des flops ou autres ratés. Ainsi, en 2017, comme on le rappelle au journal Le Soir, Musk fit part à la terre entière des déboires qu’a connu Space X pour faire atterrir le lanceur Falcon 9.

Souvenons-nous aussi de la vitre moins récalcitrante que prévu de son "Cybertruck" en 2019…

Vidéo de "L’Obs"

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Personnalité tweetesque

En 2018, Musk déclarait "J’utilise mes tweets pour exprimer ma personnalité. Certaines personnes le font avec leurs cheveux. Moi j’utilise Twitter", se souvient Libération ce mardi. Et nos confrères Français de décortiquer nombre de ces messages postés pour en savoir plus sur sa personnalité. La recherche est édifiante. Elle fait apparaître un homme tantôt fanfaron, tantôt très méprisant envers la presse (notamment quand elle met en lumière des défauts survenant chez ses Tesla) ou le monde syndical. Il peut aussi verser dans l’outrance malsaine, comme lorsqu’il a traité maintes fois de "pédophile" un plongeur britannique qui avait sauvé une douzaine d’enfants prisonniers d’une grotte thaïlandaise. Musk c’était à l’époque vu refusé sa proposition d’envoyer un sous-marin de poche pour récupérer les enfants.

Supportant mal la critique, l’homme interfère publiquement auprès d’autres utilisateurs de façon parfois puérile, comme le souligne le journal Le Monde. Et celui-ci de rappeler que le magnat avait émis l’idée de créer un service de notation des médias et des journalistes. Il l’aurait baptisé "Pravda", du nom du journal officiel du parti communiste du temps de l’URSS.

Egotisme et contradictions

Sur Twitter, le magnat économique joue la carte d’une certaine "transparence". Il y commente ses déclarations d’impôts, parle de ses enfants (nous y reviendrons), lance des sondages auprès de ses followers, joue avec le cours du bitcoin, les dernières trouvailles de ses entreprises, se la joue complotiste avec le coronavirus, veut aider l’Ukraine, défie pour cela Poutine dans un "combat d’homme à homme", fait des blagues lourdingues sur le physique de Bill Gates, se moque aussi des politiques… Bref, il n’arrête pas. Il occupe le terrain et fait sans cesse parler de lui.

Une nature "un rien" narcissique, Elon Musk ?

Suivis par des milliers d’admirateurs, ses messages peuvent créer des mouvements. Mouvements boursiers, torrents d’injures envers des personnes ciblées par le "gourou" Musk (notamment à l’encontre de certaines des journalistes femmes), il utilise le réseau social à sa guise.

La "transparence" et la liberté d’expression qu’il dit chérir ne l’empêchent pas, toujours selon le Monde (citant l’agence américaine Bloomberg), de faire que Tesla se rapproche des autorités chinoises pour se plaindre d’attaques dont la société se disait victime sur les réseaux sociaux chinois, demandant que Pékin intervienne et bloque certains de messages…

 

Musk, argent et politique

Musk s’affichant libertarien, athée, aime se mêler de politique. Et pour le moment, une de ces cibles, ce sont les démocrates. Jamais avare d’un commentaire peu élogieux sur Joe Biden, notamment sur son âge, il fustige régulièrement l’ordre établi – et surtout quand il s’agit de taxes —.

On se souvient donc de polémiques récentes, comme lorsqu’il n’a pas voulu que ses employés en Californie télétravaillent alors que la première vague de covid-19 battait son plein dans l’état. " Rendez aux gens leur foutue liberté ", " cette panique autour du coronavirus est débile " avait tweeté Elon Musk en avril 2020. Il qualifie même les mesures des autorités de "fascistes". Après cet épisode houleux, il déménagera ses activités un peu plus à l’est, au Texas. L’Etat, davantage acquis à la cause des Républicains, sera sa nouvelle base. Une nouvelle base… moins imposée. Même… beaucoup moins. Là-bas, l’impôt local sur le revenu est égal à zéro. Ça tombe bien.

Base Space X près de Boca Chica dans le sud du Texas. C’est aussi le cadre d’une zone de protection des oiseaux, en passant…
Base Space X près de Boca Chica dans le sud du Texas. C’est aussi le cadre d’une zone de protection des oiseaux, en passant… © AFP or licensors

Le parti démocrate, c’est pas trop son truc. En 2016, il sera nommé conseiller économique auprès du Républicain Trump. Le cénacle de grands patrons entourant le sulfureux président américain, il en claquera la porte quelques mois plus tard, en juin 2017, après la décision de sortir des accords de Paris sur le climat "Je suis déçu par la décision aujourd’hui (jeudi) sur l’accord de Paris. Le changement climatique est réel. L’industrie doit maintenant prendre la tête et ne plus dépendre du gouvernement" avait-il tweeté à l’époque.

Le magnat a aussi été mis en cause par certains dans la déstabilisation politique en Bolivie en 2019. Dans le viseur, les riches réserves de lithium dont le pays andin dispose. Le lithium, ressource nécessaire à la fabrication de batteries électriques, aurait donc poussé des pays étrangers à intervenir contre le président alors en place Evo Morales.

17 septembre 2018 en Californie
17 septembre 2018 en Californie © AFP

Une vie privée bouillonnante

Côté vie privée, l’homme d’affaires n’est pas exempt non plus de tumultes. Marié trois fois, il a été le père de nombreux enfants. Tout d’abord issus de sa liaison avec une romancière canadienne rencontrée à l’université, en Ontario. Le premier enfant décédera subitement à dix semaines, des suites d’un arrêt respiratoire, selon le Figaro. S’ensuivront cinq enfants ensemble (des jumeaux et des triplés). Le couple divorcera en 2008.

Elon Musk épousera ensuite par deux fois (de 2010 à 2012 et de 2013 à 2016) l’actrice anglaise Talulah Riley. Ensuite, il jettera son dévolu sur une autre actrice, l’américaine Amber Heard. Celle-ci venait tout juste de divorcer de Johnny Depp. Le milliardaire a d’ailleurs été amené à se rendre au procès qui se tient en ce moment entre Depp et Heard en tant que témoin.

L’histoire est tumultueuse et en 2018, Musk commencera une relation avec Claire Boucher, une chanteuse canadienne connue sous le nom de Grimes. Le couple défrayera la chronique car il s’agira d’une saga. Ruptures, réconciliations, et deux enfants. Le premier est un fils. Son doux nom est X AE A-XII (mais appelez-le volontiers "X").

Elon Musk et Talulah Riley (à gauche) et le multimilliardaire avec Claire Boucher (dite Grimes) à droite.
Elon Musk et Talulah Riley (à gauche) et le multimilliardaire avec Claire Boucher (dite Grimes) à droite. © AFP/BELGA

Ruptures, réconciliations, et deux enfants. Le premier est un fils. Son doux nom est X Æ A-XII (mais appelez-le volontiers "X"). Ce n’était cependant pas le premier choix, il devait s’appeler normalement X Æ A-12, mais les autorités californiennes – décidément, elles ne font rien qu’à l’embêter ! – n’acceptent que les lettres de l’alphabet et les tirets. Explication cependant du nom (qui finalement plaît encore mieux à la maman, a-t-elle confié) par Grimes : “X, la variable inconnue. Æ, mon orthographe elfique de Ai (amour et/ou intelligence artificielle), A-12, précurseur du SR-17 (notre avion préféré)”. Le "A" faisant également référence à "Archangel", sa chanson préférée, précisa-t-elle.

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Le deuxième enfant du couple sera une petite fille. Née d’une mère porteuse fin 2021, alors qu’ils étaient séparés, elle est prénommée quant à elle Exa Dark Sideræl. Mais ils disent la surnommer "Y". Le couple, resté ami, pourrait avoir d’autres enfants. En attendant, le magnat a été vu dernièrement au bras d’une actrice australienne, Natasha Bassett. Affaire(s) à suivre pour les aficionados de la presse people…

Caisse de résonance

Avec sa fortune stratosphérique estimée à 250 milliards de dollars, l’homme est encore et toujours sous les projecteurs. S’affichant volontiers souriant et volontaire, il cacherait donc une belle part d’ombre. Comme il peut le montrer via ses messages sur les réseaux sociaux. Twittos presque maladif prônant une liberté d’expression à tous crins, il a donc finalement acheté son (coûteux) nouveau jouet.

L’adage qui dit que l’on n’est jamais mieux servi que par soi-même est donc dans ce cas-ci particulièrement à propos. En mettant la main sur la firme à l’oiseau bleu, ses algorithmes et ses utilisateurs, Elon Musk pourra surtout bénéficier d’une liberté totale… pour lui-même. Liberté de jouir d’un pouvoir énorme, de communiquer ce qu’il veut à qui il veut, sans se justifier auprès d’autorités, d’actionnaires (il voudrait faire sortir twitter de la bourse), ou du marché.

Une fameuse caisse de résonance pour les projets de l’homme fantasque, mégalomane, intelligent, riche comme personne, complexe, peu enclin à la contradiction et qui sait visiblement très bien ce qu’il fait.

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